Arnaud Beaujeu, Fleur d’encre

Par |2017-12-27T01:50:43+01:00 20 novembre 2017|Catégories : Arnaud Beaujeu, Poèmes|

Garçon-fleur

Il a une fleur de mauve entre
les inci­sives des bou­tons d’or
dans les cheveux un glaïeul sauvage
posé sur son oreille
un lilas dans le cou
entre le pouce et
l’annulaire il tient un coqueli­cot une rose est
sur son cœur il a des myosotis
à cha­cun des orteils

Fleur d’encre

Les doigts tachés d’indigo bleu en pres­sant l’encre
du mus­cari la vie qui se décale un peu le temps passe
et sourit
Unies dans un verre à alcool les clo­chettes du muscari
une ou deux pâquerettes une fleur de
pissenlit
Tach­es d’encre dans les fos­sés sur les talus
et par les prés
d’encre vio­lette encore tachés

Le manteau

Un jour j’ai dessiné
un grand man­teau de mots
Les manch­es étaient de vers les épaules d’argot
Les pans phras­es-gue­nilles descendaient jusqu’au sol
pour par­tir en lam­beaux de syllabes
de lettres
et de non-dits idiots

Et ce besoin d’écrire pour
laiss­er une histoire
à ceux qui reviendront
Ecrire écrire écrire
en dés­espoir de trace
pour lancer une histoire
à tra­vers nos questions

 

 

 

 

Les déchirures du ciel

Les déchirures du ciel ouvrent
sur d’autres vies
dis­paraître dans l’inconnu marcher
vers d’autres vues
où la mer éten­due per­met d’écrire
le jour la nuit
auprès d’un feu de cheminée

Nag­er des heures entières peut-être
jusqu’à se noy­er revenir
en arrière une table sur la mer
au bou­quet déposé

Puis des frag­ments de lumière
un sourire dans l’été
un lit quelques hivers s’enfuir
dans d’autres nuits

Je ne sais plus ces choses-là désormais
ne m’en sou­viens plus
je courais jusque dans l’envers
désor­mais ne m’en sou­viens plus

Une table

Tu as une table et tu écris
Tu t’assieds sur le bord
de la mer tu cherch­es un horizon
la mer est ton mys­tère tu recherches
son nom

Il y a un lit une mai­son la nuit qui veille
les murs de chaux
et la vie s’ensommeille

Quand on ouvre les volets il n’y a plus
que l’horizon sur le bord
de la mer des falais­es en eau profonde
Au som­met une maison

Nocturne

Il fai­sait nuit je ne dor­mais pas
et les ombres entouraient la maison
La vigne vierge entrait par la fenêtre
sur le dal­lage se découpaient
les reflets d’ombres du feuillage
éclairé par la lune

J’étais comme dans un rêve
je mar­chais dans l’allée par la lune éclairée
mais la brise pas­sait les nuages passaient
sur le ciel

Présentation de l’auteur

Arnaud Beaujeu

Agrégé de let­tres mod­ernes, doc­teur en langue et lit­téra­ture français­es, rat­taché au CTEL, Arnaud Beau­jeu a pub­lié en 2010 et 2011 deux ouvrages :

  • Matière et lumière dans le théâtre de Samuel Beck­ett, Peter Lang ;
  • Samuel Beck­ett : triv­ial et spir­ituel, Rodopi.

Mem­bre du comité de rédac­tion de la revue Nu(e), il a pub­lié plusieurs suites de poèmes dans cette même revue :

  • « D’un regard blanc », n°36 (« Michel Steiner ») ;
  • « La lumière et les mots », n°42 (« Anthologie ») ;
  • « L’été », n°45 (« Pierre Dhainaut ») ;
  • « Bleu ciel », n°48 (« Jean-Michel Maulpoix ») ;
  • « De pierre et d’eau », n°49 (« Bernard Noël ») ;
  • « Autre enfance », n° 52 (« Jokari »))

Et prin­ci­pale­ment dans les revues Arpa : « Le pays des en-allés », n°102, « la ton­nelle », prochaine­ment) ;  Thαumα : « Frères d’amour », n°5 con­sacré aux oiseaux ; « Autodafé », n°6 con­sacré au feu ; « En patience » n°10 con­sacré à la patience ; « même au-delà du raisonnable », (prochaine­ment) et Ser­ta  : « Les mots blancs ».

Il a égale­ment pub­lié des arti­cles et entre­tiens sur et avec les poètes con­tem­po­rains Bernard Var­gaftig, Jean-Pierre Lemaire, Pierre Dhain­aut, Marie-Claire Banc­quart, Charles Juli­et, François Cheng, Béa­trice Bon­homme-Vil­lani, etc.

Arnaud Beaujeu
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