J’ai trois armes con­tre la pau­vreté, des antidouleurs
pour la mal­adie, mais pour l’er­reur de diag­nos­tic, je n’ai rien.
Devrais-je laiss­er un mes­sage absurde, ou juste m’en aller,
ou fer­mer les portes pour t’en­ten­dre une fois encore?

A cinq ans, je pou­vais imiter un son. Il appa­rais­sait devant moi
comme un spec­tre, je le pho­tographi­ais avec mes mains, comme toi
quand tu pour­chas­sais le fan­tôme sur Nabokov Hill. Je m’asseyais
à la fenêtre, déco­dais les feuilles, ou grim­pais à l’arbre

pour observ­er ses veines de près. J’é­tais attirée par ces lignes
chan­tant comme les rayons du soleil. Je les touchai.
C’est alors que tes yeux ren­con­trèrent les miens. Je touchai davan­tage, les échos
apai­saient toutes mes peines juvéniles . Je ne pou­vais pas choisir

l’ar­bre près de la fenêtre (un mûri­er), mais je pou­vais apporter
en classe des vers à soie, qui ont décidé de ma route de la soie.
Nous sommes allés à Saint-Péters­bourg, Cra­covie, Vil­nius, ensemble,
et nous avons volé partout où mon doigt pou­vait pointer -

per­son­ne ne con­nais­sait mon pou­voir mag­ique, il mar­chait seule­ment quand je
plaçais mes doigts sur  tes  points de pres­sion — impos­si­ble désormais.
Un arbre mort peut renaître des racines, des feuilles se trans­former en ailes.
Je suis née deux fois moi aus­si, l’une dans l’en­fance, l’autre avec toi.

(traduit par Mar­i­lyne Bertoncini)

 

 

I have three weapons against pover­ty, painkillers
for ill­ness, but for mis­di­ag­no­sis, I have nothing.
Shall I leave a non­sense mes­sage, or just leave, 
or close doors to lis­ten to you once more?

At age five, I could imi­tate sound. It appeared before me
as a spec­trum, I pho­tographed it with my hands, like you
when you chased the phan­tom on Nabokov Hill.  I would sit
by the win­dow, decode the leaves, or climb up the tree

to look close­ly at the veins.  I was drawn to those lines
the same way I would read you lat­er on, not to iden­ti­fy, but
to per­ceive, they told me as much as a music staff,
encod­ed like your eyes. I couldn’t choose

the tree by my win­dow (mul­ber­ry), but I could take
silk­worms to the class­room, which decid­ed my silk road.
We went to St. Peters­burg, Krakow, Vil­nius, together,
and flew any­where my fin­gers could point to—

nobody knew my mag­ic pow­er, it worked only when I
placed my fin­gers at your pres­sure points— impos­si­ble now.
A dead tree can be reborn from roots, leaves grow into wings.
I was born twice too, once in child­hood, once with you.

(Trans­lat­ed by Ming Di and Tony Barnstone)

 

 

柏辽兹

对付贫困潦倒,我有三种武器,对付疾病,
我有强力去痛片,对付误诊,我一筹莫展,
不知该留下几句废话,还是不告而别,远行,
或是关上门窗,把你从头到尾再听一遍。

五岁时,我会模仿一种声音,它先以光谱
出现在我眼前,我用手去摄取,如同你
在纳博科夫山上扑打幻影。累了我就坐窗前,
阅读树上的密码,父母不在时我就爬到树上

仔细看树叶的纹路,我对那些线条的兴趣
与后来阅读你一样,不是为了识别,而是
为了感知,它们给我的信息和五线谱一样多,
和你的眼睛告诉我的一样丰富。我不能

选择我家窗前那棵植物(桑树),但我把蚕
带到教室,就注定了后半生的选择。
我们一起去圣彼得堡,克拉科夫,维尔纽斯,
我的手指点一个地方,我们就飞到那里,

这种神奇功能别人不知道,我只有在点你
的穴位时才灵。我的手被切断。树死了
可以从根部再长一次,直到树叶长出翅膀。
我也成长过两次,一次在童年,一次在你身边。
 

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