Ici j’ai appris à voir chaque bruit
J’entends l’éclair du fil au crépuscule
Lorsque j’enfonce l’aiguille dans un bouton
Une boucle blanche enroulée comme une oreille qui écoute
À l’écoute de qui depuis tant de temps ?
Les doigts de qui
Sur la peau, sur la neige, der­rière la fenêtre
Dans le givre sur la vitre ?
À qui étaient ces yeux
Quand tous les mots n’étaient
Qu’un bruit de stac­ca­to de pierre sur le plancher ?
Et aus­sitôt roulent les vagues
Le temps dérobe sous mes pieds le fond inégal
Et la suivante
Duvetée, rem­plie d’algues s’élance et se dresse
Et dans les airs
La mou­ette se retourne au-dessous de moi
Comme dans un film au ralenti
Les ailes en bas
La mer trébuche soudaine­ment con­tre le ciel
Le temps se cache der­rière le temps
Der­rière le fil enroulé comme une oreille qui écoute.

Poème extrait de Nigdy catoś­ci (1995)

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