La neige lais­sera mes mains froides.
Ces mains avec lesquelles j’ai fait tant de feu
pour rien. Cette neige qui enlace
sa pro­pre impa­tience, qui conspire
sur les vit­res. Ces mains mortes
de froid comme un pan de mémoire.
Cette neige qui ne se sou­vient plus
de la pierre embrasée. Ces mains
qui écrivent pour rien, pour le dernier
feu, pour une musique perdue.

La neige lais­sera mes mains froides.
La neige qui me prend à la gorge.
Ces mains qui tour­nent la tête
à chaque pas. Cette neige lente
comme si tou­jours elle était la première.
Ces mains qui ont fait tant de feu
pour un soir unique, pour un jour.
Cette neige qui dort sous les étoiles.
Ces mains qui croient en ce qu’elles touchent
et qui touchant la neige touchent le néant.

La neige lais­sera mes mains froides.
Ces mains qui ser­rent un oubli
qui ne s’en­tend pas. Cette neige qui en joue
comme d’un toit sans musique.

 

Tra­duc­tion par Dominique Boudou, révisée par Elvire Gomez-Vidal

 

 

Can­ción de nieve

 

La nieve dejará mis manos frías.
Las manos con las que hice tan­to fuego
para nada. Esta nieve que se abraza
a su propia impa­cien­cia, que conspira
en los cristales. Estas manos muertas
de frío como un tro­zo de memoria.
Esta nieve que no recuer­da el tacto
de la piedra encen­di­da. Estas manos
que escriben para nada, para el último
fuego, para una músi­ca perdida.

La nieve dejará mis manos frías.
La nieve que me ahoga la garganta.
Estas manos que vuel­ven la cabeza
a cada paso. Esta nieve lenta
como si siem­pre fuera la primera.
Estas manos que hicieron tan fuego
para una tarde solo, para un día.
Esta nieve que duerme a las estrellas.
Estas manos que creen en lo que tocan
y que tocan la nieve y tocan nada.

La nieve dejará mis manos frías.
Estas manos que apri­etan un olvido
que no se oye. Esta nieve que las toca
como a un teja­do que no tiene música.
 

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