Ecrire, fai­sions-nous, échangeant nos signes de recon­nais­sance par-dessus la haie des heures, à tra­vers l’aire de jeu provisoire.

 

bien avant l’aube/ la pluie aiguë/ son crépitement/ griffes de chat con­tre le carreau/ l’écouter s’affairer/ imprégn­er la terre avide

 

Et nous écla­tions de ce rire un instant sus­pendu entre flaques et nuages. Nous parta­gions des stu­peurs, penchés sur notre image fuyante.

 

l’aurore inscrite/ dans les replis du noir/ une annonce incisive/ la pâleur lente à s’affirmer/ au-dessus du jardin‘ 

 

Chanter. Nous aimions clairon­ner par les rues, leur désert, mais aus­si à voix très basse, à bouche cousue. Une rumeur d’être.

 

le matin par­court les allées/ fend les feuilles rouges/ dis­sipe la brume/ disque flamboyant/ aux abor­ds du fleuve noyé 

 

Et nous n’avions pas peur du loup- garou tapi sous les buis­sons. Notre fer­veur était sans alarme. Nous ser­rions, enfoui au creux d’une poche, le galet-talisman.

 

la mat­inée s’étirait en lumière/ posée sur la brique/ une allure de croisière/ vouée à ne pas finir/ hauturière/ et pourtant

 

Bondir par-dessus la dalle, le ruis­seau, le temps. Ivresse des envols. Défi­er la marche vaseuse, l’allure cal­culée, empruntée

 

dès midi/ nuages effilochés/ masquant briève­ment le soleil/ une fraîcheur dans la chaleur/ un vent levé/ bous­cu­lant les branches/ atti­sant les chutes

 

Et nous dépas­sions les maisons, nous emprun­tions les tra­vers­es, pénétri­ons les forêts. Etendus dans les clair­ières, gorgés de ciel entre les feuilles.

 

les après-midi indemnes/ liesse hors mesure/ clarté longue/ lucide/ une allé­gresse d’autant plus vive/ qu’elle était menacée

 

Escalad­er les branch­es bass­es, se hiss­er leste­ment , attein­dre le faîte et sur­plomber la houle verte, tois­er les toits, pressen­tir une vie rien qu’à soi.

 

le crépuscule/ son embrase­ment der­rière la colline/ avant l’effacement/ tel un don/ une splen­deur dorée/ sur le paysage engourdi

 

Et nous demeu­ri­ons des éter­nités à faire pro­vi­sion d’images glo­rieuses, à les engranger pour les jours murés où nous per­dri­ons jusqu’à la mémoire de l’aventure.

 

la nuit peut venir/ la beauté est si vaste/ un chenal départagera les ombres/ la ténèbre propice/ la sereine/ embaumera tout effroi 

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