Je rêve

Je rêve de tes mains

enser­rant le nœud de mes chevilles

 

De tes mains    douce­ment    remontant

au seuil de mon corps

pour me ren­dre à moi-même

et me redonner vis­age de femme

 

Je rêve   à nouveau

de venir à notre rencontre

pour y faire semailles

 

et je serai si tu veux

oasis à ton désert

et fontaine pour ta soif

et fleur éclatée

au regard de ton cœur

et source vivante

pour tes lèvres de tendresse

 

Je rêve      je rêve

de dunes en sillons

et de collines en vallées

tu vien­dras moisson­ner la fête

et je lais­serai pour toi

s’égarer les gestes de l’amour

ceux qui déjà nous sont venus

par la grâce du temps

ceux qui sont encore à naître

à force de nous-mêmes 

 

Je rêve     je rêve

Comme un bateau

prend la mer   dit le poète*

 

et je te lais­serai me prendre

me dessin­er et me mesurer

me con­train­dre et me libérer

me dis­tancer et me rapprocher

me délivr­er et m’épouser

 

Oui  je te laisserai

me pren­dre et me reprendre

il n’est  de moi

qu’une attente

 

Je rêve     je rêve

et peut-être    un jour    à nouveau

le feu bat­tant de mon sang

ouvri­ra pour toi

un chemin sauvage et vierge

           par­mi les étoiles

 

(*) Jean-Pierre Ros­nay, Comme un bateau prend la mer (Gal­li­mard, 1956)

 

 

extrait de UN GRAND VENT S’EST LEVÉ , Pip­pa édi­tions, 2013

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