A mille milles de toute terre habitée
où le ciel avec les eaux s’amalgament
croise le pétrel noir.
Ses mœurs et déplace­ments sont mystérieux
mais tout porte à croire qu’il a – et qu’il est –
un sauf-con­duit au pays des tempêtes.

     Il revient l’été unique­ment la nuit
vers la terre sombre
nich­er dans un terrier
au faîte d’un piton.
Nul ne l’a plus revu depuis des lustres
si bien qu’on a cru l’espèce éteinte.

A Grand-Bassin ils l’appellent la timise.

*  *  *

Elle a chez les Séry d’un coup d’aile éteint la
     lampe et lais­sé l’assistance médusée.
Elle attend au coin du bois le pas­sage de
     l’ivrogne – son froufrou l’a promptement
     dégrisé.
Le gémisse­ment des enfants qu’elle a
     four­voyés en pleine forêt vous glace les
     sangs.
Une forme se fau­file en mis­souque, une pierre
     se met à rouler, qui eut servi d’appui.

Les anciens du vil­lage le procla­ment à
l’unisson :
Sans man­quer le pétrel noir l’a fait ça –
anous, timise-là, nous con­naît pas li.

Ceux qui par­lent ne savent pas.
Ceux qui savent ne par­lent pas.

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