Jean-Marc Sourdillon, Veiller la nuit, l’hiver, ce n’est pas veiller contre

2017-12-30T00:32:55+01:00

 

Veiller la nuit, l’hiver, ce n’est pas veiller contre
          elle, ni à cause d’elle

comme si elle était une enne­mie. Ce n’est pas
          endur­er le temps obstrué, atten­dre l’aube
          qui tarde à venir.

Veiller la nuit, c’est veiller sur elle, comprendre
          que ce n’est pas moi qui souf­fre mais elle,
          comme si elle, la grande nuit, elle était
          petite et qu’elle avait la fièvre.

Comme s’il y avait dans sa part obscure mon
          dou­ble au féminin,

et qu’il fal­lait que je l’accompagne dans sa
          mon­tée, présence qui souf­fre et qui attend,
          et qui chante en mon­tant même si on ne
          l’entend pas, d’abord un ruis­seau pris dans
          de la glace, puis l’ombre déployée d’un arbre
          sur de la neige et pour finir cette graminée
          con­tre le ciel, crépi­tante de froid où je la
          recon­nais, la voie lac­tée, celle que j’aimais.

Comme s’il fal­lait, ce mou­ve­ment, oui, que je
          l’accompagne, que j’en fasse le dou­ble au-
          dedans de moi dans ma parole, pour que
          quelque chose, ou bien quelqu’un, à travers
          lui naisse et s’accomplisse,

quelque chose ou bien quelqu’un qui n’était pas,
          de très humain, de très fragile,

presque invis­i­ble, un bat­te­ment d’ailes ou bien de
          cils, une hési­ta­tion dans le loin­tain, qui
          scin­tille et qui fait que dans le chant quelque
          chose se brise, est sur le point tou­jours de se
          bris­er et finale­ment ne se brise pas.

 

 

Les Miens de per­son­ne,  La Dame d’onze heures (2010)
 

Présentation de l’auteur

Jean-Marc Sourdillon

Jean Marc Sour­dil­lon est né en 1961.  A pub­lié des livres poétiques :

  • Les Tourterelles (La Dame d’onze heures, pré­face de Philippe Jac­cot­tet, encres d’Is­abelle Ravi­o­lo, 2009).
  • Les Miens de per­son­ne (La Dame d’onze heures, pré­face de Jean-Pierre Lemaire, lavis de Gilles Sack­sick, 2010),
  • Dix sec­on­des tigre (L’Arrière-pays, 2011),
  • En vue de naître (L’Ar­rière-pays, 2017),
  • La vie dis­con­tin­ue (La part com­mune, 2017),
  • des essais et des nou­velles, Les voix de Véronique (Le Bateau Fan­tôme, 2017).

A traduit María Zam­bra­no et édité les Œuvres de Philippe Jac­cot­tet dans la Pléiade.

Jean-Marc Sourdillon

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