Ils sont tou­jours à part,
Ani­maux de l’ombre
Tou­jours sur le départ,
Qui s’é­car­tent du nombre,
Qui changent de trottoir ;
Là-bas, il fait plus sombre.
On les ver­ra peut-être,
Plus tard et par hasard ;

On les ver­ra à peine.
Ah tiens, que font-ils là ?
A leur tempe, une veine,
On dirait qu’elle bat ;
Et ce regard intense.
Autour d’eux, le silence ;
C’est leur nom ici-bas.
Et c’est comme un manteau
Sur leurs épaules informes.
On dirait qu’ils attendent,
Un sig­nal, un bateau,
Quelque chose, une forme.
Et leurs lèvres se fendent,
On croit qu’ils vont parler,
Leur langue délier ;
Ou peut-être sourire ?
Ils n’ont rien à nous dire.

On les laisse à leur place ;
On s’en va mais il reste
Encore de leur grâce ;
C’est l’ébauche d’un geste,
Au revers de leur veste,
Une fleur translucide ;
Leur façon de se taire,
Tis­serands du mystère
Qu’on nomme les timides.
 

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