Je ne suis rien. Je n’ai ter­miné aucune des tâch­es que je m’étais assignées : études en sci­ences, études en infor­ma­tique, boulan­gerie, restau­ra­tion… J’ai trop com­mencé de choses de peur de ne pas me ren­con­tr­er… Ren­con­tre qui n’a jamais jusqu’ici eu lieu. La seule con­stante se retrou­ve dans le men­songe, art qui per­met à tous de se préserv­er du « vivre ». L’écriture est pour ma part le men­songe dans ce qu’il a de plus sincère, de plus hon­nête face à l’illusion qui nous est sans cesse servie : notre méti­er, notre famille, notre classe sociale, nos amis… Com­ment ne pas soi-même men­tir dans un monde aus­si peu pourvu de réal­ité que le monde humain, et l’illusion la plus excel­lente réside dans le lan­gage inven­té chaque jour par nos soins. Les mots sont autant de points lumineux pour éclair­er les chemins obscurs, les recoins per­dus de nos exis­tences trop vides. Chaque mot que j’aligne est un sens don­né à mes pro­pres illu­sions, autant de rêves et de cauchemars en proie à la tra­duc­tion trop lit­térale du monde humain qui ne cesse de con­stru­ire et de décon­stru­ire. Voici pourquoi je n’ai eu cesse de lire et d’écrire mod­este­ment, et voici pourquoi du haut de mes quar­ante ans j’ai envie de partager cette part d’humanité avec mes « frères de vie ».

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