1

Le ven­dan­geur plus grand que le monde
a fait tomber sur nous
une trop lourde grappe

Que de tré­sors perdus
retrou­vés dans la forge des dieux

Sur la passerelle du vide
pro­fane et sacré dansent
dans une déchi­rante clarté

Vis­ite ailée de la félicité
Demain la lumière
ruis­sellera à gros bouillons
sur le sil­lage brûlant de l’aimé

 

 

                  
2

Retrou­ver le sens caché
des osse­ments de bois mort
sous la lune rousse
Trace de la chenille
sur l’écorce d’un chêne creux
Frag­ments de poter­ies brisées
sous les lits de calcaire
et de figues écrasées
Savoir enfoui des rouges baies
Incon­cev­able enchaînement
des phénomènes

 

 

3

Car­ré mag­ique en liesse
Joie buis­son­nante de l’éveil

Écla­tante énigme rétinienne
du migrant venu de nulle part
Je le retrou­ve à la lisière du jour
Lorsqu’il se fond
dans la splen­deur du monde
il sait que la mort
n’est plus un mystère

 

  

4

Une vapeur amoureuse
émane des corps épris
sous l’aura des amandiers
Loin des frondaisons
l’esprit vole où il veut
Il rede­vient enfant
près de sa lumineuse origine

De l’aube dorée du mil­lième matin
sur­gis­sent les fruits juteux du silence
O la sim­ple queue plantée
jusqu’au noy­au de la cerise

                    

 

5

Allongée sur une colline
j’ai dor­mi par éclairs
en cette nuit d’orage
Rêve et réel s’étreignent
sur les crêtes du sommeil
De même
le poème jail­lit par saccades 

Le rejoin­dre à la frontière
des ténèbres radieuses
La nuit a la forme
et toutes les couleurs de l’instant
Le présent seul est l’or du temps

 

6

Des paroles fusent
étin­celles qui transfigurent
le silence des pierres
Derniers feux du soleil pourpre
sur les mon­tagnes de quartz
Miel sauvage gouf­fres colombes
turquois­es sur le torrent
Mel­on éclaté de stupeur
Frelons incandescents

 

                 
7

Quelques mots suffisent
aus­si bons que le pain d’antan
un souf­fle fraternel
un oiseau sur l’épaule
un veilleur émerveillé
par les cieux sans âge
un fes­tin de sons liquides
une réminis­cence de l’éden
Les formes mou­vantes qui nous vêtent
ne finis­sent plus de déferler

La grande vie intérieure
N’a ni dehors ni dedans

                                  
                 (inédit)

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