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A propos d’Aimé Césaire (2)

Nimrod,Visite à Aimé Césaire suivi de Aimé Césaire, le poème d’une vie

La visite a eu lieu en juin 2006. Nimrod accompagnait Daniel Maximin à Fort-de-France. Ce que raconte Nimrod est bien plus que la visite d’un lecteur fidèle à l’un de ses auteurs favoris. C’est le récit d’une rencontre avec un homme et avec sa terre.

Être plongé dans le paysage qui a inspiré Césaire, un paysage à la fois beau et menaçant, comble Nimrod. « À présent j’ai du poème de Césaire une connaissance charnelle. »

Nimrod, Visite à Aimé Césaire suivi de Aimé Césaire,
le poème d’une vie
, Éditions Obsidiane, 2013, 78 pages, 14 €.

 

Césaire est « mal fichu » – ce sont ses dires. Il monte difficilement l’escalier qui mène à son bureau. Nimrod voit ensuite en l’homme ce qui est partout présent dans ses textes : des opposés qui coexistent. Malgré son âge avancé, ses problèmes d’audition qui obligent ses interlocuteurs à parler fort et sa petite forme, il a le regard vif, la parole claire et le style raffiné. Ensemble, ils parlent de Senghor, que Nimrod aime aussi.

De retour à l’hôtel, Nimrod réfléchit à la question des influences. « Césaire est le seul de nos poètes dont on ignore la filiation. Il ne sort pourtant pas de nulle part. De tels écrivains n’existent pas. » Nimrod, comme Léon Gontran Damas, pense que certains poèmes d’Aimé Césaire entrent en dialogue avec ceux de Charles Péguy. Cela peut paraître étonnant. Mais Nimrod a quelques arguments.

À la fin de l’ouvrage, Nimrod explique ce qu’entendait Césaire par négritude – concept que d’aucuns ont compris de travers, en pensant par exemple que Césaire se proclamait ainsi l’ennemi de l’Europe. Nimrod rappelle le contexte : « La négritude est la réponse que deux jeunes étudiants de la Sorbonne opposent au racisme. Exilés loin de leurs familles, vivant chichement (et pour cause : ils claquaient leur modeste bourse dans l’achat de livres), ce ne sont pas des bâtisseurs d’idéologies. Ils découvrent dans leur chair la douleur qui est celle des sujets coloniaux. Ils voient bien qu’ils ne comptent pas pour la France ; l’Afrique et les Antilles non plus. Les voilà choqués, révoltés. […] Aussi fondent-ils la revue L’Étudiant noir (1935-1936) pour faire connaître leurs idées. »

Nimrod insiste sur le fait que l’image figée que certains ont gardée d’un Césaire en colère ne correspond pas à la réalité.

  Le Cahier d’un retour au pays natal est un kaléidoscope de tons, de rythmes, de tempos. Le réduire au cri de révolte, c’est avouer ne rien y comprendre.

Et Nimrod referme son livre sur un mot qui sied mieux à Césaire : l’espérance.