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Abderrahmane Djelfaoui, la mer vineuse (disait l’aveugle)

à la mer qui s’entrouvre
la nuit se déplace
ailleurs lécher les narines du ciel

*

sur le sable
les marques fraîches ombrées
d’oiseaux d’aube envolés

pattes au ciel

                                    
*

oiseaux de mer défiant l’horizon
sans trop s’éloigner de la côte

*

(mais qui se demande pourquoi le roulis
des vagues amuse tant les hirondelles)
 

 

* * *

 

la mer comme il faut l’inventer
d’embruns et mirages

et comme elle s’invente
nuages mariés aux vents

enchantement de pollens ou
pluies mûres des soleils

 

 

* * *

 

 

à mes filles

 

quel oiseau en vol douterait
du battement de ses ailes
et quelle baleine de son petit

tout oiseau poursuit un sillage
et tout cétacé le plongeon de son souffle

dont les écailles seules
savent se faire l’écho

 

 

* * *

 

 

fragments épars (d’Empédocle)

mon destin est d’être une pierre
espoir de trop quand l’espoir  rase
semelle de sa poussière

*

la pitié de moi-même
est un souffle sourd qui va
tonnant l’inconnu

*

fils de l’anonyme
l’aède n’est que mer
en flux
enfermé pensée
dans sa conque percée
d’un fil d’aube

un détroit sans lune
un disjoncteur non fiable

 

 

* * *

 

 

sous un figuier vert

monte un chant de cigales
brûlure d’une âme
qui s’en va feuille à feuille

la Méditerranée est cette insolation
d’ ombres et d’ hospitalité dans la douleur
que nos yeux sommeillent
et sommeilleront longtemps
au cou d’une étoile

 

 

* * *

 

poèmes extraits de : « la mer vineuse (disait l’aveugle) »
Editions L. de Minuit, Alger, 2012  

 

 

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