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Angoisse

 

                                          « Notre cœur est inquiet.»

                                                                       Saint Augustin.

 

L’ombre des créatures décline dans le crépuscule des apparences
Je suis seul au bord d’une neige inconnue
Et mon désir grandit comme les fastes annoncés à l’horizon
Je suis seul et l’aurore mystérieuse étend ses merveilles vers des hauteurs ignorées
Cortège nuptial –mais pour qui ?
Plaisirs lunaires d’une fille hautaine
Ardente à glacer les cœurs
Je suis seul dans les marais brûlés par la comète
Les visions s’enfuient de mes yeux mornes
Les paysages sombrent dans la débâcle des glaces
Je cherche le repos silencieux de la mer hivernale
Souvenir au sein mystérieux de l’être
Sommeil et retour à l’ineffable Présence
Où germe tout dans l’obscurité des origines
Je suis dans un abandon étrange –les siècles ont fui
Aux approches du soir du monde
Voici maintenant que s’élève la nuit bienheureuse
C’est l’inquiétante beauté d’un front chaste dévoilé
O puissance tutélaire ! Je suis
Tremblant et frénétique – l’angoisse creuse mon esprit:
Au ciel de mes yeux déments est-ce la venue
De l’obscurité du pays sans paysage?
Ou bien le ténébreux visage d’une femme
Reine des contrées spirituelles
Où s’épanchera mon amour sanglotant
Pour connaître enfin l’inconnaissable Paix
Où stagnent les existences révolues ou futures ?