1

L’Éponge

La naissance d’une nouvelle revue, et à fortiori de poésie et de littérature, est à saluer. Cette nouvelle venue s’intitule malicieusement L’ÉPONGE, logique puisque si « les artistes s’imprègnent de leur époque », c’est pour mieux, conclut son sous-titre bravache, « éclairer les esprits »… dès la couverture le ton est donné.

Au fil des 3 numéros parus, la revue trimestrielle  tient ses promesses de diversité, d’éclectisme, voire même d’humour, ou tout au moins disons d’un certain ton décalé : une entreprise sérieuse qui ne se prend pas au sérieux ; au premier abord, une forme étonnante, un peu une curiosité dans  le monde des revues de poésie : format magazine, presque journal, avec de la couleur et une jolie maquette avec des illustrations (photographie, dessin et même de la caricature oui oui !).

Jugeons le contenu littéraire sur pièces à l’aune du troisième numéro, décembre 2023 : sur 24 pages, la parole est donnée à 18 auteurs soit au total, à découvrir, 16 poésies et 4 nouvelles, sans oublier 3 dessinateurs. Pas ici d’école ni de chapelle, les critères des animateurs sont la qualité, la diversité et l’inédit (jamais encore publié) : les poésies sont « libres », rimées, mesurées ou non, en haïku ou en prose, elles sont suivies de quatre nouvelles délicieusement étranges et variées, et il faut ajouter deux pages de critiques bibliographiques thématiques - hors genres, modes, époques et notoriété est-il précisé - (n°1 Les voyages, n°2 science-fiction, n°3 nature et écologie) et une page consacrée à un auteur (n°1 Antoine Blondin  - le Hussard infréquentable, il faut oser ! -, n°2 Patti Smith, et n°3 un poète français (totalement inconnu de moi) vivant aux Etats-Unis, Sébastien Ayreault. Il y a aussi une page finale de réflexion disons sociale, faute de mieux, et intitulée  « Je doute, donc je pense, donc j’éponge » ; 




La boussole des animateurs de cette revue poétique et littéraire semble être avant tout la liberté, et leur ambition celle d’ouvrir un espace – de plus – d’expression et de création artistique : que nos vœux les accompagnent !

Vente au n° (papier 6€, numérique 3€) Abonnements papier (2 ans 8 n° à 60€) numérique (2 ans 8 n° à 20€) 







Forêt(s) : Anthologie

Honnêtement, à la réception du livre que j’avais souhaité chroniquer, ma première réaction fut  « Dans quelle galère me suis-je embarqué ? » ; je n’avais fait mon choix qu’en fonction du titre et de la photo de couverture. Comment rendre compte en effet d’une anthologie ? Qui plus est, une anthologie thématique : Forêt(s).

Puis, j’ai passé la lisière, je me suis engagé, décidé : prenons les choses autrement, commençons par l’intention du recueil : un hommage rendu à Alain Boudet, poète et fondateur de l’association devenu maison d’édition « Donner à voir » ; je ne connaissais pas Alain Boudet, ni personnellement ni même comme poète et, après une première lecture du recueil, je me suis dit c’est bien dommage… un homme qui a laissé derrière lui une maison d’édition, suscité tant d’amités, j’aurais bien aimé… il reste toujours ses poèmes…

Reprenons : Alain Bourdet fut donc le fondateur, ou l’un des fondateurs, disons la cheville ouvrière, d’une petite (mais nous y reviendrons) maison d’édition qu’il avait appelée « Donner à Voir » en hommage à Paul Eluard ; effectivement DAV ne donne pas seulement à lire ou a entendre (la poésie, même lue en voix intérieure, est toujours orale n’est-ce pas), mais aussi à voir ; en effet, sous ce titre, depuis 1984 un groupe de poètes, de graphistes mais aussi de peintres, de sculpteurs ou d'amis de la poésie se sont regroupés en association pour promouvoir la poésie sous toutes ses formes, en l'associant au besoin à d'autres langages artistiques. Les curieux iront avec profit consulter le site http://www.donner-a-voir.net/qui.html

Forêt(s) : Anthologie, juillet 2022, 56 pages – 978-2-9000-12-161. Prix : 9,00 €

Le recueil « Forêt(s) » est donc l’un de ces livres, publié dans l’une des quatre collections de la petite maison d’édition :  « les petits carrés » qui propose, pour un prix modique, des petits livres imprimés sur des papiers rustiques recyclés de 16 à 48 pages. Chaque livre au format 14 x 14, fruit d'une collaboration entre un poète et un plasticien, se trouve être imprimé en autant d'exemplaires que l'année compte de jours: 365 ou 366 – symbolique humoristique - et est accompagné d'un marque-page et d'une enveloppe en papier rustique.

Jusque là, facile de décrire et rendre compte ! Sauf que « forêt(s) » est une anthologie : 54 pages contenant 40 poèmes et des illustrations gravures de 46 arboricultrices et arboriculteurs, comme l’indique malicieusement l’index de fin d’ouvrage ; dans cet index, les artistes sont classés non par ordre d’apparition mais par ordre alphabétique, embroussaillement très certainement volontaire, très sain refus de la hiérarchie. Autrement dit : « lisez les tous et votre goût reconnaîtra les siens » ; pour compléter le tout, cherchez l’erreur, pour 13 œuvres graphiques différentes, seulement 6 illustrateurs… certains poètes étant aussi dessinateurs ou graveurs. Tout ça fleure bon (langage végétal encore pour arriver à la Forêt), tout ça fleure bon donc la complicité, l’amitié,  l’hybridation, la vie.

Chacun l’aura compris, c’est foisonnant, j’allais écrire buissonnant, à souhait ; varié et libre comme une vraie forêt (pas les plantations de pins, uniformes et monotones que l’on voit un peut partout en guise d’espace vert ou d’équivalent carbone), avec des sentes, des sentiers, des chemins creux, des frondaisons plus régulières, presque au cordeau, d’autres clairsemées, des arbrisseaux, et des troncs et des pierres moussues, tordues.

Bref, le titre – au pluriel - est doublement précis : thème et foisonnement ; toutes les essences, tous les styles y sont: trois proses poétiques, un sonnet canonique, des vers libres (totalement et graphiquement), des rimes, des vers mesurés ou non, assonances… et vers chantant (p9 Alain Boudet justement : Ce n’est pas un arbre d’usage / Cet oranger des Osages / Un arbre de voyage caché dans le barda / […]) , d’autres plus conceptuels, plus informels ou même poèmes écrits à deux mains (p32), des clins d’œil  (p17 Naître on ne pas naître ? / Un moment de grâce / Mes dés n’ont pas encore roulé ; ou p 39 Même si c’est un détail / « L’arbre qui cache la forêt »/ a de beaux jours devant lui), des jeux de langage, genre comptine (p34 Loup y es-tu ? Qu’entends-tu ?/ Le hibou qui veille/ En son chêne /…), jouant parfois de l’aphorisme, ton badin ou grave, des historiettes plus ou moins légères et chantantes à la Prévert (p 23 Un beau chêne isolé / En lisière de forêt / Rêva un jour / Qu’il était un pin / Maritime / En bord / De falaise / Et se mit / Une nuit / D’ivresse / A pencher / grisé par le vent ; ou encore p34 Dans les forêts/ Il y a toujours un loup qui s’habille / - Je mets ma chemise / pour croquer les petites files / Je mets mes chaussettes /….) ou à la Desnos, aucun rapprochement n’est ici comparaison bien évidemment (p49 Sous la scie / L’arbre crie / Pleure / larmes de sciure / Larmes de sueur / […]) ; de simples descriptions poétiques et des métaphores  imagées (p51 […] / Deux vieux hêtres / à bout touchant // Le temps aidant / se frôlent se frottent / s’enlacent s’embrassent / et se soudent / pour le restant / de leurs jours.)

J’ai évoqué plus haut les senteurs d’amitiés, les fragrances de complicité qui émanent forcément d’une telle entreprise mais on l’aura compris, ce n’est pas la complicité rance dont parle Camus disant de je ne sais plus qui « Ils ne sont pas amis, ils sont complices ! », car dans cette entreprise rien n’est concédé : la qualité est partout à sa place. Comme dans une forêt chacun est libre de préférer une essence à une autre, plutôt chêne, hêtre, frêne ou boulot, mais ici nulle concurrence ou hiérarchie dans les frondaisons, tous sont beaux et nécessaires à l’ensemble Forêt, d’où le S entre parenthèses du titre, venant souligner la diversité des genres, formes, fonctions…, aucun arbre ne cache l’autre, si ce n’est peut-être pour l’ombrager ou l’accompagner…

Pour finir, si « Les arbres coupés / Donnent de temps en temps / De leurs nouvelles (p35) » je voudrais ici offrir et donner à entendre à cette belle équipe d’artistes, ce court poème, de Henri Michaux, dont j’ai oublié les références :

Debout un poteau à deux jambes donc un homme
près d’un autre qui n’en a qu’une
et ronde tout à fait : donc un arbre

Comme les arbres sont proches des hommes !
les hommes presque des arbres
à peu de choses près, comme tout est homme ! 




Generación de la amistad : poésie sahraouie contemporaine

Poétique, avant et malgré tout

Voici un objet éditorial singulier : une anthologie de poésie contemporaine sahraouie d’expression espagnole en édition bilingue, parue chez un éditeur lyonnais dédié aux littératures latines et ibériques. Que es aco ?

Poésie contemporaine : tout le monde connaît, c’est, comme pour tous les arts, soit dans sa définition la plus large, une poésie faite aujourd’hui, ou dans une définition plus étroite une poésie de style contemporain, non métrique, non versifiée, sans rimes, etc…

Sahraouie : on désigne ainsi les populations arabo berbères, jusqu’à il y a peu principalement pasteurs nomades, vivant dans un territoire saharien compris entre la Maroc, la Mauritanie et une toute petite part du grand sud algérien ; territoire jamais constitué en Etat nation mais toujours disputé, entres peuples et tribus arabo berbères d’abord puis à partir du XV° siècle par des incursions européennes, en particulier espagnoles et portugaises, et le royaume marocain au Nord, jusqu’à la longue domination espagnole de 1884 à 1975. Dans les derniers mois du régime franquiste, l’Espagne abandonne le Sahara dit espagnol ou Sahara occidental, sans organiser de referendum d’autodétermination et un conflit armé éclate entre indépendantistes sahraouis (appuyés par l’Algérie) d’un côté et Mauritanie et Maroc de l’autre. La Mauritanie abandonne très vite la partie et signe un accord séparé ; le conflit avec le Maroc s’enlise à partir de 1991 avec un cessez le feu qui installe un provisoire durable et la promesse, jamais tenu, d’un referendum.

Generación de la amistad : poésie sahraouie  contemporaine, anthologie bilingue proposée et présentée par Mick Gewinner ; traduction de Mick Gewinner avec le concours de… Lyon, Atelier du Tilde, 2016. Collection Lolita Valdès. ISBN 979-10-90127-34-0. 22€

Comme dans bien des situations de par le monde, c’est la colonisation et la décolonisation qui ont contribué à créer des identités nationales  au sens moderne, avec aspiration à un État indépendant, là où des peuples vivaient naturellement leur identité culturelle sans au-delà national, au sens étatique et moderne du terme. Les exemples en sont innombrables, notamment au Proche-Orient où furent constitués des États sur les décombres de l’empire ottoman, ou en Afrique où les découpages de frontières recoupent les divisions coloniales… nous en connaissons encore aujourd’hui les conséquences !

Après le statut quo de 1991 et le gel de la situation, environ 160 000 sahraouis se retrouvèrent à vivoter dans des camps de réfugiés gérés par la République Arabe Sahraouie Démocratique (RASD) en exil, créée par le POLISARIO (Front populaire de libération du …)

Grâce à des accords passés avec des pays l’ayant reconnue et la soutenant, la RASD envoya de nombreux enfants des camps étudier à l’étranger, dans des pays hispanophones principalement, en raison de la proximité avec la langue de l’ancien colonisateur,  et notamment à Cuba compte tenu de la politique internationale du castrisme. Il en fut ainsi pour plusieurs générations   d’enfant sahraouis (plusieurs milliers), partis très jeunes, coupés de leur famille, de leur culture saharienne, formés sous les tropiques puis, jeunes adultes, rentrant chez eux, dans les camps de la RASD, pour y être journalistes radio, infirmiers, médecins, instituteurs… le phénomène revêtit une telle importance qu’un nom leur fût même attribué : « les cubaraouis », surnom évident, et souvent moqueur envers ceux qui, quelquefois, se trouvaient même ne plus parler suffisamment correctement le hassinyia (arabe dialectal parlé dans cette région).

La situation s’étant enlisée depuis une trentaine d’année, beaucoup de ces « cubaraouis » on fait le choix d’émigrer, las de vivoter dans les camps, sans avenir, mais aussi en raison d’un décalage culturel, devenu douloureux, avec les codes traditionnels de leur société d’origine et que chacun peut aisément deviner et comprendre. Un certains nombre sont donc partis s’installer à l’étranger, principalement en Espagne, formant ainsi une sorte de diaspora sahraoui hispanophone unie par une histoire, une culture, une hybridation communes et un métissage culturel assumé.

Comme dans bien des cultures orales, et du désert en particulier, chez les sahraouis écouter et déclamer de la poésie est (était ?) une passion partagée. Tout naturellement un certain nombre de ces jeunes sahraouis cultivés, éduqués en espagnol, avec la sensibilité de leur culture d’origine se sont mis à écrire de la poésie : une poésie sahraoui d’expression espagnole.

Phénomène bien connu par ailleurs de migration, volontaire ou plus ou moins contrainte, d’une langue vers une autre, pour exprimer, non dans sa langue native, mais dans celle d’adoption, soit une littérature universelle (Samuel Becket, Gherasim Lucas…), ou bien une littérature et une poésie à la fois universelle et enracinée, africaine ou arabe maghrébine d’expression française par exemple (de Léopold Sedar Senghor à Kateb Yacine ou Kamel Daoud…).

Ce n’est pas le moindre mérite de cette anthologie que de porter à la connaissance du public francophone cette poésie-là, une poésie à la fois saharienne, latine et universelle, fruit d’une hybridation provoquée par l’histoire.

Mick Gewinner a réuni dans cette anthologie huit de ces poètes (7 hommes et une femme) de la même génération (tous nés dans les années 1970, entre 1962-1974 exactement) et résidants en Espagne. Ces poètes s’y sont liés, y ont développé des liens, des activités communes, politiques, culturelles et poétiques, au point de se donner, en 2005, un nom collectif « la Generación de la amistad » ; entre 2002 et 2016 ils y ont édité pas moins de 11 recueils collectifs et 11 recueils personnels.

Nous ne saurions trop ici les distinguer, si ce n’est pour indiquer que leur poésie aborde chez tous, mais dans des proportions variables ou avec des accents différents, des thèmes récurrents propres à leur situation comme la rencontre entre deux cultures, la vie à Cuba, ou bien dans les camps de réfugiés, la perte d’identité, le déracinement… mais au-delà on y trouve les universaux que sont l’émigration et l’exil, la solidarité, le difficile métier de vivre tout simplement, la construction de soi, les doutes, l’amour… Comme le dit l’un d’entre eux : « La poésie, c’est conter ce que sent ton cœur », on ne saurait mieux dire.

Une poésie orale donc, faite pour être dite, peut-être même cadencée, au sens où Mahmoud Darwich disait que « toute écriture est cadencée », lui qui, tout en écrivant une poésie résolument moderne, déclarait « aimer la musique en poésie » et être « imprégné des rythmes de la poésie arabe classique », ou disant encore « le moment clé pour moi est le rythme, c’est ce qui m’incite à écrire […]1 ». En lisant cette anthologie je ne pouvais m’empêcher de penser aussi à Senghor, non seulement pour le métissage culturel, mais pour la musicalité, sa revendication de la mélodie et du rythme générateur d’images.

 

Poésie métissée donc, hybride assumée, mais sans concession quant à la domination et, compte tenu de la situation politique qui est celle de ces poètes, porte-voix, de fait,  ou en tout cas perçus comme tels, même à leur corps défendant, me revenait avec insistance les propos très fermes du même Mahmoud Darwich déclarant « c’est un fait : je suis un palestinien, un poète palestinien, mais je n’accepte pas d’être défini uniquement comme un poète de la cause palestinienne, je refuse que l’on ne parle de ma poésie que dans ce contexte, comme si j’étais l’historien en vers de la Palestine. »  

On l’aura compris, ces poètes sont poètes, « a secas », tout simplement, sans qualificatif et ils ne sont en rien réductibles à leur cause et, comme pour Mahmoud Darwich, j’ai cru ressentir dans leur fluidité à être dit en espagnol, le même amour de la musicalité ou, comme aurait dit Senghor « le plaisir du cœur et de l’oreille.»

Leopold Sedar Senghor parle de son royaume d'enfance.

Ils ont quelquefois le rythme, la brièveté, la concision d’une copla populaire, quelquefois la solennité d’un extrait d’épopée, ou la cadence d’une longue phrase devant très certainement être balancée, rythmée, sur le mode de certaines poésies arabes ( ?) mais ils ont toujours des images suggestives, inattendues, splendides  de simplicité, des images qui suscitent l’émotion et invitent à une éloquence retenue si l’on ose cet oxymore.

Donnons-en, de manière complètement subjective, quelques exemples :

De Mohamed Abdelfatah Ebnu

[…] En esta edad
De hambruas y guerras
En esta era
En que a nadie
Se le ocurre pedir
Una palanca para mover el mundo.

La espera

La luna parpadea
Entre la ruinas de barro.
Y la luz escribe su nombre
Sobre las jaimas.
Un hombre cumple
Sus oraciones nocturnas
Mientras
Una mujer se desnuda
En la intimidad de las tinieblas
Y espera que nazca el amor

Pasión eterna

Un cuerpo
Marcado por el tiempo.
Maduro,
Deseando ser devorado,
Se consuma febril en la plenitud
De los días que trastocaron la brevedad del infinito.

 […] En ce temps
De famines et de guerres
En ce temps
Où personne
ne songe à réclamer
Un levier pour soulever le monde.

Elle attend [L’Attente]

La lune palpite
Parmi les ruines d’argile.
Et la lumière inscrit son nom
Sur les toiles des tentes.
Un homme accomplit
ses prières du soir
pendant ce temps
une femme se déshabille
dans l’intimité des ténèbres,
elle attend qu’y naisse l’amour.

Passion éternelle

Un corps
Marqué par le temps,
Mûr,
Désireux de se laisser dévorer,
Se consume fiévreux dans la plénitude
Des jours qui détraquèrent la brièveté de l’infini.

Poème dédié au peuple du Sahara : les poètes sahraouis.

De Ali Salem Iselmu

Sueños

De una almohada surge un sueño.
De una idea nace une hecho.
De una mujer brota el amor.
De un abrazo nace un recuerdo.
De ti, tierra verde y hermosa, nace la vida.

Rêves

D’un oreiller surgit un rêve.
D’une idée nait une œuvre
D’une femme jaillit l’amour
D’une étreinte nait un souvenir
De toi, terre de verdoyante beauté, naît la vie.

De Bahia Awah

un poema eres tú

 una mujer entre rejas
gritó :
¿Qué es un poema?

Y un poeta desde su exilio
Le respondió :
Eres tú
Nosotros, la fuerza,
La razón
De un verso y buen poema.

Le poème c’est toi

Une femme
Derrière les barreaux cria :
« Un poème c’est quoi ?

Un poète alors du lointain de son exil [et un poète, depuis son exil ?] Lui répondit :
Le poème c’est toi.
C’est nous, la force,
La raison d’un vers et d’un poème.

Les vers de Bahia Mahmud Awah ; journée de Poésie en Résistance consacrée à la RASD.

Nous ne pouvons toutefois clore cette présentation très positive sans une note critique sur les traductions qui, peut-être  en raison de la diversité des concours dont s’est entourée l’auteure, ne paraissent pas avoir eu de partis pris communs pour tous les poètes: quelquefois sur traduits, quelquefois sous traduits, quelquefois en rompant trop le rythme de l’original, quelquefois au plus près du texte (et fort justement) d’autres fois s’en éloignant trop, sans pour autant trouver une nouvelle musicalité propre à la langue d’accueil : le français.

J’en donnerais ici, de manière lapidaire, quelques exemples pour alimenter le réflexion :

Question de rythme :

- « alegraos que nos visita Bubisher [un oiseau] / Viene con sur piquito rebosante de cuentos/ y sus alas esparciendo historias »

« Réjouissez-vous ! Bubisher nous rend visite/ avec son petit bec débordant de contes/et ses ailes pour répandre les récits »

Pourquoi pas : « Réjouissez-vous de la visite de Bubisher,/son petit bec débordant de contes/ et ses ailes semant des histoires »

- « somos el mañana de un suspiro que nos impone /su prolongación hasta el infinito » : « Nous sommes le lendemain d’un soupir impératif/qui veut qu’on le prolonge à l’infini ». Pourquoi pas simplement « nous sommes le lendemain d’un soupir nous imposant/ son prolongement (jusqu’à l’) infini »

- « El alma es una bascula / donde se mece el tiempo »

« L’âme est une balance/le temps s’y berce » : pourquoi pas, au plus près de l’original et de son rythme « L’âme est une balance / où se berce le temps »

Question justesse de l’image :

- « Y la mar, ésta, / nuestra, con sus cuajadas espumas »

« Et cette mer, / la nôtre avec ses écumes figées » écumes laiteuses plutôt, ce qui renvoie mieux à l’idée triviale  de cuajada (un fromage blanc) mot qui lui même renvoie en espagnol à la blancheur de l’écume et non à l’immobilité.

- « contra las muelas abrasivas del tiempo / contre les terribles dents du temps » : j’aurais préféré « contre les molaires abrasives du temps » qui colle plus à l’original tant métriquement que pour le sens, « molaire abrasives » rend mieux le frisson sonore des grosses dents arrachant par frottement…

Sur traduit :

- pourquoi rendre le tout simple « mi madre me dijo » soit « Ma mère m’a dit » par « ma mère a proféré » ?

Sous traduit :

- « y nuestra infancia naufrago / en la turbulenta marejada del éxodo »

« et notre enfance fit naufrage dans les vagues tumultueuses de l’exode » les vagues (las olas) est moins fort que l’image originale employée en espagnol marejada, la houle, donc « la houle turbulente de l’exode »….

C’est quelquefois en restant au plus près du texte qu’on est le plus fidèle, non seulement à la lettre, mais aussi à la musicalité mais, ces remarques posées,  chacun le sait, traduire la poésie est, si ce n’est une gageure, du moins une belle prise de risque, ces quelques observations critiques ne remettent pas en cause l’excellence et la justesse de ce travail : nous faire découvrir et nous donner une idée, une approche, la plus fidèle possible, d’une poésie inconnue en France. Pari réussi pour une anthologie qui mériterait de trouver un public le plus large… même et jusque dans l’enseignement : ces (petits) poèmes arabes d’expression hispanophone pourraient s’avérer très utiles auprès des élèves des classes de langue en lycée par exemple.

Generación de la amistad : poésie sahraouie  contemporaine, anthologie bilingue proposée et présentée par Mick Gewinner ; traduction de Mick Gewinner avec le concours de… Lyon, Atelier du Tilde, 2016. Collection Lolita Valdès. ISBN 979-10-90127-34-0. 22€

Ouvrage comportant une courte biographie de chaque poète, un glossaire Hassanya/Français et espagnol caribéen/Français, ainsi qu’une bibliographie chronologique et adresses de sites internet spécialisés (espagnol, anglais et français).

Un travail remarquable !

 




Platero y yo : élégie andalouse pour narrateur et guitare, Juan Ramón Jiménez

Voici, la première édition intégrale, et en plus bilingue espagnol/français, et en livre audio de « Platero y yo : elegia andaluza para narrador y guitarra » ; Enfin pourrait-on dire, pour une œuvre singulière, d’une forme peu courante; œuvre musicale elle même réalisée à partir de l’œuvre littéraire éponyme « Platero y yo » de Juan Ramón Jiménez ; entreprise méditerranéenne s’il en est : poète andalou, compositeur italien, interprètes vivants en Roussillon, éditeur situé en Provence…

Nous présenterons brièvement ici l’auteur de l’œuvre première, puis l’œuvre poétique elle-même, le compositeur ayant réalisé, à partir d’elle, l’œuvre commune, objet de la présente édition et nous terminerons par la genèse de cette édition et une brève description matérielle de l’objet livre-CD lui-même.

Juan Ramón Jiménez, (1881-1958) est un poète espagnol d’inspiration symboliste, contemporain de Federico Garcia Lorca (1898-1936) et Antonio Machado (1875-1939) ; ils se connaissaient et s’appréciaient : Machado a d’ailleurs écrit quatre poèmes dédiés à Juan Ramón Jiménez dont un spécialement dédicacé à l’auteur de Platero. Juan Ramón Jiménez a reçu le prix Nobel en 1956, deux ans avant sa mort et a laissé une œuvre immense.

Platero · Clément Riot, Miguel-Angel Romero, Varius Artists - Topic.

Ce poète a développé l’idée de « poésie pure », une poésie habitée par un idéal supérieur de beauté et détachée de tout contenu idéologique, politique ou social… du moins explicitement. Jiménez se veut avant tout un poète du raffinement et de la nuance, et ses compositions sont souvent dotées d’une large dimension musicale. Poète non militant certes, mais néanmoins fidèle à ses idéaux humanistes et à la République,  à la fin de la guerre civile, en 1939, il doit, comme beaucoup, s’exiler ; il vivra aux USA, puis à Puerto Rico où il mourut en 1958.

Moins connu que Federico Garcia Lorca ou Antonio Machado, certainement parce que moins visible politiquement, mais aussi, très probablement, parce qu’il n’eut pas leur fin tragique et ne bénéficia donc jamais, comme eux, d’une place de choix au panthéon de l’Exil. Pourtant, certes homme discret, il est toujours resté fidèle à ses convictions : des témoignages rapportent que, par exemple, lors de son exil aux USA, en pleine période de ségrégation, lui et sa femme refusèrent toujours d’occuper les places réservées aux blancs dans les lieux et transports publics ; par ailleurs, sa poésie, quoique discrètement, fait souvent l’éloge de la liberté et nous donnerons un exemple plus loin.

« Platero y yo : elegia andaluza para narrador y guitarra – Platero et moi : élégie andalouse pour narrateur et guitare »

L’œuvre comprend 138 courts chapitres, autant de petits poèmes en prose. Une première édition partielle, 63 chapitres, est publiée à Madrid en 1914, dans une édition pour la jeunesse. L’édition intégrale sort en 1917. Platero connut aussitôt un immense succès, devint livre de lecture scolaire dès 1920 et représente depuis lors un classique et l’un des livres les plus lus, non seulement en Espagne même, mais aussi dans toute l’Amérique latine où il a bénéficié d’une multitude d’éditions, la plupart bon marché, modestes et populaires. Il est ainsi devenu un modèle de langue et représente pour l’aire hispanique, ce que Pinocchio ou Le Petit Prince représentent pour les Italiens ou les Français : une œuvre d’auteur touchant au mythe, de celles dont on oublie le nom de l’auteur.

Le contenu : « Platero et moi » est sous-titré Élégie andalouse

L’élégie est une poésie lyrique, de longueur et de forme variables, mais caractérisée par un ton plaintif particulièrement adapté à l’évocation d’un mort ou à l’expression d’une souffrance due à un abandon ou à une absence. Ici, l’élégie décrit la vie et la mort de l’âne Platero, compagnon disparu de l’auteur, et c’est en même temps le prétexte à la description poétique de la vie andalouse, de sa nature, des saisons et des personnages. Platero est aussi un symbole : l’âne andalou, méditerranéen, et au-delà, l’animal domestique universel, à la fois outil de travail, moyen de transport, compagnon, ami et confident : synthèse, symbole et archétype de l’âne !

Platero · Clément Riot, Miguel-Angel Romero. Provided to YouTube by Believe SAS.

La forme

Un récit, donc en prose, mais poétique, une sorte de transition entre le roman et le poème ; suite de brefs chapitres, pas plus longs qu’un poème en prose, à la fois autonomes et liés entre eux car, s’il n’y a pas de continuité entre deux chapitres, le tout forme assurément un ensemble cohérent et unitaire. Le récit poétique ne raconte pas une histoire, le déroulement d’une vie, mais seulement une suite d’instants privilégiés, heureux ou malheureux, où trois éléments sont primordiaux :

Le personnage, souvent exprimé à la première personne : le narrateur, ici le poète. L’espace, ici la campagne, une société rurale et particulièrement le lieu de l’action : Moguer (Andalousie, province de Huelva), village de l’auteur. Et enfin le temps : dans ce lieu, à la fois typique et banal, les mois et les saisons suivent leur cours, non datés, comme les mois d’une année quelconque ou de n’importe quelle année. Ce n’est pas le temps de l’Histoire, c’est un temps atemporel, mythique, qui découpe la réalité en une suite discontinue faite de moments choisis où les éléments de la nature – animaux, végétaux, minéraux – sont fréquemment humanisés.

Ce livre mérite donc, – comme Le Petit Prince – plusieurs niveaux de lecture ; apparemment basé sur de simples souvenirs, des anecdotes du quotidien, Platero délivre aussi en réalité une leçon de vie : la campagne, le paysage sentent, bougent, varient, changent de couleur ; la vie n’est pas seulement héroïsme mais aussi quelque chose de plus intime, tendre et chaleureux.

Livre pour la jeunesse donc, mais, comme le Petit Prince, lu aussi – voire autant ou plus – par des adultes, c’est à ce titre que l’âne Platero, comme tout personnage mythique, a suscité, à son tour des recréations, des adaptations, des transpositions à d’autres arts (musique, cinéma, sculpture…). Citons : en 1974 un Platero y yo du compositeur espagnol Cristobal Halffter pour chœur, voix solistes et récitant ; en 1964 un film du réalisateur espagnol Alfredo Castellón (loin d’être inoubliable il est vrai, comme l’essentiel de la production cinématographique espagnole de cette époque, pour des raisons évidentes liées au franquisme triomphant de ces années-là) ; ou encore en 1960 le « Platero y yo : élégie andalouse pour narrateur et guitare », opus 190 du compositeur italien Mario Castelnuovo-Tedesco, dont il est question ici.

Le compositeur, Mario Castelnuovo-Tedesco (1895-1968) est, comme Juan Ramón Jiménez un artiste de l’exil : il dut fuir en 1939 l’Italie fasciste après les mesures antisémites de Mussolini. Réfugié aux USA il y passa le reste de sa vie. Compositeur de tendance impressionniste et néoromantique très prolifique, Mario Castelnuovo-Tedesco a écrit pour tous les genres et ses sources d’inspiration sont souvent littéraires ; il a ainsi écrit beaucoup de “musiques à programme” pour le théâtre, l’opéra, le ballet, les marionnettes, le cinéma (48 Films entre 1941 et 1958, films d’aventures ou films fantastiques comme « le retour du vampire » ou « Dr Jekyll et M Hyde » en 1941) …, des mélodies sur, ou des compositions d’après, des textes poétiques ou narratifs (Shakespeare, Machiavel, Musset, Oscar Wilde, Dante…) ; ses très nombreuses pièces pour piano ou guitare – ses instruments de prédilection – sont souvent conçues comme des poèmes symphoniques en miniature. C’est tout naturellement qu’il s’intéressa à Platero y yo, cette œuvre d’auteur touchant au mythe.

Juan Ramon Jiménez, Platero et moi, élégie andalouse, présenté et traduit par Clément Riot, editions Oui'Dire

Parmi les 138 courts tableaux du livre, il en choisit 28 – les indispensables, comme le début et la fin, ainsi que les plus beaux ou ses préférés en tout cas…pour en faire une œuvre nouvelle, à part entière, où musique et texte s’harmonisent parfaitement, vont main dans la main, comme pour une mélodie, une chanson, un opéra, sauf qu’ici la voix est parlée, parlée mais calée précisément sur la musique comme en atteste la partition (éditions Perben), laissant toutefois une certaine marge d’interprétation aux interprètes.

Insistons clairement : il ne s’agit pas d’une ‘lecture musicale’ comme il y en a tant (texte dit sur une nappe sonore ou un habillage musical décoratif et non spécifique), la musique n’est pas ici un fond sonore utilisé pour la circonstance, mais une œuvre à part entière et spécifiquement écrite en soutien, complément et harmonie avec le texte ; elle s’inscrit dans le genre, assez rare en musique classique, d’œuvre pour « voix parlée et instrument ou ensemble instrumental » : citons l’emblématique « Pierre et le Loup » ou, moins connu, « Histoire du Soldat » d’Igor Stravinsky sur un conte de Charles Ferdinand Ramuz. Pour cette édition intégrale audio et texte couplés, une nouvelle traduction française s’imposa d’emblée, afin que le discours musical de la guitare épouse aussi étroitement et aussi naturellement que dans l’orignal espagnol, le texte narratif français.

Papillons blancs · Clément Riot, Miguel-Angel Romero. Provided to YouTube by Believe SAS.

Genèse du projet

En 2009 Oui’Dire éditions a publié le premier enregistrement intégral en langue originale et en français : 2 doubles CD qui reçurent un bel accueil de la critique (Guitare classique, l’Humanité, Les langues néo latines…). D’où le projet, dix ans plus tard, de clore l’aventure en réalisant un outil complet qui puisse servir, modestement, hors études universitaires bien sûr, d’ouvrage de référence pour…Pour qui d’ailleurs ? Comme le dirait le poète s’adressant à son ami Platero – « pour qui écrivent les poètes? » – répondons simplement pour : les amateurs de poésie, pour les francophones voulant découvrir cette œuvre espagnole et universelle, les hispanophones voulant, à travers cette œuvre connue d’eux, se familiariser avec le français, les musiciens et mélomanes voulant découvrir un genre assez peu connu et pratiqué dans son exigence précise de composition pour voix parlée et instrument.

Comme les Moineaux du chapitre XVII, nous ne saurions trop recommander à « nos frère, nos tendres frères » humains… de se mettre en état de poésie, « Contents, sans fastidieuses obligations, sans ces Olympes ni ces enfers qui mettent en extase ou qui tourmentent les pauvres hommes esclaves »… de se promener, comme nous l’avons fait, en toute liberté dans cette œuvre, de s’y « baigner partout, à tout moment ».

Cette union étroite de poésie et de musique, retrouvera alors, dans toute sa variété, sa vie propre, sa musicalité unique : lecture collective ou individuelle, à voix haute ou en voix intérieure : sans oublier les leçons de vie que l’âne Platero délivre à tout un chacun selon le niveau de lecture choisie : la vie n’est pas seulement héroïsme mais aussi quelque chose de plus intime, tendre et chaleureux.

Parmi les 28 chapitres de l’œuvre, commentons-en ici trois :

Platero

Juegos del Anochecer · Clément Riot, Miguel-Angel Romero. Provided to YouTube by Believe SAS.

Incontournable, c’est le premier, la présentation de l’âne ; pour entendre les correspondances musique/texte : d’abord l’espagnol, puis le Français. L’âne est Humanisé (Miroirs de jais : yeux miroirs de l’âme, noirs, vitreux, brillants) et présenté comme à la fois fragile et résistant : au début comme une peluche, doux, moelleux, sans squelette,… puis Acier (dur, solide, résistant) et enfin Argent de lune (pierre de lune, bijou délicat,…).

Gorriones/Les moineaux

Nous sommes le 25 juillet (fête de Santiago, le patron de l’Espagne). Ce poème en prose, d’apparence anecdotique, est en fait un hymne à la liberté : d’entrée le poète revendique discrètement son agnosticisme « Tout le monde est allé à la messe. Nous sommes restés dans le jardin des moineaux, Platero et moi » puis termine, décrivant les moineaux, par une ode à la libre liberté « […] Contents, sans fastidieuses obligations, sans ces Olympes ni ces enfers qui mettent en extase ou qui tourmentent les pauvres hommes esclaves, sans autre morale que la leur, sans autre Dieu que l’azur, ce sont mes frères, mes tendres frères. Ils voyagent sans argent et sans bagages, changent de maison quand ça leur chante ; ils devinent un ruisseau, pressentent une frondaison, et ils n’ont qu’à ouvrir leurs ailes pour atteindre le bonheur. Pour eux, point de lundi ni de samedi ; ils se baignent partout, à tout moment ; ils aiment l’amour sans nom, l’amour universel. Et le dimanche, quand les humains – les pauvres humains ! – s’en vont à la messe, verrouillant leurs portes, eux, en un exemple joyeux d’amour sans rite, s’abattent aussitôt, en un brouhaha frais et jovial, sur le jardin des maisons verrouillées, dans lesquelles quelque poète – vieille connaissance déjà – et quelque ânon tendre – tu te joins à moi ? – les contemplent fraternellement. »

On comparera aux « Oiseaux de passage », le poème tiré du recueil de Jean Richepin, « la chanson des gueux » (1876), rendu célèbre bien plus tard, en 1969, par Georges Brassens. Les thématiques, voire les images, sont si ce n’est identiques, du moins très proches et il n’est pas absurde de penser que JR Jiménez, francophone et francophile, eut connaissance de ce poème et s’en inspira ? C’est une hypothèse.

Amistad/Amitié 

Ici nous retrouvons tout le talent de Juan Ramón Jiménez qui, sous l’apparence d’une description factuelle, anecdotique, avec des mots simples et sans abstraction, idéalisation ou théorisation aucune, nous décrit magistralement la puissance de l’amitié, ses caractéristiques et ses composantes : la confiance (il s’endort sur son dos) ; la liberté, toujours de règle entre amis qui ne s’imposent rien (« je le laisse aller à sa guise et lui… m’amène toujours où je veux») ; la solidarité, la compassion (« je descends pour le soulager… » ; la tendresse, l’amour (« Je l’embrasse, le taquine… ») ; la complicité, l’affinité (le fameux ‘qui se ressemble s’assemble’ : « il rêve mes propres rêves »).

 

« Platero et moi : Platero y yo, élégie andalouse pour narrateur et guitare » de Juan Ramón Jiménez et Mario Castelnuovo-Tedesco. Un livre audio bilingue présenté et traduit par Clément Riot, suivi de « Un personnage littéraire nommé Platero » par Jacques Issorel et de « la poésie de Juan Ramón Jiménez et la musique de M Castelnuovo-Tedesco main dans la main » par Alicia Diaz de la Fuente, une biographie du poète et du compositeur, une biblio-discographie (138p) et un CD Mp3 (246mn) narration en français et espagnol Clément Riot, guitare M A Romero. Ouï-dire éditions, ODL 928.

Présentation de l’auteur

Juan Ramón Jiménez

Juan Ramón Jiménez, est né à Moguer, en Andalousie, le 23 ou et mort le à San Juan, à Porto Rico, est un poète espagnol de la génération de 14.

Opposant au régime franquiste, il s'enfuit à Porto Rico en 1939. Il y reçut le prix Nobel de littérature en 1956 alors qu'il vivait en exil avec d'autres figures marquantes de la Péninsule, telles que Pablo Casals et Francisco Ayala.

Il a notamment développé l'idée de « poésie pure », qui recherche à atteindre à un idéal supérieur de beauté détachée de toute idéologique, politique ou social. Jiménez développe de nouvelles recherches esthétiques et rythmiques dans l'expression d'un lyrisme mélancolique. Ses compositions sont par ailleurs dotées d'une grande dimension musicale.

Son récit poétique le plus célèbre est Platero y yo, sous-titré Elégie andalouse et dont l'édition intégrale parut en 1917. 

Espaces, trad. de Gilbert Azam, Paris, Éditions José Corti, 90 p., 1989,  (ISBN 978-2-7143-0270-0)

Pierre et Ciel, trad. de Bernard Sesé, Paris, Éditions José Corti, 287 p., 1990,  (ISBN 978-2-7143-0401-8)

Fleuves qui s'en vont, trad. de Claude Couffon, Paris, Éditions José Corti, 109 p., 1990,  (ISBN 978-2-7143-0402-5)

Sonnets spirituels [« Sonetos espirituales »], Paris, Paris, Éditions Aubier-Montaigne, 1992, 189 p. (ISBN 978-2-7007-1415-9)

Poésie en vers, trad. de Bernard Sesé, Paris, Éditions José Corti, 220 p., 2002,  (ISBN 978-2-7143-0795-8)

Beauté, [« Belleza »], trad. de Bernard Sesé, Paris, Éditions José Corti, 214 p., 2005,  (ISBN 978-2-7143-0895-5)

Journal d'un poète jeune marié, traduit et préfacé par Victor Martinez, Toulon, Éditions de la Nerthe, 2008, 296 p., (ISBN 978-2-916862-13-2)

Juan Ramón Jiménez (auteur) et Claude Couffon (traducteur), Platero et moi [« Platero y yo »], Paris, Éditions Seghers, 2009, 294 p.(ISBN 978-2-232-12306-1)

 

Poèmes choisis

Autres lectures