1

Avec Casandra Lopez, explorer la justice raciale et sociale à voix haute par le biais de la littérature

 

Première partie

 

Casandra Lopez est d’origine Chuilla, Tongva, Luiseño (Payómkawichum) et Chicana.  Toute jeune auteure elle n’en dirige pas moins le magazine As Us qu’elle présente comme un espace ouvert aux poètes du monde entier. Elle a obtenu des bourses (CantoMundo and Jackstraw ) pour poursuivre ses études en écriture créative, elle a obtenu des résidences à l’institut des arts Indiens à Santa Fe, à l’école des hautes recherches, ainsi qu’à Hedgebrook à Seattle. Elle apparait, aux yeux de qui la découvre, en tant que poète et militante. Luttant contre le racisme et l’injustice sociale elle témoigne de ce que le système américain continue de faire subir aux minorités Indiennes. Elle écrit depuis sa propre expérience, celle de sa communauté, et celle de sa famille non pour se faire plaindre et se lamenter mais pour en tirer ce qu’il y a d’universel et de pleinement humain, afin d’éveiller les consciences, afin que le cynisme ou l’indifférence, ou encore l’ignorance, ne gagnent sur les sentiments et les valeurs destinés à permettre aux humains de se respecter, de vivre harmonieusement dans le monde. En tant que militante elle participe à des colloques et conférences comme celle-ci dont le titre annonçait: “Reflecting on Race and Racism through Spoken Word, Story, and Conversation.” (réfléchir au sujet de la race et au racisme au travers de la parole, l’histoire et la conversation.)

Sa plaquette de poèmes intitulé Where Bullet Breaks (où la balle pénètre) lui a valu le prix Sequoyah et a été publié par le Sequoyah National Research Center, ensuite et dans le même esprit est sorti un second ouvrage, After Bullet , publié par Yellow Chair Press.  Dans un entretien elle avoue : « j’écris parce que mon esprit refuse de se calmer … j’écris parce que je suis témoin …. J’écris parce que la poésie m’a sauvée. »

Mais inutile de commenter, voici ce que Casandra écrit dans Mudcity, le magazine littéraire de l’institut des arts amérindiens de Santa Fe :

Untitled/Naming  

I

            For most of my life my birth name was someone else’s coat–too tight around the middle and long in the sleeves. First name sat itchy around my neck. Fancy dinner clothes of little use to me. But its scent has the tinge of the familiar that licks at my skin. First name almost didn’t belong to me. But Little Grandma intercedes. Argued for a name more substantial than five letters. A name to wear out in public, perhaps in an office or school. A name that can forget the hot steam of fields and factories. 

              Pendant la plus grande partie de ma vie mon nom de naissance fut le manteau de quelqu’un d’autre–trop serré aux coudes et les manches trop longues. Mon prénom me démangeait le cou. Des tenues habillées pour sortir diner dont je n’avais pas l’usage. Mais leur senteur est teintée du familier qui lèche ma peau. Mon prénom ne m’appartenait pratiquement pas. Mais Petite Grandmère s’en mêle. Elle plaida pour un nom plus substantiel que d’un de cinq lettres. Un nom à porter en public, dans un bureau peut-être ou à l’école. Un nom qui soit en mesure d’oublier la chaude vapeur des champs et des usines.

II

            Mother tells me when she goes to school she gets to pick her own English name. She picks one easy to spell. One with tall letters. No one at home calls her by her paper name anyway. At home she is baby, a sweet darling named in Spanish even though she once pushed her younger brother into a ditch. He lay there, bleeding, knocked unconscious. She left him there, sure he was dead but more afraid of her father. She is deadly, but still, she keeps her little name. 

            Mère me dit que lorsqu’elle va à l’école elle choisit son propre nom Anglais. Un facile à épeler. Avec de grandes lettres. Malgré tout personne à la maison ne l’appelle par son nom inscrit sur le papier. A la maison elle est bébé, une gentille petite chérie au nom Espagnol  bien qu’elle ait poussé son jeune frère dans le fossé. Il est allongé là, il saigne, inconscient. Elle l’a laissé là, certaine qu’il était mort, mais plus effrayée encore par son père. C’est une meurtrière mais pourtant, elle garde son petit nom.

III

            Brother is of a common name. Another baby boy with the same name is born on the same night and at the same hospital with almost the exact same parent names. Social security number is off by one number. Their records will often be confused at the hospital and DMV. Later when Mother is recovering from Brother’s she asks the nurse, “Are you sure this is my son?”  He is not what she had been expecting. After Brother dies she is left with a different unexpectedness–life without her youngest child. She must learn what it means to mother a dead son. She must learn the rhythm of grief. This is love’s twin.

            This essay wasn’t going to be about Brother, but here he is, making an entrance.

            Frère porte un nom courant. Un autre garçon du même nom est né la même nuit dans le même hôpital de parents ayant presque exactement le même nom. Le numéro de sécurité social est identique à un chiffre prêt.  Leurs états civils seront souvent confondus à l’hôpital comme au service des permis de conduire. Plus tard quand Mère récupère de la naissance de Frère elle demande à l’infirmière : « êtes-vous sûre que ce soit mon fils ? » Il n’est pas ce qu’elle attendait. Après que Frère soit mort il lui reste une autre forme d’inattendu –une vie sans son plus jeune enfant. Elle doit apprendre ce que cela signifie de materner un fils mort. Elle doit apprendre le rythme du chagrin. C’est de l’amour jumeau.

            Cet essai ne devait pas prendre pour thème Frère, mais le voici, il fait son entrée.

IV

            In my family we have lots of names. I learn that to be loved is to be named and renamed. We juggle a dance of vowels on the tongue. Sometimes names fall like staircases and other times they jigsaw across the family tree. I want to catch them all in my mouth. Make myself good and full of their voices.

             Dans ma famille nous avons de nombreux noms. J’ai appris qu’être aimé c’était être nommé et renommé. Nous jonglons une danse de voyelles sur la langue. Parfois les noms tombent comme des cages d’escalier et d’autres fois ils scient-sautent dans l’arbre généalogique. Je veux tous les attraper dans ma bouche. Me rendre bonne et pleine de leurs voix.

V

             While I am being questioned at the police station after Brother is shot the detective brings me a police record of another man with Brother’s name and asks me, “Is this your brother?” I catch a glimpse of a man who is not Brother. I regret saying, “no” so quickly because I want to examine the paper more closely. I want to study his face, study a name that is Brother’s but belongs to a man that is not Brother. Is this the same man Brother was always being confused with? I want all this to be a mistake. 

             Tandis que je suis interrogée au poste de police après qu’on ait tiré sur Frère le détective m’apporte le dossier d’un autre homme portant le nom de Frère et me demande: “est-ce votre frère?” Je jette un œil à cet homme qui n’est pas Frère. Je regrette d’avoir à dire non si rapidement parce que je veux examiner la feuille plus attentivement. Je veux examiner son visage, le nom qui n’est pas celui de Frère appartenant à un homme qui n’est pas Frère. Est-ce le même homme avec qui Frère a toujours été confondu. Je veux que tout ceci soit une erreur.

VI

             My last name comes from Father. Yes, Indians have Spanish names. Some say this assimilation is God’s mercy. This is another way not to say colonization. A way to hush out the word genocide. I can’t even begin comprehend what was taken, what was renamed. At Indian school Grandmother is taught to churn butter she is never allowed to taste. She learns to write her name in beautiful cursive. There is not much left of that school except the remnants of a cemetery.

            We used to be believers. Then Brother is killed and we try to learn to live another way. We try to learn how to cleanse Brother’s body, to repair the damage in all of us. At first all of this feels unpracticed. It is work to try to understand the wholeness of our loss. 

             Mon nom de famille me vient de Père. Oui les Indiens ont des noms espagnols. Certains disent que cette assimilation est la grâce de Dieu. C’est une autre façon de dire colonisation. Une manière de rejeter le mot génocide. Je ne peux même pas commencer à comprendre ce qui fut pris, ce qui fut renommé. A l’école Indienne on enseigne à grand-mère comment barater le beurre auquel il lui est interdit de goûter. Elle apprend à écrire son nom en belles lettres cursives. Il ne reste pas grand-chose de cette école sauf les ruines d’un cimetière.

              Nous étions croyants. Puis Frère est tué et nous essayons d’apprendre à vivre différemment. Nous essayons d’apprendre comment purifier le corps de Frère, de réparer les dommages en chacun de nous. D’abord tout cela semble manquer de pratique. C’est du travail d’essayer de comprendre la totalité de notre perte.

VII

            After Brother is shot multiple times and taken to the hospital he is renamed John Doe. This is temporary protection from other potential bullets, from the unknown. But this name will not protect us from what damage has already been done by Bullet. We say goodbye to Brother at the hospital. John Doe can stay at the hospital but I will take Brother’s name with me.

            Bullet renames me something that howls, something that is split of lip and bruised knuckle.

             Brother’s name seems more like a song now more than ever. Someone fills out the paperwork with Brother’s name. Death certificate. Obituary. Autopsy. Police reports. Memorial service. Someone must pay. I sometimes wonder if Brother is paying for a sin we may never know. In the end it is us, the left behind, who keep Brother’s name alive who pay.

            Après qu’on ait tiré sur Frère de nombreuses fois, il est conduit à l’hôpital où il est renommé John Doe. C’est une protection temporaire contre d’éventuelles autres balles potentielles, contre l’inconnu. Mais ce nom ne nous protègera pas des dégâts que Balle a déjà causés. Nous disons au-revoir à Frère à l’hôpital. John Doe peut rester à l’hôpital mais j’emmènerai le nom de Frère avec moi.

          Balle me renomme en quelque chose qui hurle, quelque chose qui est éclat de lèvre et jointure contusionnée.

             Plus que jamais le nom de Frère ressemble à une chanson maintenant. Quelqu’un remplit les formulaires  administratifs au nom de Frère. Certificat de décès. Rubrique nécrologique. Autopsie. Rapports de police.  Messe commémorative. Quelqu’un doit payer. Je me demande parfois si Frère paie pour un pêché que nous pourrions ne jamais connaitre. A la fin c’est nous qui payons, les survivants, qui gardons vivant le nom de Frère.

VIII

            I like it best when Spanish speakers say my name. The “ahhs” of my name lift up higher to the roof of the mouth and the tongue flattens there, tongue behind teeth that stamp the next letters out more elegantly than when my name is said in English. Hearing my name in Spanish makes feel taller and reminds me of the way Grandmother says my name.

            Je préfère quand les hispanophones disent mon nom. Les “ahhs” de mon nom s’élèvent plus haut jusqu’au palais de la bouche  et la langue s’aplatit là, langue derrière les dents qui tamponnent les dernières lettres plus élégamment que lorsque que mon nom est dit en Anglais. Entendre mon nom en Anglais me fait me sentir plus grande et me rappelle comment Grand-mère dit mon nom.

IX

            Sometimes Grandmother’s sister doesn’t remember her married name. Some names do not come easily anymore. They are just out of touch of her lips. I wonder where those names went. I wonder about all of the lost names.

            On Father’s side of the family there is an abundance of twins. This is good fortune. We say their names quick together. Link one to the other. Brother and I were not twins but I feel halved without him. What name can I give to my phantom twin except Brother? 

            Parfois la sœur de Grand-mère ne se souvient pas de son nom de femme mariée. Parfois les noms ne lui viennent plus facilement. Ils sont simplement hors de portée de ses lèvres. Je me demande où ces noms sont allés. Je m’interroge à propos de tous ces noms perdus.

            Du côté paternel de la famille il y a une abondance de jumeaux. C’est un signe de chance. Nous disons leur noms rapidement ensemble. Lions l’un à l’autre. Frère et moi n’étions pas jumeaux mais je me sens coupée en deux sans lui. Quel nom puis-je donner à mon fantôme jumeau sinon Frère?

X

            Years before Brother’s death he owned a tow company. It was a small family business he named after himself. Our whole family takes a dislike to a larger tow company after they give him problems. We create a family game that involves pretending to spit when we come across a tow truck with their name.

            There are some names I will not even spit on. I want them to have none of me. Not my name, not my forgiveness. Because even when you don’t the pull the trigger, Bullet still knows your name.  

            Des années avant la mort de Frère il avait une compagnie de remorquage. C’était une petite affaire familiale à laquelle il avait donné son nom. Toute notre famille pris en grippe une autre plus grande compagnie après qu’ils lui aient créé des problèmes. Nous créons un jeu propre à la  famille qui consiste à faire semblant de cracher quand nous tombons sur une dépanneuse à leur nom.

            Il y a des noms sur lesquels je ne cracherai jamais. Je veux qu’ils n’aient rien de moi. Pas mon nom, pas mon pardon. Parce que même quand vous n’appuyez  pas sur la gâchette, Balle sait encore votre nom. 

XI

            To request Brother’s police report I need the name of the detective assigned his case. I remember only the grey suit. The brown of his eyes. I search the internet for clues and find the newspaper reports. They are a few lines each.

            On that night, Brother’s body struggled with breath. A cop slapped his face and asked. “Who did this to you?” Brother could not give them a name. His lips shivered but even if he’d known the names his brain would not let him answer. The police move on but we are left to live with this question. it has become an always question with its twin question of “why?”          

             I have accepted that that the police report will not have the name(s) I seek.

              Pour demander le rapport de police sur Frère j’ai besoin du nom du détective en charge de son cas. Je me souviens seulement du costume gris. Le brun de ses yeux. Je recherche des indices sur internet et je trouve les rapports des journaux. Il y en a plusieurs de quelques lignes chacun.

            Cette nuit-là le corps de Frère lutta pour respirer. Un flic le gifla au visage et demanda: “qui vous a fait cela?” Frère ne pouvait pas leur donner un nom. Ses lèvres frissonnèrent mais même s’il avait eu connaissance des noms son cerveau ne l’aurait pas laissé répondre. La police va de l’avant mais nous sommes contraints de vivre avec cette question. C’est devenu une question pour toujours avec sa question jumelle « pourquoi ? »

             J’ai accepté que le rapport de police ne contienne pas le(s) nom(s) que je cherche.

XII

            In my city Brother is the 37th homicide of 2010. There is a homicide and autopsy report number attached to his name. There is a death certificate printed with his name. I have begun to seek these documents, wanting them to tell me something more about Brother. What I really   want is for there to be fewer numbers assigned to Brother and more stories. I want to hear him say my name again, for him to call me Sister again.

            I am learning how inhabit my name. It is no longer such a strange land. I learn my own name just as I learn how to be Sister without Brother, but not Brotherless. 

             Dans ma ville Frère est le 37ième homicide de l’année 2010. Il y a un numéro d’homicide et d’autopsie attaché à son nom. J’ai commencé à chercher ces documents voulant qu’ils m’en disent plus sur Frère. Ce que je veux vraiment c’est qu’il y ait moins de numéros assignés à Frère et plus d’histoires. Je veux l’entendre dire mon nom à nouveau, qu’il m’appelle encore Sœur.

            J’apprends comment habiter mon nom. Ce n’est plus un territoire tellement étrange. J’apprends mon propre nom de la même manière que j’apprends à être Sœur sans Frère, mais pas sans frère.

 

            Voici retracée l’histoire qui est au cœur du drame de Casandra et de sa famille, histoire parmi les nombreuses autres histoires de jeunes ou moins jeunes indiens tués, ou trouvés morts, qui ne méritent aux yeux des autorités qu’une enquête bâclée vite classée sans suite. Casandra personnifie la balle qui a tué son frère afin de focaliser sa révolte et son chagrin sur un objet et une cause plutôt que de nourrir un désespoir dévastateur dans des interprétations d’intentions humaines malfaisantes. Ce procédé, qui s’en tient au fait, la protège et laisse la force de la dénonciation des manières discriminatoires de la société américaine (hélas de bien des sociétés de par le monde également) pénétrer nos esprits de façon bien plus puissante, avec une efficacité redoutable. Elle nous injecte en quelque sorte le même poison, certes dilué, celui qui a pénétré son cœur le jour de la mort de son frère, jour et mort devenant le symbole de tous les traumatismes subis par les communautés indiennes.

             Enseignante au North Seattle College et invitée en résidence d’écriture, Casandra a travaillé ce qu’elle appelle un roman-en-histoires intitulé When We Were Hunted (quand nous étions chassés) et qui montre une famille mexicano-Indienne pleurant la perte de Michael, un homme complexe considéré comme le père. Chaque chapitre, chaque histoire est racontée du point de vue de différents personnages dont les principaux sont les deux enfants et leur mère. A propos de ce travail Casandra explique qu’elle centre ses recherches sur la notion et la problématique de lieu, et plus spécifiquement comment le lieu joue l’architecte de la pensée et comment il influence le langage, comment il est possible de restaurer la connexion d’une communauté avec le lieu. « C’est l’intersection du lieu, de l’histoire,  de la culture et de l’identité que je cherche à explorer. » confie-t-elle.

               A propos de langage, voici comment elle envisage d’en changer :

Un nouveau langage

Mes paroles s’effondrent
toujours 

sur elles-mêmes, elles se sentent à l’étroit
dans ma bouche. Je veux un nouveau
langage. Un qui possède au moins
50 mots pour chagrin

et 50 mots pour amour, afin que je puise les offrir
aux vivants
qui pleurent les morts. Je veux
un langage qui comprenne
souffrance-sœur et cœur-cassé. Ainsi
lorsque je te dis que Frère

est mon hameçon de cœur, tu voies

l’aiguille m’enfilant
aux autres, nombreux
hommes, femmes et enfants

de notre ville crachant ses sales poussières.

Je veux un langage pour te parler
du trente-septième homicide
de l’année 2010. Le non-résolu,
tout ce que je sais d’un homme,

ma ville le transforme en chiffre,
toujours des étincelles de mémoire,

en arrière vers les jours plus longs quand :
l’océan est la bouche
de l’été. Nos doigts coquillages
dans le sable fouillent–nous trouvons

de petits crabes argentés nous creusons
et creusons jusqu’à en avoir marre et partons
à la recherche d’algues acidulées.

Nous sommes soleil salé. Comment nous dorons

à terre. Notre chair chaude épanouie
nous rappelle notre désert et le sang

du canyon. Dans ce nouveau langage nos os disent
soleil et mer, ils nous rappellent une ancienne
langue que nos bouches ont oubliée, mais dont notre
moelle se souvient.

 

A NEW LANGUAGE

My words are always
     collapsing

upon themselves, they feel too tight
     in my mouth. I want a new
language. One with at least
     50 words for grief

and 50 words for love, so I can offer
     them to the living
who mourn the dead. I want

a language that understands
     sister-pain and heart-hurt. So
when I tell you Brother

is my hook of heart, you will see
 
the needle threading me to
     the others, numbered
men, women and children
     of our grit spit city.

I want a language to tell you
     about 2010's
37th homicide. The  unsolved,
     all I know about a man,

my city turned to number,
     always sparking memory,

back to longer days when:
     Ocean is the mouth
of summer. Our shell fingers
     drive into sand, searching–we find

tiny silver sand crabs we scoop
     and scoop till we bore and go
in search of tangy seaweed.

We are salted sun. How we brown

to earth. Our warm flesh flowering,
     reminding us of our desert and canyon

blood. In this new language our bones say
      sun and sea, reminding us of an old
language our mouths have forgotten, but our
     marrow remembers.

 

     Comme pour tous les Indiens d’Amérique du nord, le renouveau chez Casandra tel qu’elle l’entrevoit et le désire, passe par la récupération du passé. Il faut le sauver de son oblitération forcée par les siècles de colonisation, d’assimilation brutale, d’acculturation et de massacres.

     Dans une deuxième partie je développerai plus avant ces thèmes qui reviennent dans sa poésie tels un refrain lancinant répété à dessein pour d’un côté libérer le chagrin et se séparer de sa tristesse,  de l’autre pour éveiller nos consciences à des réalités trop souvent ignorées, hélas parfois volontairement ignorées. Casandra ne lâchera pas ceux qui ne veulent ni voir ni entendre. Il en va de sa santé mentale, il en va du repos de son frère et de la dignité d’un peuple tout entier.

°°°°°°°°°°°°°°°°°°°

 

Béatrice Machet : traductrice des poèmes de Casandra Lopez (avec son aimable autorisation)

poèmes originaux à retrouver sur :

http://www.mudcityjournal.com/cassandralopez/ (Mudcity, IAIA low rez web journal) untitled/naming

http://indiancountrytodaymedianetwork.com/2013/04/09/new-language-poem-casandra-m-lopez-national-poetry-month-148703  (New Language)