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Bonnes feuilles offertes par Al Manar

Jacques Viallebesset, Sous l'étoile de Giono
(extraits)

 

 

Avec toi

Je suis avec toi âme sincère et cœur pur
Egaré dans le dédale de ta forêt obscure
Cherchant en aveugle la clairière de l’être
Je suis le compagnon qui a travaillé comme toi
A qui tu peux dire tes espoirs et désirs secrets
Je t’apporte les forêts les mers les montagnes
Je suis avec toi quelles que soient tes erreurs
Dans tes yeux sont gravés tes rêves ta nostalgie
Toute l’innocence perdue depuis l’enfance
Cette absence de pureté que tu ne vois plus
C’est ainsi que la mort arrive avant l’heure
Je suis ton compagnon en perpétuelle révolte
Et si la société a tué en toi cette faculté
Je te dis que les prés fleuris t’appartiennent
Je suis avec toi partout où tu es esseulé
Je t’attends aux estuaires de ta résignation
Tu imagines les routes du vent les joies du monde
Au nom de l’espoir je t’offre amour et amitié
Pour soumettre ton désir au rythme du cosmos
Je suis avec le berger qui t’attend près de ta source .

 

 

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Pour saluer Giono (7)

 

S’il devait venir ce serait une nuit extraordinaire
Les touffes d’étoiles brillaient avec des racines d’or
Quand il me montra du doigt la constellation d’Orion
Je reconnus le professeur d’espérance que j’attendais

La jeunesse c’est la passion de l’inutile nous dit-il
Et il ensemença de pervenche les champs et les cœurs 
Si nous savions vivre conscients nous ne serions malades
De ce trop de sang amer au lieu du sang de miel doux

Il ramena un cerf qui courait libre parmi nous
Et des biches aux cils pleurant de manque d’amour
Dans la tendresse des herbes et l’humus des forêts
Parce qu’il voulait que la joie demeure pour tous

Il fit sourdre aux corps des tambours de danse
Comme la cadence forte  du sang dans les artères
Et l’on sentit la joie aussi inépuisable que l’air
Réveillant en nous le trop grand appétit de vivre  

Une bergère seule savait sans vraiment savoir
Elle portait en elle la joie des gestes naturels
Ne parlait pas la langue menteuse des hommes
Mais en initiée celle des agneaux et des oiseaux

Chacun ne peut atteindre que la joie qu’il comprend
Les passions humaines ont encore les batailles au cœur
Et la violence toujours engendre la mort et le malheur
Il faudrait pourtant  que la joie fût  tranquille et paisible

Alors lucidement désespéré il avança dans l’orage
La foudre lui planta un arbre d’or dans les épaules
Et il éclata dans la nuit comme une étoile perdue
Je l’attendrais pour revivre espérant son retour.
 

 

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Dans la marge (7)

 

J’aurais voulu être celui-là qui vient
Porteur d’une joie d’être à partager
Avec tous les humains qui saignent
De leurs rêves lourds d’espoirs blessés
Je porte en moi les sucs de la terre
La danse de flamme du sang au cœur
Ma poitrine se gonfle du vent des astres
J’halète de la sève de tout ce qui vibre
Frémit palpite et vit au rythme des saisons

Je voudrais être celui-là qui vient
Un arc-en-ciel doux dans les tempêtes
Un magma de joie monte de mon ventre
Je t’ai retrouvée et te tresse dans mes bras
Tes yeux font chanter toutes les sources
La joie est là bruissant dans ton feuillage
Bourgeon tendre gorgé de résine vivante
Tu es en moi comme le noyau dans son fruit
Ma joie ne demeurera  que si elle est tienne.