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Bonnes feuilles Po&Psy : Eva Maria Berg

 

Eva-Maria Berg, née en 1949 à Düsseldorf (Allemagne), a fait des études d’allemand et de français à l´université de Fribourg en Brisgau. Domiciliée avec sa famille à Waldkirch, en Forêt Noire, elle séjourne régulièrement en France.
Outre des livres de poésie, souvent en dialogue avec des artistes, et dont certains sont publiés en éditions bilingues ou dans leur traduction en trois langues (français, anglais, espagnol), elle écrit de la prose, des essais, des articles et des critiques littéraires. Elle participe à de nombreuses manifestations interdisciplinaires et transfrontalières : expositions, installations, lectures, concerts de poésie.
Elle est collaboratrice régulière de la revue Les Carnets d’Eucharis et des revues en ligne Recours au Poème et Levure littéraire.

 

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Ce recueil d'une cinquantaine de poèmes est le fruit de plusieurs résidences de l'auteur dans le midi de la France, sur les rives de la Méditerranée. Rives dont le poème est la métaphore : un point de départ sans but, toujours renvoyé au silence, dans le mouvement inversé de sa quête.
Eva-Maria Berg dit elle-même explorer " l'espace, la distance ou le lien, entre les hommes et les mots, le palpable - qui n'a pas ou plus de sens -, l'impalpable - qui n'est pas le vide -, la trace et le fugitif, l'éphémère, l'échange pour sortir du cadre qui fige et déshumanise (...) afin de donner la précision à l'indéfinissable, m'insurger fragment après fragment, témoigner, essayer de restituer sens au mot, sensibilité à la langue, authenticité à l´existence ".

 

 

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Extraits :

 

die alten begriffe
himmel und erde
spiegeln sich noch
im wasser wieder
verschwommen
die konturen
die linien das muster
landüber himmelunter

 

les vieilles notions
de ciel et terre
se reflètent encore
dans l’eau
vagues
les contours
les lignes le motif
terre dessus ciel dessous

 

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hol dir die nachricht
in deine stille
blick übers wasser
so himmlisch blau
schrei einer möwe
gellend dein schweigen
wie nur erreicht es
die andere seite

 

va chercher la nouvelle
dans ton silence
regard par-dessus l’eau
d’un bleu si céleste
cri d’une mouette
strident ton mutisme
comment peut-il atteindre
l’autre rive ?

 

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und die helleren tage
verschwimmen
im ohr die laute klage
singt zwischen wellen
von licht und gezeiten
statt von not und
sterben irgendwo
auf see wird
der tod bestattet

 

et les jours plus clairs
se brouillent
dans l’oreille la haute plainte
chante entre les vagues
de lumière et marées
au lieu de souffrir et
de mourir quelque part
en mer est
ensevelie la mort

 

* * *

 

irgendwo auf see
die menschen
leere erinnerung
an ufer die flucht
versuche fort
aus der enge
ein horizont
makellos
sein klischee
gibt die linie
vor sie überschreiten
zu können stürzen
die augen
dem körper davon

 

quelque part en mer
souvenir
sans humains
vague souvenir
du rivage la fuite
tentative loin
de l’étroit
un horizon
sans défaut
son cliché
donne la ligne
pour pouvoir
la franchir les yeux
se jettent
en avant du corps

 

 

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zwischen die länder
geraten vielzüngig
sprechen lernen
namen und orte
farben und ziele
vergleiche kontraste
standpunkte
beziehen hier
oder dort immer
zweifel bewahren
sich nicht verlieren
ans blosse wort

 

se retrouver entre
les pays apprendre
à parler plusieurs langues
des noms des lieux
couleurs et destinations
comparaisons contrastes
prendre
position ici
ou là toujours
garder le doute
ne pas se perdre
dans les mots

 

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Traduit de l'allemand par Inge Kressner et Danièle Faugeras
https://poetpsy.wordpress.com/