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Brigitte Gyr,Le vide notre demeure

La bibliographie de Brigitte Gyr (avocate de profession) est impressionnante : 14 livres de poésie sans compter sa présence dans diverses anthologies, 2 pièces de théâtre, 2 livres jeunesse, et quelques traductions (dont 3 de poésie) et voilà « Le vide notre demeure », de la poésie comme j’aime : les souvenirs sont convoqués, « Le café du port va bientôt fermer » (p 10) sans qu’on sache s’il s’agit d’une fermeture quotidienne ou définitive. Tout l’art de Brigitte Gyr est là. 

Ailleurs (p 15), c’est un baluchon que le lecteur découvre (avec du coton, une seringue…) et qui sert de point de départ au « souvenir (qui) se défigure ». Ailleurs encore (et il me faut citer un poème in extenso ) : « l’immeuble où l’on vivait est / mort de vieillesse le / bois de l’armoire / flambe dans la cheminée » (p 17).

Le lecteur remarquera la coupure à la fin du vers 2… Comme il remarquera la brièveté des poèmes ou le thème de l’incendie. Je ne sais pas si l’usage du caractère italique désigne une citation ou la volonté de l’auteur(e) d’attirer l’attention du lecteur sur certains propos mais le poème tient la route. Ce que dit Brigitte Gyr, c’est le mystère d’être au monde que la langue ne résout pas (p 37). Car le vide, c’est notre demeure. L’ordre des mots a son importance, nous rappelle, mine de rien, B Gyr : c’est ainsi que «  demeure… le vide » (p 49) est à rapprocher du titre du recueil, « le vide notre demeure ».

 

 

Brigitte Gyr : « Le vide notre demeure » suivi de « friperie ». La Rumeur libre éditeur, 80 pages, 15 euros.

Le titre de la Seconde suite, « Friperie », dédiée à Christian Boltanski et à Monumenta 2010 fait écho au tas de vêtements. Comme font écho certains termes de la première suite (grue, peau…) à l’installation de Boltanski dont il faut dire quelques mots : dans le Grand Palais, une grue rouge soulève quelques vêtements d’un énorme tas avant de les relâcher. Le vêtement est la seconde peau de l’homme. Le froid est glacial dans le Grand Palais tout comme le brouillard est glacial (p 66). Je n’aime pas trop les installations mais là j’adhère par la grâce des poèmes, par les questions en abysses et par la mort présente… Les poèmes de Brigitte Gyr permettent de comprendre l’installation de Christian Boltanski ; il faut remercier la première.