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Jean-Claude Coiffard, Le ciel était immense

Le ciel immense ne peut être que celui de l’enfance. C’’est ce que nous raconte le poète nantais Jean-Claude Coiffard (90 ans) dans un livre à la fois pétri de nostalgie et de gratitude pour ce temps vécu dans un pays au « visage d’aurore ». Et toujours dans la fidélité à René Guy Cadou.

Sous le ciel immense de Jean-Claude Coiffard, un ciel qui « brasille sous le soleil de mai », il y a un fleuve (la Loire), des roseaux, des oiseaux et, dans le jardin du poète, « l’odeur des lilas », un puits, un figuier, des abeilles et des roses à foison. C’est à ce pays-là qu’il s’adosse, univers parcouru de « nuages au long cours » et toujours, la nuit venue, illuminé d’étoiles.

C’est la voix de René Guy Cadou qui résonne, de bout en bout, dans ce livre. Jean-Claude Coiffard nous dit qu’il peut aujourd’hui écrire « son nom en lettres d’or/dans le granit du temps ». Car le monde, dit-il, « s’ordonnait sous les pas »de l’instituteur-poète de Louisfert dont le chemin de l’école était « pavé d’hortensias ». Hommage à Cadou, donc, mais aussi, au fil des pages, à Apollinaire, Nerval ou Marie-Noël, qui furent ses compagnons de route.

Mais le poète, l’âge venu, n’en finit pas malgré tout de s’interroger. « Le mot que je cherche/qui me le donnera ? ». Car comment témoigner au plus près de cette vie donnée en abondance ? « J’ai tant et tant/remonté d’eau/de mon vieux puits/j’ai tant et tant/puisé de lettres/que maintenant/je vois le fond ».

Saisi d’une forme de vertige, le poète évoque ce « vieux puits/rempli d’ombres »« délaissant le ciel/le soleil s’est noyé ».

Jean-Claude Coiffard, Le ciel était immense, Des sources et des livres, 139 pages, 17 euros.

Pourtant il se ressaisit bien vite. Sans doute faut-il se résoudre à partir, « mais les roses toujours », se rassure-t-il, « parleront aux abeilles ». Et loin de pouvoir prétendre tout dire de ce ciel immense avec les mots du quotidien, il affirme arriver « à l’heure/où le silence/pourra tout dire ». Et, plein de confiance, quand « la porte s’ouvrira », accéder au « pays mystérieux ».

Présentation de l’auteur

Jean-Claude Albert Coiffard

Jean-Claude Albert Coiffard est né à le 21 juin 1933, à Nantes. Poète, critique et animateur, il est responsable et animateur de l'émission "Rivages poétiques" sur Radio-Fidélité ; membre de "Poésie sur tout" et rédacteur de la revue "7 à dire"; il est également vice-président de Sac à mots édition.

© Crédits photos (supprimer si inutile)

Bibliographie

Les Cernes bleus de la nuit (Traces, 1992), Les nymphéas des songes, préface de Jean-Paul Mestas, (Les Presses Littéraires, 1999), Plein Cintre, préface de Jean-Marie Gilory, (Sac à mots édition, 2002), Manoll, Cadou : une amitié en plein coeur, essai, préface d'Yves Cosson, (Librairie bleue, 2002), Venise de Pourpre et d'Orient (éd. Brind'jonc, 2004), Ce peu d'éternité, préface de Jacques Taurand, (Sac à mots édition, 2006).

Poèmes choisis

Autres lectures

Autour des éditions La Porte.

Gaspard Hons,Quand resplendit la fleur inverse  Ce beau titre énigmatique est emprunté à Raimbaut d’Orange (1066-1121). En de très brefs poèmes de 3 , 2 voire 1 vers, Gaspard [...]

Jean-Claude Albert Coiffard, Il y aura un chant

 « il y aura un chant/envoûtant le silence/des oiseaux arrivant de plus loin que le ciel ».  Jean-Claude Albert Coiffard vit d’espérance. Né en 1933, il a aussi  l’âge de regarder dans le rétroviseur. Ce [...]

Jean-Claude Coiffard, Le ciel était immense

Le ciel immense ne peut être que celui de l’enfance. C’’est ce que nous raconte le poète nantais Jean-Claude Coiffard (90 ans) dans un livre à la fois pétri de nostalgie et de [...]




Jean-Claude Albert Coiffard, Il y aura un chant

 « il y aura un chant/envoûtant le silence/des oiseaux arrivant de plus loin que le ciel ».  Jean-Claude Albert Coiffard vit d’espérance. Né en 1933, il a aussi  l’âge de regarder dans le rétroviseur. Ce que ne manque pas de faire le poète en égrenant avec bonheur des souvenirs d’enfance entre terre et mer, du côté de la Loire, du marais, de l’estuaire.

Nous sommes dans le pays nantais (« Que ma ville était belle/les paupières bleuies/par le lait de la lune ») et l’on retrouve dans ses vers les intonations de René Guy Cadou. « Mes souvenirs s’endorment/dans une vieille armoire/dont j’ai perdu la clef », écrit Jean-Claude Albert Coiffard. « On ne parlait pas/on écoutait la nuit/on regardait les ombres », ajoute-t-il.

Francis Jammes rôde aussi dans ces pages, celui qui écrivait : « Chanter de joie, mon Dieu, comme une pluie d’orage », tandis que le poète nantais, lui, s’émerveille à la vue d’Eugénie et de ses 3 ans. « Tu cours/dans l’allée verte et bleue/tu cours/Eugénie//et tu es belle/la lumière en frémit ».Ce recueil, illustré par des collages de Ghislaine Lejard, est ainsi pétri de notations lumineuses, revigorantes. Il fait aussi l’éloge du silence, « un éternel silence/qui nous parle de Dieu (…) quand on entend vibrer/la corde de son âme ». 

Jean-Claude Albert Coiffard, Il y aura un chant, Des sources et des livres, 70 pages, 15 euros.

Mais la mort fait son œuvre fracassant les élans du poète. « Il y eut cette nuit/plus noire que la nuit//il y eut ce silence/plus grand que le silence ». C’est la perte d’êtres chers, évoquée en mots retenus. Et le poète lui-même anticipe son grand départ par une dédicace au monde qu’il quittera un jour. Il l’adresse « aux fleurs et océans/à l’herbe et à l’insecte/aux orties et aux ronces (…) à la bruyère longue/qui embrasse la lande (…) à la harpe, aux saxo ». On croit entendre Xavier Grall faisant l’inventaire du monde dans Genèse, son livre posthume, ou entonnant un chant à son créateur dans Solo.  

Jean-Claude Albert Coiffard, lui, écrit : « Je partirai /une légende au cœur/et le sable des roses/dans le creux de la main// Je prendrai le chemin qui conduit aux mystères ». L’éternité existe. Le poète nantais l’a déjà rencontré. « Elle est cette lumière/qui parlait à l’enfant/en langage d’abeille ».




Autour des éditions La Porte.

Gaspard Hons,Quand resplendit la fleur inverse 

Ce beau titre énigmatique est emprunté à Raimbaut d’Orange (1066-1121). En de très brefs poèmes de 3 , 2 voire 1 vers, Gaspard Hons donne à contempler toute la poésie de l’ordinaire.

Savoir capter l’éclat de lumière au cœur de l’obscur, entendre bruiner le silence, dire l’essentiel en peu de mots, n’est-ce pas le rôle de la poésie ?

Toute la sagesse inscrite sur un grain de riz, toute une librairie contenue dans un jardin. Le livre que la nature lui offre, le poète le lit et nous le traduit.

Source : margutte.com

Extraits

 

 Sur la table un broc d’eau et de silence

                     ∗

 Des miettes de pains jetées dans la nuit
un amas d’étoiles

                     ∗

 Le fruit témoigne de l’arbre disparu

                    ∗

 L’obscurité du vaisseau
simplifie la lumière du vitrail .

 

 

 

 

Jean-Claude Albert Coiffard, Les liserons du soir

On n’entre pas en poésie
la poésie entre en nous 

 

Cette belle définition de la poésie ouvre ce recueil. Le poète nous entraîne en un passé qui inonde le cœur, la poésie est toujours là pour « panser les blessures » ; le poète, toujours en attente, façonne ses poèmes comme le potier sur son tour façonne les poteries. Il ne cesse de regarder le monde, de le faire renaître, en une poésie contemplative où tout à sens, même un brin d’herbe. La nature reflète aussi ce que souffre l’homme, certains poèmes nous parlent de ces victimes de l’Histoire. La voix du poète est là pour ne pas oublier ces « visages sans lèvres » et nous rappeler qu’il est nécessaire de faire mémoire. Le « Je » du poète est en écho au « Il », cet autre lui-même, cet ami qui lui ressemble comme un frère et qui lui aussi attend que les mots : « s’enracinent/ entre les ronces/ et les bleuets ».

Cette poésie du crépuscule est illuminée par l’empathie que porte le poète à l’homme et à la nature, c’est un recueil testamentaire pour nous offrir l’essentiel voire l’essence même d’une vie en poésie.

 

 

Tout s’était enfui

         Tout

Il ne restait
que l’ombre des lilas

Assez
pour
en faire confidence

aux lampes

Assez
pour éclairer
les rives de son cœur.

                    ∗

Témoin
du miroir

Seulement témoin

Simplement

Au cœur des camélias
germaient
les murmures de l’âme

Les coudes usés
sur le zinc du quotidien
le ciel trinquait
avec le passé.

 

                    ∗

Mon royaume inconnu
mes îles       mes ailleurs
mon jardin d’autrefois
je vous emporterai
sous mes paupières closes

Les poèmes du vent
égaré dans ma harpe
un matin de printemps
le chant du rossignol
vous le dira pour moi.

 

Sophie G LucasOrdinaire

 

Un recueil qui se déroule au rythme de chansons dont chaque titre donne naissance à un poème.

18 chansons pour 18 poèmes, une discographie poétique et dans l’ordinaire des jours, Lennon, Amy Whinehouse, Bowie, Dylan qui rencontrent le plus souvent un public ordinaire, mais parfois une poète qui, au rythme de ces chansons qu’elle aime, voit différemment cet ordinaire.

La poète respire le jour, dit le souffle et le silence, l’odeur de l’herbe, la nostalgie du temps qui passe dans l’ordinaire des jours, et les mots si difficiles à dire, à partager. Mais qu’y-a-t-il d’autre que cette vie à fleur de peau et cette solitude à apprivoiser pour peut-être réveiller :

 

ce quelqu’un endormi
à l’intérieur de soi
presque mort 

 

Photo Terre à ciel.