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Marc Patin, L’oeil à la vitre

 

L’œil à la vitre comme l’oiseau du passé
Je n’ai de secret que celui des pierres
Secret des femmes muettes
Je ressemble aux arbres du ciel
Un turban de cendres autour de la tête
Les mains seules vivantes et fermées
Sur un trésor brouillé

Un peu plus tard le jour et ses couteaux d’or froids mêlent
L’herbe des forêts découpent le pain frais des pavés
Dans les campagnes et dans les villes
L’homme sort d’un long désir
L’œil à la vitre contre l’œil fermé
De l’été oublié.

Présentation de l’auteur

Marc Patin

Textes

Une seule plaquette de poèmes a vu le jour du vivant de l’auteur : Femme magique (1942). Marc Patin (1919-1944), qui a été qualifié de « Rimbaud du surréalisme » par Sarane Alexandrian, est mort trop jeune. Son destin foudroyé est aussi poignant que l’est son œuvre. Marc Patin fut membre du groupe néo-dadaïste des Réverbères, qui publia une revue éponyme (cinq numéros en 1938 et 1939), des plaquettes individuelles, collectives, et organisa des manifestations artistiques. Il fut par la suite l’un des fondateurs et des principaux animateurs du groupe de La Main à Plume (1940 à 1944). Durant l’Occupation, ce groupe (qui emprunte son titre à Rimbaud) réussira à perpétuer avec intransigeance, résistance et courage, la pensée et les activités surréalistes. Marc Patin s’y affirme comme le poète le plus doué et le plus brillant de sa génération. Son œuvre, marquée par la solitude et le malaise existentiel, atteint des sommets dans la quête du désir et du merveilleux. Son lyrisme amoureux, fluide et sensuel, atteint et dépasse souvent celui de Paul Éluard (poète et ami qu’il admire). Marc Patin trouve la mort (d’une embolie pulmonaire) dans un hôpital allemand, le 13 mars 1944. Le poète sombre dans l’oubli, jusqu'à ce que Guy Chambelland le réédite en 1991, et que Christophe Dauphin entreprenne en 2003 de faire connaître sa vie et son œuvre. Il nous laisse plus de 800 poèmes, dont les ¾ sont inédits.

Marc Patin

     Œuvres :

  • Femme Magique (La Main à Plumes, 1942),
  • Quelques poèmes (Imprimerie nationale, 1945),
  • Anthologie (Le Pont sous l’eau, 1991),
  • Vanina ou l’Étrangère (Le Pont sous l’eau, 1992),
  • Les Vivants sont dehors (Les Hommes sans Epaules n°17/18, 2004),
  • Le Temps du rêve (Supérieur Inconnu, 2008).

À consulter :

  • Guy Chambelland, Le cas Patin (Le Pont sous l’eau, 1991),
  • Marc Patin et le surréalisme (Les Hommes sans Epaules n°17/18, 2004),
  • Christophe Dauphin, Marc Patin, le poète de la Femme Magique (Poésie 1/Vagabondages n°40, 2004),
  • Christophe Dauphin : Marc Patin, le surréalisme donne toujours raison à l’Amour, essai suivi d’un large choix de poèmes (éd. Librairie-Galerie Racine, 2006, www.leshommessansepaules.com).

 




Marc Patin, La mémoire

 

La nuit je pense à vous votre visage est devant moi au niveau des miroirs et des sables
Mère des bouquets et des arbres mère aux mains palpables
Je vous vois vous avez des rires entre les doigts
Et dans les yeux du sang véritable

Aux épines des routes l’orage laisse des lampes rouges
Le ciel est une roue dans les herbes brisées
Le chemin bordé d’aubes pend
Comme un linge à la corde des toits patients

Dans les paniers de la rivière une fille nue et blanche
Glisse ses seins et ses hanches
Face à l’absence face au vide qui la tente
Une fille nue et tendre frise distraitement

La verdure de ses jambes.

 

 

                                   29 décembre 1943

Présentation de l’auteur

Marc Patin

Textes

Une seule plaquette de poèmes a vu le jour du vivant de l’auteur : Femme magique (1942). Marc Patin (1919-1944), qui a été qualifié de « Rimbaud du surréalisme » par Sarane Alexandrian, est mort trop jeune. Son destin foudroyé est aussi poignant que l’est son œuvre. Marc Patin fut membre du groupe néo-dadaïste des Réverbères, qui publia une revue éponyme (cinq numéros en 1938 et 1939), des plaquettes individuelles, collectives, et organisa des manifestations artistiques. Il fut par la suite l’un des fondateurs et des principaux animateurs du groupe de La Main à Plume (1940 à 1944). Durant l’Occupation, ce groupe (qui emprunte son titre à Rimbaud) réussira à perpétuer avec intransigeance, résistance et courage, la pensée et les activités surréalistes. Marc Patin s’y affirme comme le poète le plus doué et le plus brillant de sa génération. Son œuvre, marquée par la solitude et le malaise existentiel, atteint des sommets dans la quête du désir et du merveilleux. Son lyrisme amoureux, fluide et sensuel, atteint et dépasse souvent celui de Paul Éluard (poète et ami qu’il admire). Marc Patin trouve la mort (d’une embolie pulmonaire) dans un hôpital allemand, le 13 mars 1944. Le poète sombre dans l’oubli, jusqu'à ce que Guy Chambelland le réédite en 1991, et que Christophe Dauphin entreprenne en 2003 de faire connaître sa vie et son œuvre. Il nous laisse plus de 800 poèmes, dont les ¾ sont inédits.

Marc Patin

     Œuvres :

  • Femme Magique (La Main à Plumes, 1942),
  • Quelques poèmes (Imprimerie nationale, 1945),
  • Anthologie (Le Pont sous l’eau, 1991),
  • Vanina ou l’Étrangère (Le Pont sous l’eau, 1992),
  • Les Vivants sont dehors (Les Hommes sans Epaules n°17/18, 2004),
  • Le Temps du rêve (Supérieur Inconnu, 2008).

À consulter :

  • Guy Chambelland, Le cas Patin (Le Pont sous l’eau, 1991),
  • Marc Patin et le surréalisme (Les Hommes sans Epaules n°17/18, 2004),
  • Christophe Dauphin, Marc Patin, le poète de la Femme Magique (Poésie 1/Vagabondages n°40, 2004),
  • Christophe Dauphin : Marc Patin, le surréalisme donne toujours raison à l’Amour, essai suivi d’un large choix de poèmes (éd. Librairie-Galerie Racine, 2006, www.leshommessansepaules.com).

 




Marc Patin, Les poètes et les prophètes

 

J'ai vu le ciel dans une étoile et le feu noir au cœur de l'arbre
La neige nue comme une femme
Et le sang couché sur le sable

J'ai vu le jour l'oreille contre la vitre
Bateau veilleur enfoncé dans la nuit
J'ai vu deux yeux plus forts
Plus sauvages que des fruits

J'ai vu des hommes dans la plaine
Couverts de poussière de bois mort de reflets
Des hommes de chair un soir
Ils tenaient à la main une lune éteinte une main de femme un fer à cheval

Ils avaient sur la face
L'haleine âcre des détroits.

 

                                   17 décembre 1943