“Dissonances” numéro 35 : La Honte

Recours au poème parle régulièrement de la revue Dissonances, revue thématique et semestrielle qui, depuis 2002, explore avec constance et sans barrières des domaines variés et souvent effectivement "dissonants" – traités avec originalité et un goût certain de la provocation, qu'on apprécie dans un discours ambiant consensuel et policé. La liste des thèmes est éloquente : Les Etats-Unis, L'Europe, la Religion, le Sexe, la Mort, la Folie, la Laideur (on aimerait y jeter un coup d'oeil à l'aube d'un Printemps des poètes consacré à la beauté), l'Argent, le Futur, la Merde, l'Amour, la Peur, Ivresses, L'Autre, Insurrection, Masques, Entrailles, Idiot, Maman, Le Vide, Rituels, Superstar, le Mal, la Peau, Animal(s), Orgasmes, Ailleurs, Tabou (auquel j'ai eu le plaisir de participer - plaisir augmenté du fait de savoir que les publications, anonymées, ne permettent pas les "coups de pouce" aux "copains), Que du bonheur!, Désordres, Nu, Fuir, Traces, La Honte - et à venir : La Vérité.

La revue se revendique "revue pluridisciplinaire à but non objectif" – mission accomplie !

La partie création présente des textes (poèmes ou prose) et un portfolio de 10 pages consacré à un artiste qui a "carte blanche". Suit un volet "critique" divisé en 4 parties : la "dissection" d'un auteur répondant à un questionnaire fixe, la "disjonction" où 4 chroniqueurs rendent compte de leur lecture d'un livre remarquable, puis "dissidences" qui présente 8 ouvrages "coups-de-coeur" parus chez de petits et moyens éditeurs, et "digression", consacrée à un domaine autre que la littérature.

Soit, pour le numéro que j'ai en main, 16 variations autour de la honte, accompagnés de belles photos en noir et blanc, comme toujours pour cette revue grand format sur papier glacé. Où la vergogne se pare de nuances, mais prend source le plus souvent au sein de la famille ou dans le rapport amoureux.

Le portfolio est consacré à la photographe Rim Battal et s'ouvre sur la carcasse d'un lapin écorché : l'artiste a photographié, en très gros plan, les entrailles de l'animal, comme l'aruspice tripier, en quête de l'éventuel siège de la Honte – en résultent des photos étranges, dans des nuages de gris où se devinent plèvre, tissus gras, nerfs et os... comme des épiphanies presqu'irréelles - et envoûtantes.

C'est Laurent Abarracin qui se plie au jeu questionnaire, tandis que Le Corps lesbien, de Monique Wittig, fait  l'objet de 4 lectures par Julie Proust-Tanguy, Jean-Marc Flapp, Anne Monteil-Bauer et Côme Fredaigue. Le lecteur de la revue se fera - peut-être - une idée complexe de l'ouvrage, entre l'émotion ressentie par la première lectrice et l'ennui évoqué par le dernier... il aura à coup sûr envie d'y aller voir par lui-même.

Le numéro se clôt sur un article de Nicolas Le Golvan, établissant un parallèle entre l'humoriste Repp et Jacques Lacan.

On a plaisir à annoncer que le numéro 36, sur la vérité, attend des contributions,  à envoyer jusqu'au 31 janvier - et qu'il est très facile de s'abonner.




L’Intranquille

Une revue toujours élégante, toujours attractive, et dont le contenu vaut la forme. L’Intranquille , pour ce numéro 14, propose comme à son habitude un dossier, cette fois-ci dédié à la thématique du refus.

Celui-ci est magnifiquement servi par des poètes comme Jacques Demarcq, Linda Maria Baros, Christophe Esnault, Perrine le Querrec, entre autres, et en exergue quatre extraits de Fernando Pessoa.

Jacques Demarcq est également à l’affiche de la rubrique suivante qui propose un hommage à Christiane Tricoit, éditrice, et à Passage d’encres, et à son époux, Frater, décédé juste après elle. Une vie passée à défendre et porter la poésie, qui est ici honorée par des voix différentes : Yves Boudier, Pierre Drogi et Martine Monteau.

D’autres rubriques sont au rendez-vous de ce numéro printemps/été 2018 : des Traductions, un espace réservé à de Nouveaux auteurs comme Typhaine Garnier, Alexandre Desrameaux et d'autres, et un article sur les arts plastiques. Nous pouvons pour ce numéro consacré à l’Art brut, avec pour entrée "les femmes qui cousent", faire connaissance avec Marie Pelosi, dont le lecteur découvrira des dessins  exposés au musée de la création franche de Bègles.

 

L'Intranquille, revue de littérature n°14, printemps/été 2018,
Atelier de l'agneau éditeur, 2018? 91 pages, 16 euros.

Enfin, ce qui est rare, une rubrique consacrée aux métiers du livre, et pour clore des critiques, servies par Jean-Pierre Bobiloot, Myrto Gondicas, Denis Ferdinande et Françoise Favretto, à qui le lecteur doit également la photo de couverture de ce beau numéro.

Plaisante mais pas seulement, légère mais d’une belle épaisseur sémantique, L’Intranquille ne cesse de porter la parole poétique au regard de tous. Une revue dirigée par Françoise Favretto, qui mène aussi d’une main avertie et sûre les Editions de l’Agneau. Nous espérons qu’elle poursuivra ce travail d’éclaireur.

La thématique du dernier numéro de L’intranquille, La grande guerre, est le point focal du dossier servi par des textes de Françoise Favretto, Victor Segalen, Pascale Alejandra et une planche de BD de Tronchet. Les rubriques habituelles ne manquent pas, une fois de plus, d’attrait : Parmi les nouveaux auteurs, le lecteur pourra entre autres découvrir ou redécouvrir Damien Paisant avec cette écriture toujours saisissante. Entre slam et silence, le rythme de sa poésie est celui d'une symphonie représentative d’une modernité sidérée. La rubrique Traductions tout aussi attractive, offre une très belle traduction de Doina Ioanid signée Jan Mysjkin. Des Etudes : ce trimestre Philippe Di Meo aborde l’œuvre de Zanzotto non sans humour : « Par quel bout commencer »…et des extraits de Deuil pour deuil de Christophe Stolowicki  paru chez Lanskine. 

Mais le plus remarquable reste la rubrique liminaire, qui offre cette surprise : Lambert Schlechter et Jacques cauda, dont les vers ne trahissent en rien la richesse de ce quinzième numéro…Peintre qui n’est plus à présenter, poète non moins talentueux, Jacques Cauda place ses vers sous l’égide de Philippe Jaffeux, que nous laisserons conclure cet article avec une citation tirée de Courants blanc, publiés eux aussi aux Ateliers de l’agneau :   

 

Les lettres sont belles si elles donnent un sens incompréhensible à des images imprononçables

 




REVU, La revue de poésie snob et élitiste

Il y a certes du dandysme dans la posture qui consiste - de nos jours - à présenter une revue comme "snob et élitiste", et au fond, c'est loin de nous déplaire : nous n'aimons guère les meutes ou les troupeaux, encore moins la bien-pensance respectueuse de l'air du temps et des idées en vogue... Qu'on revendique une position différente de la doxa est une belle chose en poésie comme dans la vie...

Voici donc, dès la couverture (sobre, photo de fougères monochrome sur fond ocre, le titre en beaux caractères blancs art déco...) une revue très élégante qui, une fois ouverte dévoile, sur de belles pages ivoire,  une profusion de textes, dessins et photos en n&b...

REVU, la revue de poésie snob et élitiste,
numéro 4/5,  "Pieds nus sur la lande",
130 p., 5 euros, ou par abonnement, par chèque
à l'ordre de l'association REVU 
59 rue Voltaire, 54520 Laxou

Feuilletons-la comme elle nous y invite, et découvrons  l'édito, qui nous annonce tout de go la position de la rédaction  - dont on comprend, à la lecture de cette livraison, tout ce que la posture initiale enferme de vérité, et de provocation amusée :

 

Effort semble soudain le mot qu'il faut pour faire le tri, après tant de concepts, d'avant-gardes et de commentaires – on a oublié qu'écrire de la poésie demandait un effort. La poésie s'étudie au cordeau.

 

Cette "petite corde tendue entre deux points fixes afin de tracer des lignes droites, utilisée notamment dans le bâtiment et en horticulture" selon la définition du TLF nous amènera à envisager la poésie comme un jardinage (et je repense au charmant Parcelle 101 de Florence Saint-Roch recensé sur ces pages en octobre) . Toutefois, je ne peux m'empêcher aussi de penser à "L'unique cordeau des trompettes marines" qui nous ramène à la poésie d'Apollinaire - et me voici en condition pour lire ce numéro double de la revue.

        numéro 1.

 

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numéro 2.

 

 

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numéro 3

Le "sommaire", lui,  annonce 4 volets : poèmes en archipel, Relâche, Dossier (ici "pieds nus sur la lande" - mais les numéros précédents portaient sur "La Psychologie des mouettes" ou "La Ville à nos pieds" et l'esprit des bardes) et enfin :  Situations. Le premier volet - qui se réfère au titre de René Char - s'ouvre sur deux double pages de photo (la même, et son "écho" inversé) accompagnées de cette légende : "Les Poèmes en archipel invitent à se perdre dans les chemins des peaux et des forêts. Tel le Petit Poucet rêveur guidé par le chuchotement d'un fleuve, on y croisera les animaux curieux des contes : à moins que le parchemin des corps à nu ne nous égare vers un désert peuplé de mirages." Il regroupe des textes qui se parlent ou se font écho, comme toujours les voix poétiques. On y retrouve Fabrice Farre dont nous avons récemment présenté un recueil , Hawad, traduit par l'auteur et Hélène Claudot-Hawad, présentant aussi la version originale en tamajaght, Dom Corrieras qui nous emmène sur les chemins "De Bordeaux à Roncevaux", avec "Vingt kilos sur le dos / ma sueur soignant mon âme", et de belles gravures de Gérard Hutt et Michèle Forestier...

Le volet "Relâche" se présente (toujours sur la luxueuse double page de photo) comme "cabinet curieux, lieu de la friction, du mélange des genres, de l'insolite, espace du jeu et de la bigarrure, îlot désemparé, oeuvre vive, carène fissurée". Y sont proposées de curieuses recommandations de Roy Chicky Arad, traduit par Marianne Louis, desquelles nous relevons celle-ci (pas la plus étrange !) :

 

Je conseille à mes lecteurs

de s'asseoir près de la fenêtre

et d'éviter la guerre par tous les moyens

il n'en sortira rien de bon

et évitez aussi les luna parks. Ça ne vaut vraiment pas

le déplacement (...)

 

On y lit aussi la biographie fantaisiste d"une imaginaire Lisette Poupidor par Alexane Aubane, de vrais textes d'un illustre inconnu ou de Pierre-Albert Birot, dans un article intitulé "De REVU à revue SIC (1916-1919)" - frère aîné revendiqué, donc, et dont  l'importance et l'originalité ne sont  pas à démontrer, cette publication ayant accueilli - mais qui l'ignore? - Philippe Soupault, Pierre Reverdy, Gino Severini, Pablo Picasso, Blaise Cendrars, Tristan Tzara...

Le "dossier" quant à lui interroge l'état et la variété de la poésie contemporaine, à l'ère des nouveaux médias en particulier, en présentant un aperçu des différentes directions où s'aventure la poésie – des recherches formelles renouant avec la tradition, aux nouvelles formes à lire et écouter... Il s'ouvre sur un texte de Chloé Charpentier, "La Poésie est un jardin". La métaphore qu'y file l'auteure s'accompagne d'une "bibliographie verte" citant Le Jardin Perdu chez Actes Sud (2011), et les ouvrages des poètes cités au cours de l'article (Gilbert Vautrin, Gilles Baudry, Tahar Ben Jelloun).

Suit un écrit de Mathieu Olmedo consacré à "La Sorgue en Kayak avec Dom et René Char" – texte sur la parole "percutante" du poète, et son intérêt pour le monde végétal... tempéré par les considérations de Dom, lors de la descente en kayak annoncée dans le titre, considérations qui permettent à l'auteur d'aborder l'intérêt des aphorismes du poète, avant de se conclure sur un bel hymne à La Sorgue, dont les vertus "sont semblables à celles de la poésie. Lié au mouvement et au jaillissement, le poème est comme le cours d'une rivière, un cri propice à l'abandon, au brouillard, au sinueux, à l'incomplet (...). C'est un très beau texte, très géopoétique, que je relirai volontiers - j'y laisse un marque-page (et pour rester dans l'humeur générale de ce numéro horticole, je choisis plutôt d'y mettre une fleur séchée).

Etonnant dans ce dossier, également, la "recette" pour réaliser un iris en origami (ainsi s'explique la feuille pliée étrangement collée à la fin du numéro, où se lisent les mots du poème qui n'apparaîtra qu'une fois  le pliage réalisé – très poétique idée due à Théo Maurice). Le dossier contient aussi  une série de dessins et photos de paysage "déshabités" (si l'on me permet le néologisme), et un texte d'ana nb intitulé :"(images et sons captés lors d'une contemplation dans un jardin sauvage)" - il s'agit du listage (accompagné de chiffres dont j'ignore le sens) entrecoupé de paragraphes/strophes décrivant le parcours de "il", jardinier-bourreau des fleurs rouges qu'il écrase, et la surprise du lecteur/auditeur sans doute habituellement, à la lecture de la dernière strophe. Il se clôt sur une double page intitulée "photosynthèse", sorte de planche botanique, fort scientifique et délicieusement dessinée, faisant naître - comme d'un arbre généalogique - depuis des racines "Baudelaire, Hawad, Ronsard", ou Vivaldi ou Dalida... en passant par les branches de toutes les rencontres inspirantes,  l'oeillet de poète sauvage que nous rêvons tous de cueillir.

 

Le voyage se termine, avec "Situations", par une invitation au voyage – à la découverte du poète vénézuelien Miguel Bonnefoy, mais aussi par un historique du fascinant voyage dans l'espace et le temps du quinquina, par Samir Boumediene, et un série de brefs poèmes bilingues de Omar Youssef Souleimane, traduit de l'arabe par Caroline Boulord et l'auteur. On apprécie la générosité qui fait que ces poèmes, en bas de page, laissent tout l'espace ivoire au lecteur pour rêver dans cette immense marge, si rare dans l'édition.

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dans-un-livre-de-botanique
©mbp




La revue AYNA

À l’heure actuelle, il n’existe pas sur le web français de site spécialisé qui fasse connaître la poésie turque contemporaine. Le public français a de plus en plus d’intérêt pour les romans turcs, l’augmentation du nombres de romans traduits en français le montre, mais il ne dispose pas de suffisamment d’ouvrages pour avoir un aperçu de la création poétique turque.

Ayna signifie miroir en en  turc. La revue se veut en effet le miroir de la poésie turque en direction du public francophone. Le fait que la revue Ayna soit  en version bilingue franco-turque et qu’elle présente les textes en langue originale lui donne également la vocation d’être un lieu miroir entre les langues et les cultures.

 

Ayna est une revue qui permet à tous, francophones ou turcophones, d’avoir accès à un panel de poètes contemporains reconnus. Elle a été créée en 2013 par Claire Lajus, traductrice et poète.

Cette revue numérique est gratuite et met en ligne des poèmes originaux, leurs traductions, leurs enregistrements sonores et des entretiens avec les poètes. Elle met également à disposition du public l’actualité des événements poétiques en Turquie et donne des focus sur certains poètes ou ouvrages.

Vingt  poètes sont actuellement présentés dans la revue. Des lectures publiques sont aussi organisées pour apporter la parole des poètes au plus près des gens.

Ayna a pour objectif à moyen terme de présenter une base de données suffisamment importante pour constituer un espace de référence pour toutes les personnes intéressées par la poésie turque.

 




Les carnets d’Eucharis (portraits de poètes vol. 2)

Dernier opus annuel version papier, suite du numéro « portraits de poètes vol.1 » paru en 2016. C’est Gustave Roud qui se fait tirer le portrait avec les honneurs. La couverture nous invite à un plongeon en des eaux qu’on devine accueillantes malgré l’inconnu sous la surface. Comme toujours, en plus de poésie, il est question d’arts visuels pénétrés en mots et en images. Et cette « entrée dans l’eau » imprime tout son mouvement en portfolio par la maîtresse des lieux, Nathalie Riera. Les rédacteurs habituels, Richard Skryzak, Martine Konorski, Laurence Verrey, Alain Fabre-Catalan, Tristan Hordé, Angèle Paoli, Claude Brunet… mettent leur savoir-faire et leur inspiration au service des divers portraits, entretiens et traductions (3 poètes italiennes).

Les Carnets d'Eucharis, Portraits de
poètes vol.II / 2018: "Gustave Roud"

 

 

Un travail grâce auquel des auteurs vivants et très actifs en côtoient d’autres disparus, tels que Marina Tsvetaïeva, Armel Guerne ou Czeslaw Milosz, dont la singularité de leur écriture comble un lectorat qui subsiste – faut-il le rappeler ? « A claire-voix », quête, fondements et genèse des écrits chez Julien Bosc, Brina Svit ou Esther Tellerman (souriez, vous êtes filmés !). Chacun, à sa manière, tente de faire ressortir du poème la portée universelle de sa problématique. C’est entre pudeur et besoin de révélation que sont évoqués ces ferments nécessaires que sont traumatismes et blessures internes.

« Au pas du lavoir » propose des poèmes de gens plus ou moins connus sur la place (de Rodolphe Houllé à Hélène Sanguinetti, de Jean-Paul Lerouge à Isabelle Lévesque). Le dossier consacré à Gustave Roud foisonne. Pas moins de quatorze auteurs (dont James Sacré, Nathalie Riera, J-C. Meffre… L. Verrey et A. Fabre-Catalan, tous deux coordinateurs du dossier) pour donner envie de lire l’auteur suisse (donc à part), cerné par ses tropismes bucoliques aptes à faire rimer Amour et Nature sous une résonance parfois élégiaque. Idyllique, champêtre sont des adjectifs qui reviennent à propos de l’œuvre du poète vaudois – néo-romantique ? Traducteur de Rilke, Hölderlin, Novalis ou Trakl, son travail « s’apparente à la lente approche d’un paysage », il aura influencé Philippe Jaccottet, Anne Perrier ou Maurice Chappaz, pour ne citer que ses pays. Il faut évoquer enfin Roud photographe (avec quelques reproductions ici), amoureux aussi de la peinture ; celle de Gérard de Palézieux notamment en laquelle il se retrouvait, comme en témoigne leur échange épistolaire qui dura 25 ans jusqu’à la mort du poète en 1976. Deux autres artistes moins connues sont également mises à l’honneur. Nancy Cunard, poète d’origine anglaise, également éditrice, maîtresse d’Aragon (dur métier !), ayant fui son milieu social aussi argenté qu’étriqué à tant d’égards. Elle y répondra par son engagement militant pour la cause afro-américaine et afro-européenne discriminée comme on le sait dans le monde occidental et contre la montée des totalitarismes de l’époque. Sa  Negro anthologie  de 1934, au faible retentissement alors, se voit re-publiée en 2018 aux nouvelles éditions J. M. Place en fac-similé, « augmentée d’un appareil critique ».

Charlotte Salomon ferme ce trio d’honneur du numéro : « jeune peintre allemande morte en 1943 dans le chaos du nazisme », par ailleurs soumise au germe héréditaire de la folie. « Liberté de ton » et « audace ironique » caractérisent ce jeune tempérament bien trempé de son temps qui laissera à la postérité un millier de gouaches et un livre (graphique) intitulé  Vie ? ou théâtre ?, publié en français aux éditions du Tripode en 2015 où l’histoire de sa vie est peinte et dépeinte. On retiendra la suite de la « conversation autour du poste de télévision » amorcée dans le numéro de 2017 entre Alain Bourges et Richard Skryzak, le second interviewant le premier, cette fois-ci sur son œuvre écrite. On disserte entre autre sur la façon dont la réalité est finalement aussi indexée sur l’imaginaire que l’inverse, prétexte à organiser sa vie tout en résistant « à la soumission ou la folie ». Au bout du compte, un numéro qui confirme son foisonnement éclairé, à aborder par où l’on veut. D’un mot une image, d’une image la sensibilité du lecteur qui s’anime et glisse entre les disciplines, pas si éloignées que ça les unes des autres.




Revue Florilège

Une revue certes d’allure tout à fait classique. Un format A4, une couverture qui présente un paratexte qui appartient au genre. Les rubriques sont elle aussi attendues, mais quelle richesse, dés l’ouverture, une foison d’articles, de rubriques, et, surtout, de poèmes ! 67 auteurs, dont les noms s’égrainent dans la rubrique « Les Créations ». Des noms connus ou moins, des poèmes qui se suivent mais qui sont mis ne pages de manière rythmée et attractive.

Florilège, revue trimestrielle, n °168,
septembre 2017.

A cette manne de textes et de références se mêlent d’autres rubriques, après l’éditorial. Des articles et des « Chroniques et  notes de lecture ». Les pages de fin sont consacrées à la présentation des recueils fraîchement parus, à la vie associative, et offre le portrait d’artistes qui présentent succinctement leur activité.

Revue trimestrielle oblige, l’épaisseur informationnelle est au rendez-vous. Et étant donné la multiplicité d’informations et d’auteurs publiés, il serait aisé de basculer dans la catégorie des revues indigestes, désordonnées, brouillon…Ce n’est pas le cas ici. Tout est plaisant, attirant, mis en valeur, et surtout d’une densité inégalée. Un numéro à emporter pour les longs trajets, ou bien pour passer quelques heures dans cet univers de la pôésie, servie ici par une belle esthétique, et un vive intelligence quant au propos retenus.




Revue “Reflets” numéro 28 — dossier spécial “Poésie”

Revue tourangelle qui s’applique à « donner du sens aux événements », le magazine d’actualité et de société dirigé et animé par Thérèse et Christian Roesch n’est PAS une revue littéraire. Il nous semble d’autant plus nécessaire d’en parler, puisque – chose rare dans la presse généraliste -  le numéro d’été consacre un dossier complet à la poésie (pp. 32 à 65, près de la moitié de la publication !), largement ouvert à ses dimensions spirituelles.

Quatre volets (ouverts par une pleine page illustrée à la fois par une image et une citation) à ce dossier : le premier – «S’émerveiller » - donne la parole à Christian Bobin (déjà sujet d’un entretien dans le numéro 14 de la revue) en publiant le fac-simile d’une lettre olographe et de larges extraits du Plâtrier siffleur, illustrant la thématique « poésie et contemplation », suivis d’un article de notre collaborateur Pierre Tanguy sur le haïku, accompagné d’exemples tirés de la tradition, de la propre production de l’auteur et d’écrivains contemporains.

La deuxième, sous le thème de la renaissance par la poésie, propose un entretien avec Brigitte Maillard, dynamique éditrice de « Monde en Poésie » (( https://mondeenpoesieeditions.blogspot.com/ )) qui a collaboré à l’élaboration de ce dossier, et un article sur le livre Jacques Lusseyran, Le monde commence aujourd’hui, en Folio-Gallimard, livre retraçant le parcours de ce héros de la résistance pour lequel la poésie a le pouvoir « d’exprimer l’indicible du pire ». Des pages sont consacrées à Apollinaire, mais aussi à Desnos et Aragon, et présentent un extrait de l’ interview de Stéphane Hessel réalisé par Brigitte Maillard pour Aligre FM en 2011 – deux ans avant la disparition de ce militant des droits de l’homme, revenu des camps et témoignant de l’importance de la poésie dans son combat de survie (( on peut citer Ô ma mémoire : la poésie, ma nécessité , 88 poèmes publiés au Seuil en 206 et republiés en 2011)).

« Les Enfants sont des poètes » est le troisième élément de ce dossier avec un article de Jean-Luc Pouliquen (dont le dossier reprend le titre d’une publication) et des textes d’écoliers avec leur questionnement sur l’utilité de la poésie. Enfin, des propos de Laurent Terzieff, une interview de Gilles Baudry, moine-poète, et un poème bilingue de l'américain Joe Z. (Zarantonello) ferment ces pages sous l’intitulé « L’Invisible devient visible ».

Reflets, n. 28, dossier poésie « Dire l’indicible »,
juillet-août-septembre 2018, 7,90 euros.
Disponible dans les kiosques, 
la revue peut-être commandée directement
sur le site. Site de la Revue Reflets




Les Revues “pauvres” (1) : “Nouveaux Délits” et “Comme en poésie”

Ce n’est certainement pas à l’excellent qualité des contenus et des projets  que renvoie le terme « pauvre » - mais comme pour ce qu’on nomme « l’art pauvre », je voudrais par ce titre souligner l’inventivité, les maigres ressources (les abonnements et l’investissement bénévole des revuistes), et ce génie de l’utilisation des bouts de ficelle qui permet de concocter des revues ne le cédant en rien aux plus connues, mais qui vivent à la marge, en raison de la confidentialité de leur diffusion.

« Nouveaux Délits, revue de poésie vive » en est un excellent exemple : de petit format (une feuille A4 pliée en 2), agrafée sous une couverture rousse, il offre 54 pages d’excellente poésie accompagnée d’illustrations en n&b – un illustrateur différent invité pour chaque numéro -  imprimée sur papier recyclé : « Du fait maison avec les moyens et la technicienne du bord, pour le plaisir et le partage. » ainsi que le déclare la maîtresse d’œuvre, la poète Cathy Garcia, qui mène contre vents et marées cette entreprise depuis 15 ans, et à laquelle je cède la parole en recopiant l’édito du numéro 60, dans lequel on lit l’enthousiasme et les difficultés de l’entreprise : 

"Eh bien, voilà un numéro qui n’a pas été simple à réaliser, il a fallu que je m’adapte aux circonstances assez pénibles et aux données qui m’étaient accessibles. Aussi Je profite de cet édito pour remercier infiniment celles et ceux d’entre vous qui ont pu répondre présent(e)s à mon appel à soutien pour le rachat d’un nouvel ordinateur, indispensable, le mien ayant pris définitivement congé après une dizaine d’années de pas trop mauvais services. Merci donc, d’ici quelque temps, une nouvelle machine devrait permettre de poursuivre l’aventure dans de bonnes, voire de meilleures conditions et aussi de stocker à l’abri, entre autres, 15 années de Nouveaux Délits !

Nouveaux Délits, numéro 60, avril 2018 , non paginé (54 p. environ), 6 euros (plus port, 1,50),
ou par abonnement via le « bulletin de complicité » (chèque de 28 euros pour 4 numéros) –
infos et adresse sur le site web 

 

Ce n’est pas quelque chose sur quoi j’aime m’étaler mais il faut savoir peut-être que si cette revue existe, c’est par une sorte de passion entêtée de ma part, car elle est réalisée (volontairement) sans subvention et bénévolement, dans un contexte de précarité permanente, qui a d’ailleurs tendance à s’accroître d’année en année et ce numéro 60 a eu un accouchement particulièrement difficile. Cependant, je crois bien qu’au final, c’est un beau bébé ! Un peu étrange, douloureux même, mais riche de toute sa complexité humaine et de cette énergie qui passe dans les mots, qui les traverse et parfois nous transperce, cet appel d’air, ce désir indéfinissable de saisir, en nous et hors de nous par les filets de la parole, ce qui le plus souvent demeure insaisissable."

 

Feuilletons ensemble ce numéro fatidique : après l’édito que nous venons de citer in extenso, le sommaire : 7 poètes pour cette livraison, dans une partie intitulée « Délit de poésie » puis deux livres présentés dans la rubrique « Résonnance ». Suit la mention intriguante « Délits d’’in)citations percent la brume des coins de page » : en effet, la revue est ponctuée de citations plus ou moins longues, dans l’angle des pages non numérotées : on trouve dans ce numéro un proverbe russe, Victor Hugo, Daniel Biga, un haïku de Sôseki… ou encore – en écho au poème de Valère Kaletka, « Le lieu », cette phrase de l’humoriste Pierre Doris : « C’est très beau un arbre qui pousse dans un cimetière. On dirait un cercueil qui pousse ». Car l’entreprise de Cathy Garcia, on le comprend vite, n’est pas dépourvue de cette distance souriante, qui lui a fait choisir le titre provocant de cette publication, liée à l’association et aux éditions Nouveaux délits, à Saint-Cirq Lapopie – rien de moins : revue pauvre, peut-être, mais au moins sous le regard tutélaire d’André Breton, qui y a séjourné après y avoir acheté une maison en 1950. D’ailleurs, si elle invite le lecteur à s’abonner, elle le fait en dernière page avec un « bulletin de complicité » qui vous propose de « blanchir (votre) argent en envoyant (votre) chèque à l’association – et comment résister à cet appel à soutien, lorsqu’on a pu constater la variété des textes publiés ? Dans cette livraison, outre Valère Kaletka, Pierre Rosin, dont on suit le parcours de peintre-poète dans Recours au Poème également, et dont je relève le post-scriptum à l’un de ses textes : « PS : nous pourrons garder les poètes et les peintres à condition qu’ils sachent jardiner ». Puis Daniel Birnbaum, Joseph Pommier, Florent Chamard, dont on peut écouter deux textes lus par Cathy Garcia sur la chaîne youtube « donner de la voix » 

Puis Vincent Duhamel avec quelques proses poétiques, et Antonella Eye Porcelluzzi, dont la biographie succinte nous amène sur google à regarder les films ou écouter à travers la voix de Cathy sur la chaîne associée à la revue

Vous ne connaissez pas la plupart de ces noms ? C’est qu’ils ont surtout publié en revue, et que les éditeurs ne les ont pas encore rencontrés, mais parcourez donc, sur le site, la liste des poètes publiés par la courageuse revue Nouveaux Délits – et : bonne découvertes !

L’indescriptible désordre de mes rayons ne me permet pas de vous présenter le dernier numéro de Comme en Poésie, revue arrivée à l’âge respectable de 74 numéros (soit 18 ans) – glissé sous une pile, d’où il sautera comme un diable quand je n’en aurai plus besoin, prêté et non revenu… qui sait le destin des livres, revues et brochures qu’on ne sait pas ranger comme dans les bibliothèques dont on rêve et qu’on voit derrière les écrivains qu’on admire…  Vous aurez donc la possibilité de découvrir le numéro de mars 2018 en attendant que l’autre pointe le bout de sa couverture pour me narguer – mais chut !

Jean-Pierre Lesieur, seul maître à bord, enjoint ses lecteurs et potentiels abonnés à avoir de l’humour car « ça ne coûte rien » . Voici comment il présente sa revue en troisième de couverture (car aucun espace n’est laissé vierge dans cette publication abondante, nourrissante – enfin, pour le lecteur, pas pour le poète ni pour le revuiste) :

 

 

Comme en poésie, n. 73, trimestriel, 80 p.
(revue seule, 4 euros, abonnement 1 an, 4 numéros, 15 euros –
730 avenue Brémontier, 40150 Hossegor –
informations sur le site de la revue « sur papier et par internet »

« La revue est entièrement pensée, fabriquée, envoyée, par Jean-Pierre Lesieur. Vous ne la trouverez nulle part ailleurs que par abonnement. Ne la cherchez pas dans les librairies ni dans les grandes surfaces. Si vous y voyez Lesieur ce n’est pas la revue, c’est une bouteille d’huile. »

 

Introuvable, c’est vrai : je l’ai découverte jadis, sur le marché de la poésie Saint-Sulpice, à l’époque encore bénie où son éditeur, pauvre,  était invité à partager un coin de stand dans l’angle des revues… Ce n’est plus le cas, et c’est bien dommage, car cette publication mérite d’être lue, non seulement parce qu’elle permet à des poètes de faire leurs premières armes, mais aussi parce qu’elle offre de beaux textes, de belles illustrations, et de belles signatures. Car Jean-Pierre Lesieur l’annonce : «( on ne fera) pas d'exclusive poétique, mais recherchera une qualité d'écriture et d'originalité en faisant la chasse aux clichés, redites, traces informelles, doublons, minauderies, copies, piratage..“

Mais feuilletons ensemble ce numéro auquel ont participé pas moins de 30 poètes, parmi lesquels Gérard Mottet, Claude Albarède, Werner Lambersy… Feuilletons, avec quelque précaution : reliés sous sa couverture cartonnée thermocollée, on craint que les pages ne s’envolent avec les poèmes – mais non : l’artisan a bien tout soudé, et dans l’ensemble, ça résiste à plusieurs manipulations.  Comme la est aussi ouverte à différentes formes d'écritures, de dessins, de photos, de chanson, de performances, de mail art, de petites annonces humoristiques, de contes, de nouvelles, etc., Outre les poèmes, j’y découvre des illustrations, en noir et blanc et en couleur (4 pleines pages, dont deux consacrées aux photos d’Eliane Morin, illustrant le poème d’Evelyne Morin sur le « Chemin des Dames, 1917-2017) – et une couverture toujours magnifiquement illustrée d’un collage, d’une photo…), et une carte illustrée dont on comprend l’usage dans la rubrique du même nom : les lecteurs sont invités à légender les saynettes proposées. Dans le numéro 73, au centre, une dame en sous-vêtement 1900 parle à un monsieur en costume de  tweed qui semble bien furieux, tandis qu’un élégant à monocle renfile sa veste sur sa droite. Les deux pages nous proposent les légendes envoyées à propos de l’illustration du numéro précédent : une dame assise sur un sofa, dont on ne voit que l’énorme chignon démodé s’adresse à un homme aux cheveux longs assis à ses pieds … un peu George Sand et Musset… Parmi les légendes, je relève celle de Claude Albarède : « Poète ami des mots, des vers, des haïkus / reprends ta plume en mai, reste pas sur le cul / et quand tu seras las d’avoir poétisé / laisse tomber ton luth, et viens donc me baiser ! »

Aux poèmes s’ajoute une rubrique « pot-au-feu » dont le titre indique à tout cuisinier digne de ce nom qu’elle se compose d’un peu de tout, dans un esprit popote et bon enfant. Ici, des réflexions sur la poésie, les aléas des réabonnements, des aphorismes : « Il est mort des suites d’une longue maladie qui l’emporta tout de suite ».

Le tout ne serait pas complet sans les lectures Jean Chatard, et la « cité critique J.P.L » petit parcours personnel qui présente des livres et ici  également une série de petites revues dont on se dit qu’il serait temps de les lire aussi : Le Pot à mots, Friches, Spered Gouez…

 

 

Et pourquoi ne pas commencer par vous abonner à Comme en poésie ?  Vous faites une très bonne affaire, et une bonne action – et à défaut du numéro 74, dont  j’attends le retour, pour vous donner une idée de ce qui vous attend, voici son sommaire : 

 

Page 1 : UN NOUVEL ÂGE par jpl
Page 2/7 : Antoine JANOT
Page 8/17 : Faustin SULLIVAN
Page 18/19 : Silvaine ARABO
Page 20 : Gérard LE GOUIC
Page 21 : Ferruccio BRUGNARO
Page 22/26 : Jacques LALLIÈ
Page 27 : Guy CHATY
Page 28/30 : Claude ALBARÉDE
Page 31/33 : Colette DAVILE-ESTINÉS
Page 34 : Pierre BORGHERO
Page 35 : Ludovic CHAPTAL
Page 36/37 : Sylvain FREZZATO
Page 38 : Basile ROUCHIN
Page 39 : Èvelyne CHARASSE
Page 40/41 : Georges CATHALO
Page 42/43 : Jean CHATARD
Page 44/45 : Patrick PICORNOT
Page 46/47 : Aumane PLACIDE
Page 48/49 : Werner LAMBERSY
Page 50/53 : Cartes lègendées
Page 54/55 : Bastien MARIN
Page 56 : Françoise GEIER
Page 57 : Èmilie NOTARD
Page 58/59 : ALAIN JEAN MACÈ
Page 60/61 : Bernard PICAVET
Page 62/63 : Mireille PODCHLEBNIK
Page 64/65: Vincent CADET
Page 66/67 : Dominique MARBEAU
Page 68/71 : Jean CHATARD 
Page 72 : Claude ALBARÉDE
Page 73 : POT AU FEU
Page 74/76 : LA CITÉ CRITIQUE
Page 77 dénis parmain
Page 78 : Jacques BONNEFON
Page 79 : Luc ALDRIC
Page 80 : ADRESSES REVUES




Résonance Générale

La dernière livraison de la revue, dirigée par Serge Martin, Laurent Mourey et Philippe Païni, s’accompagne d’un billet de l’éditeur annonçant la fin de cette aventure éditoriale – ce dont tout lecteur se désolera, autant en raison de la qualité des contenus que de l’élégance de cette publication en cahiers cousus, façonnés de façon traditionnelle, et imprimée sur un beau papier ivoire.

Ce qui caractérisait (il me pèse de l’écrire au passé) l’esprit de Résonance générale, c’était son « refus de la séparation lire-écrire-penser-vivre » - refus également de la séparation entre poème et théorie, d’où le sous-titre cahiers pour la poétique

S’ouvrant sur un édito commun des « rédacteurs de la revue » intitulé « Manifeste continué », chaque livraison regroupe les textes en diptyque ((on en trouve la liste sur le site de l’éditeur, avec la possibilité d’acheter les numéros restant, ainsi que le numéro 10, qui clôt la série, au prix exceptionnel de 10 euros  )) dont les titres sont repris sur la couverture.

« Insaisissables danses, tes miracles » annonce le numéro 8, qui présente des textes de Charles Pennequin, Matthieu Gosztola, Alfred Jarry, Thierry Romagné, Frédérique Cosnier, Guy Perrocheau et Serge Riman, ainsi qu’un cahier de photos noir & blanc d’Adèle Godefroy.

Le poétique « manifeste » - rien d’explicatif, dans ces textes liminaires que le lecteur reçoit comme un poème-essai en prose d’ouverture – est inscrit sous l’égide des danseurs de L’Iliade (livre XVIII) et cite, outre Georges Did-Huberman Patrick Boucheron et Alice Godfroy. Je retiens ces lignes du premier: « N’est pas n’est que pas dansé-mouvant et c’est ce qui fait corps et phrase /En longueurs inégales pas en ressac non plus dans les rythmes la fibre (…) » et  ce passage dont la résonance me met en condition d’accueil des textes et poèmes qui suivent :

 tout ce qui fait consonance est la meilleure voie vers la nuit

la solitude et le silence sans aucune servitude dogmatique

pour déployer l’espace intérieur d’une danse même dissonante

où s’entend toujours la pluralité des corps vifs ou morts 

Résonance générale : cahiers pour la poétique,
revue semestrielle, numéros 8 et 9
L’Atelier du grand tétras, 128 p, 12 euros.

 

*

C’est par l’intermédiaire de Théodore de Banville que « La Ronde des nuits debout » dans le numéro neuf, se place elle, sous le drapeau de l’insurrection ; patronage dont la surprise se dissipe dès l’abord : il s’agit du poète des « heures heureuses » sous l’égide duquel se place l’édito jubilatoire et critique. On y souligne ce qui fait l’originalité de la revue : son côté collectif, sans revendication d’ego – un collectif dans lequel le poète, parce qu’il incarne la marge, a sa place pour « mettre le doigt là où ça parabole » - faire sens avec les événements, entraînés dans « la rOnde » (sic) qui clôt aussi la livraison de façon tout à fait exemplaire. Françoise Delorme, Rolf Doppenberg, Nathalie Garbelli et Isabelle Sbrissa se sont engagés dans un échange circulaire de poèmes – « une écriture singulière et collective, une ronde poétique qui se construit au fil des textes et que nous envoyons dans des enveloppes timbrées » entre le 23 mars 2015 et le 21 septembre 2016, nous donnant à lire seize textes librement inspirés les uns des autres, par un jeu de déplacements, d’échos et de résonances, qui suscite des parcours ludiques de lecture – jeu dont on aurait aimé qu’il se prolonge, comme ce flux souterrain évoqué dans le dernier courrier :

 

et la rivière souterraine

comme une Durance d’en bas,

une durance sous-sol 

toute une Provence phréatique s’abouche à la mer

durance de fond

ses eaux douces viennent se mêler à l’eau de mer

même son embouchure est sous les eaux 

 

Entre les deux – le manifeste aux couleurs de révolte, et la confluence imaginaire de cette durance poétique – on découvrira une série de réflexions sous forme de poèmes d’Arnaud Le Vac.  « Une vie humaine » interroge les idéologies de notre siècle, les désastres du précédent, et sous le titre « Soleil, cou coupé » (où l’on reconnaît le dernier vers de Zone, d’Apollinaire ), interroge la fonction de l’artiste ou du poète :

 

« Pas d’erreur sur l’heure,

c’est de ce siècle

que l’on voit et parle aujourd’hui.

D’un sujet autrement

souverain.

Et de ce qu’il aura fallu vivre :

l’esprit en fuite,

le rire en tête,

la vie dans tous ses états,

pour reconnaître et célébrer

ce qui importe. »

 

Guy Perrocheau, Angèle Casanova (avec dix poèmes autour de « pandore eve épouse de Barbe bleue » et de la tentation scopique), Chantal Danjou, dont on relève la magnifique image « l’Horizon est le chien rouge qui s’approche de la nuit », Marie Desmée et le texte d’Alexis Hubert sur les lavis de Philippe Agostini composent la première partie « des nuits debout ». Serge Ritman ouvre la seconde, consacrée à « la rOnde » déjà évoquée.

Une partie « on continue » propose, p. 112, des notes de lecture, et p. 118, Serge Martin offre aux lecteurs un texte provenant d’une journée d’études à La Sorbonne Nouvelle en juin 2017, qu’il intitule « Pasolini et le pathos ou le poème au plus près », dans lequel la philosophie qui a guidé les années « Résonances Générale » et son « énonciation échoïque » (p. 123) se trouvent magnifiées et explicitées. Je ne peux qu’inciter le lecteur de cette note à se précipiter sur le site de l’éditeur pour se procurer ce numéro et le suivant, le dix et dernier, hélas.

 

 

 




Passage en revues

Autour de Vents Alizés, Contre-Allées, Le Journal des Poètes, N4728, Soleils & cendre, Nunc, Poësis, L’hôte

Karoly Sandor Pallai, par ailleurs auteur d’essais et de poèmes, dont quelques uns ont paru dans Recours au Poème, met en œuvre une revue online Vents Alizés, dont on consultera le site de Vents Alizés((http://ventsalizes.wix.com/revue#!numéros))

 

 

Un titre qui découle de sa passion pour les littératures de l’océan Indien et du Pacifique, mais une revue qui n’est pas confinée à cet espace géographique, même si elle lui accorde une ample et belle place. On est frappé, immédiatement, dans ces presque 500 pages, par la qualité de ce qui est publié là, avec un ton ou une ambiance qui font irrémédiablement penser en effet aux vents alizés et aux infinitudes de l’océan de cette partie du monde. La revue est une partde l’océan Indien et Pacifique. Des pages fraternelles, ouvertes sur l’autre, qui justifient pleinement le titre de ce premier numéro : Partaz. Formellement, cette revue en ligne se présente et se lit comme un livre. C’est fort bien réalisé. On y lira, en diverses langues, des poètes et des écrivains originaires de l’Océan Indien (Maurice, Seychelles), de la Caraïbe et des Amériques (Canada, Haïti, Martinique), du Pacifique et de l’Asie (Philippines, Nouvelle-Calédonie, Polynésie Française, Vietnam), d’Afrique et du Proche Orient (RDC, Zimbabwe, Jordanie, Liban, Maroc, Palestine, Tunisie) et d’Europe (France, Italie).

Karoly Sandor Pallai.

On y retrouvera des poètes publiés ou amenés à l’être dans Recours au Poème, comme Sonia Khader ou Mounia Boulila par exemple. Pour ma part, ma subjectivité m’a conduit à aimer tout particulièrement les textes de poètes comme Borgella, Leonidas, Anne Bihan, Pham van Quang, Garnier-Duguy, Ben Eyenga Kamanda ou Tendaï Mwanaka. Le tout est accompagné de notes de lectures et de superbes œuvres d’art contemporaines, pour une bonne part réalisées par des artistes mexicains. Tout cela a le souffle des mondes autres, une grande respiration.

Franchement, amoureux de la poésie, vous auriez tort de vous priver de la lecture d’une revue qui nous parvient comme un don((Vents Alizés, revue semestrielle online en accès libre : http://issuu.com/pallaikaroly/docs/vents_aliz_s_-_partaz/45; Lire Karoly Sandor Pallai dans Recours au Poème :http://www.recoursaupoeme.fr/po%C3%A8tes/k%C3%A1roly-s%C3%A1ndor-pallai)).

 

 

Contre-Alléespoursuit sa belle aventure sous la houlette de son couple de créateurs/fondateurs, Romain Fustier et Amandine Marembert. Ce nouveau numéro met à l’honneur le poète Jacques Ancet, en un poème intitulé « un entre-deux sans fin » composé de sept parties. Sept, il n’est pas de hasard pour ce poème d’apparence quotidienne mais qui en son parcours conduit son lecteur vers un dévoilement initiatique du réel. Il se termine donc forcément sur une question. Viennent ensuite une quinzaine de poètes, certains présents ou à venir dans Recours au Poème(Marie Huot, Philippe Païni, Emmanuel Merle, Christian Vogels…), puis des questions croisées permettant d’entendre Luce Guilbaud, Cécile Guivarch, Cédric Le Penven, James Sacré, Anne Belleveaux, Sandrine Fay, Jean Le Boël et Jean-Louis Massot. Des personnes qui oeuvrent pour la poésie depuis belle lurette. Contre-Alléesaime aussi les autres revues, si bien que ses notes de lecture parlent de plusieurs de ses confrères, souvent en sympathie. Un beau numéro, avec la voix forte de Marie Huot((Contre-Allées, numéro 31/32, revue de poésie contemporaine dirigée par Amandine Marembert et Romain Fustier. Le numéro 10 euros. 16 rue Mizault. 03100 Montluçon, contre-allees@wanadoo.fr, http://contreallees.blogspot.fr/)).

 

Le récent numéro de ce Journal des Poètesdont nous disons régulièrement du bien, car nous nous sentons humainement proches de lui, en sa chaleur fraternelle, et loin des petits chapelles prétentieuses, est, comme d’habitude est-on tenté de dire, de fort belle qualité. On lit ici un superbe hommage de Jean-Luc Wauthier à la poésie de Richard Rognet, un dossier passionnant sur les poètes de l’Est en Belgique, concocté par Albert Moxhet, dossier permettant de lire Robert Schaus, Bruno Kartheuser ou Léo Gillessen. Puis le Journal revient sur la Biennale de Liège 2012, en donnant la parole à son président Dany Laferrière, entre autres. Et aussi, car c’est de Parole dont il s’agit, à nombre de poètes venus aux Biennales, dont par exemple Mohamed El Amraoui, Bluma Finkelstein, Anise Koltz, Jacques Rancourt, André Ughetto ou encore Shizue Ogawa (pour la poésie de laquelle j’ai un faible avoué). Trois belles pages, un poème poète. Une vraie page d’histoire. Notons aussi qu’Yves Namur, collaborateur régulier du Journal, a reçu le prix Mallarmé 2012 pour son recueil La tristesse du figuier, paru chez Lettres Vives, éditeur de haut vol. Il n’y a pas de hasard ((Le Journal des Poètes. Numéro 4/2012, 81eannée, oct-déc 2012, Jean-Luc Wauthier. Rue des Courtijas, 24. B-5600 Sart-en-Fagne. wauthierjeanluc@yahoo.fr http//www.mipah.be, Le numéro : 6 euros. Le poète Jean-Luc Wauthier, rédacteur en chef du Journal, donne maintenant des chroniques régulières à Recours au Poème. Ici : http://www.recoursaupoeme.fr/users/jean-luc-wauthier)).

Déjà le 23enuméro de N4728, belle revue, au format redevenu original, qui s’est progressivement imposée dans le paysage poétique contemporain. C’est même un des espaces parmi les plus originaux et les plus contemporains de ces dernières années. Christian Vogels, aidé d’Albane Gellé, Antoine Emaz, Alain Girard-Daudon et Yves Jouan, propose des écritures poétiques variées et ici considérées comme innovantes. Une partie des voix que l’on peut entendre ici, car pour N4728,poésie et oralité sont intrinsèquement liées, ce en quoi nous sommes bien d’accord, proviennent des lectures/rencontres de poésie contemporaine organisées à Angers par le Chant des mots, ou bien du côté de Rochefort (rien d’anodin en poésie, de ce côté de l’hexagone) et Saumur. C’est la partie « Mémoire vive », laquelle propose cette fois les voix de Edith Azam (un texte en prose, puissant, à paraître bientôt chez POL), Caroline Sagot Duvauroux (dont la majeure partie de l’œuvre, elle aussi en prose, et elle aussi de grande puissance, est publiée chez Corti) et Alexis Gloaguen. La partie « Plurielles » donne quant à elle à lire des voix diverses, lieu de l’ouverture de la revue (ce qui plaît bien évidemment aussi à Recours au Poème), et l’on écoutera avec attention les voix amies de Béatrice Machet, Matthieu Gosztola, Arnaud Talhouarn ou Mathilde Vischer.

Cette dernière donnant un ensemble qui reste longtemps présent à l’esprit. De toutes les manières, l’ensemble des pages de cette revue est d’une très grande qualité, et on lira avec attention les textes de Patrick Argenté, Estelle Cantalla, Nicolas Grégoire, Daniel Pozner, Marie de Quatrebarbes, Maryse Renard, Nathalie Riou, Pierrick Steunou, Jasmine Viguier, Jérôme Villedieu et Pierre Antoine Villemaine. La revue se clôt sur des notes de lecture choisies, en particulier au sujet d’Ariane Dreyfus, Serge Nunez Tolin et Vincent Pélissier, dont les travaux nous intéressent fortement. Puis quelques mots de Antoien Emaz au sujet de trois poètes des éditions Potentille (dont il faut saluer le beau travail), Geneviève Peigné, Philippe Païni et Albane Gellé. Un bel atelier, à visiter sans modération((N4728. Publiée par l’association Le Chant des Mots. Semestrielle. Abonnements : N4728. Madame Dandeville. 29 rue du Quinconce. 49100 Angers. 25 euros pour un an. Prix du numéro : 12 euros, N4728@zythumz.fr)).

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Le 103enuméro de Soleils & cendre, paru au printemps 2012, ouvrait ses pages au « chaos ». Venant d’une telle revue, à la fois de poésie et de recherche intérieure en poésie, on se doute que l’ordo/ordre n’est pas loin… Le sous titre, « fractation du point de vue », est, sous cet angle, très clair. Menée par Henri Tramoy et Yves Béal, Soleils & cendreémane des éditions Les Solicendristes. Ici, l’on a goût pour l’alchimie et l’hermétisme, au sens noble de ces mots/visions/expériences. Autour du chaos, on lira des textes d’une vingtaine de poètes et écrivains, parmi lesquels l’ami Matthieu Baumier (que je ne suis guère surprise de retrouver dans un tel thème d’écriture), Sylviane Werner, Daniel Thürler, Philippe Jaffeux, Jean-Guy Angles, Henri Tramoy ou Jacques Laborde. Une revue ancrée, située, et qui a un ton. Un vrai ton. Et une histoire, maintenant((Soleils & cendre. Henri Tramoy. 99 bd des Mians. 84260 Sarrians. Le numéro : 6 euros. Revue trimestrielle. solicend@orange.fr, http://www.soleils-et-cendre.org/)).

Ce nouveau numéro de l’exceptionnelle revue Nuncrend un bel hommage à la poésie de Jean Mambrino, lequel nous a quittés il y a peu. Trois textes reviennent sur le poète, signés Pascal Boulanger, Claude Tuduri, en forme de poème, et Jean-Luc Maxence. Tous insistent sur la luminosité chrétienne de l’homme et du poète. Le texte de Maxence, intimiste, touche juste, me semble-t-il, en évoquant chez Mambrino la part du feu, le néoplatonisme. Il y a avait une certaine idée de la Renaissance chez ce poète. Vient ensuite le dossier central de ce numéro de Nunc, un dossier « cinéma »… en apparence ! Car évoquer le cinéma de Béla Tarr, ce n’est pas uniquement, loin de là, parler de cinéma.

C’est parler de poésie. Parler du Monde. Le dossier est dirigé par Hubert Chiffoleau. On lira la retranscription d’un échange entre le réalisateur et son public, passionnante, ainsi que des textes de Joël Vernet, Hubert Chiffoleau (entretien), Jérôme de Gramont, David Lengyel. Ce dossier fait immédiatement référence. Et, sincèrement, lecteur qui aime la poésie puisque tu lis ces lignes, si par malchance tu ne connais pas encore le cinéma de Béla Tarr, le moment est venu d’une découverte, de celles qui marquent une existence.

Nuncpublie aussi une suite de très beaux poèmes de François Bordes, sous le regard de l’Evangile de Thomas, souvent considéré comme « l’Evangile des gnostiques » mais la formule est trop rapide, comme bien des formules. Qui lit ce texte en sait les profondeurs ésotériques. On parle ensuite de Virgile, de diverses manières (Madeleine Désormeaux, Jérôme de Gramont), puis on replonge dans des poèmes, ceux de François Amaneger, avant d’entrer dans la partie « Axis Mundi » de la revue, centrée sur un cahier consacré à Michael Dummett. Deux textes signés Michel Fourcade et Christine van Geen, puis un texte de Dummett. Tout cela est déjà fort riche et n’est cependant pas terminé, car Nuncest un « monstre » comme Recours au Poèmeles aime : un entretien avec Jacques Arènes, des poèmes de Borges (ceux sur Spinoza) dans une nouvelle traduction, un texte important de Franck Damour au sujet de la récurrente controverse autour de la fonction anthropologique du droit et de très beaux poèmes de Christophe Langlois, poète que l’on retrouvera aussi bientôt dans Recours au Poème. Les notes de lecture évoquent enfin Gamoneda, Bocholier, Marion, Del Valle… Ici, en cette revue, les choses sont centrées, et cela est bien((Nunc, revue attentive n° 29. Le numéro : 22 euros. www.corlevour.fr))

Poësis n’est pas une revue au sens strict de ce mot mais il me plaît d’en parler ici. Il s’agit d’une « petite anthologie de poèmes maçonniques » contemporains éditée par l’Institut Maçonnique de France, sous la houlette de l’ami Alain-Jacques Lacot, dans le sillage des activités menées là pour promouvoir le livre maçonnique, et donc une vision sereine d’un humanisme pour demain. Autant dire que l’on a bien besoin de toutes les énergies…Les poèmes ici regroupés sont ceux primés lors du concours de poésie organisé par l’IMF à l’occasion du dixième salon maçonnique du livre de Paris. 20 textes en tout, ponctués par un superbe cadeau d’un poète que nous aimons beaucoup dans les pages de Recours au Poème, Jacques Viallebesset, poème intitulé La tribu nomadeque nous donnerons à lire dans quelques temps.

On lira dans cet ensemble des poèmes divers, ancrés dans une profonde quête spirituelle et intérieure, en particulier ceux de Jean-Philippe Ancelle, AxoDom Yves-Fred Boisset (par ailleurs directeur de la revue martiniste L’initiation), Marc de la Paix, Jacques Fontaine, Thierry Maillard… Tout cela est d’autant plus important qu’il est évident que poésie, ésotérisme et maçonnerie appartiennent au même Corpus d’être. On espère voir l’initiative se développer, et cette autre anthologie de la poésie maçonnique autrefois parue chez Dervy connaître une nouvelle édition « allongée ». Ici, nous ne manquerons pas d’idées et de liens vers des poètes profonds à conseiller. On peut demander mon email à la rédaction, ce sont gens courtois. Ils transmettront, si j’ose dire((Poïesis. Petite anthologie de poèmes maçonniquesPublication de l’Institut Maçonnique de France http://www.i-m-f.fr/)).

 

Bienvenue à L’Hôte ! Il faut, de tout temps, saluer l’initiative de se lancer dans la création d’une revue. C’est un acte nécessaire et, cela n’est pas rien, formateur. L’Hôteest sous titrée « Esthétique et littérature », et n’est donc pas centrée sur la poésie. Mais elle mérite le salut. Le sommaire s’ouvre sur sept pages de textes du poète Gérard Pfister, par ailleurs directeur des excellentes éditions Arfuyen. Le ton est ainsi donné. Vient ensuite un texte très intéressant de Didier Ayres au sujet du narcissisme de l’auteur de théâtre, une étude de Gabrielle Althen sur Jean Fouquet… Une revue d’esthétique sans doute, mais pas seulement. On sent dans ces lignes la volonté de quitter les terres convenues de certaine esthétique presque officielle, et de reposer une vraie question : celle du Beau. Cette revue n’est donc pas « de poésie » mais l’acte, lui, est poétique. Longue vie((Revue L’Hôte. Numéro 1. Direction : Yasmina Mahdi, Ivan Darrault-Harris, Didier Ayres, 27 rue Lucien Dumas. 87200 Saint-Junien. Le numéro 5 euros. didier.ayres@free.fr)).