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Christiane Prévost, Poèmes

JONCS

Les joncs allongés
Ploient sous le vent
Quel est ce mystère
Le silence du lieu déserté
Quelle est cette lumière
Qui se dresse dans ces lieux aimés

Les joncs ploient sous la lumière
Quel est ce calme
Qui achève de cimenter ces ruines
Et ce fleuve englouti

Les strates
O lumières
Dans les couches de terre
Qui recouvrent ses yeux

 

IVAN

Près de la mer
Les sabres sont levés

Les portes s’ouvrent
Dans le couronnement du siège de Kazan
Les princes asiatiques
Ont vu sous le Christ
Luire la pierre l’Orient

Ivan
Dans le couronnement des bois
Les chevaux drapés d’hermine

Ont recouvert ta chevelure
Des pierres de l’Orient
Et les pluies d’encens sur ta bouche
Ont immolé le cri du tsar enfant

 

LES HERAUTS D’ARGENT

La salle brillait des éclats de l’héliotrope
Les couverts étaient mis
Les mains gantées offraient en silence
Le témoignage de la vertu

La cape sur les épaules des chevaliers d’honneur
Rejoignait sous le cliquetis des armes
Les paroles épanouies des hérauts d’argent
Qui vêtus de leurs souliers de satin

Se répandaient parmi les tables
Pour apporter aux convives en mal d’aimer
La blancheur excessive de leur destinée

 

HIEROGLYPHES

Des perles de sang coulent de la lune tranchée
Sur la terre Sienne des regards introuvés
Luit l’hiéroglyphe secret de l’oiseau-lyre

Sur la mer calme et bleue affleure l’aigle
A la recherche de la parcelle de feu à voler aux Dieux
De son combat nocturne jaillit la lumière de la vérité déchiffrée
Les pierres parlent à travers les signes disparus de leur langage
Des temps anciens où Cléopâtre se donna la mort par amour pour Antoine
Mais aussi pour échapper à l’Empereur César Auguste venu l’emprisonner
Le serpent aspic enfoui dans les pommes dorées par le Soleil de l’automne
A fixé à jamais dans ses yeux noirs l’aveu de son serment de mourir libre
Seul l’illustre savant dans les palais des inscriptions figées
A découvert le sens secret de nos sourires inassouvis