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Christophe Gilles

Je ne suis rien. Je n’ai terminé aucune des tâches que je m’étais assignées : études en sciences, études en informatique, boulangerie, restauration… J’ai trop commencé de choses de peur de ne pas me rencontrer… Rencontre qui n’a jamais jusqu’ici eu lieu. La seule constante se retrouve dans le mensonge, art qui permet à tous de se préserver du « vivre ». L’écriture est pour ma part le mensonge dans ce qu’il a de plus sincère, de plus honnête face à l’illusion qui nous est sans cesse servie : notre métier, notre famille, notre classe sociale, nos amis… Comment ne pas soi-même mentir dans un monde aussi peu pourvu de réalité que le monde humain, et l’illusion la plus excellente réside dans le langage inventé chaque jour par nos soins. Les mots sont autant de points lumineux pour éclairer les chemins obscurs, les recoins perdus de nos existences trop vides. Chaque mot que j’aligne est un sens donné à mes propres illusions, autant de rêves et de cauchemars en proie à la traduction trop littérale du monde humain qui ne cesse de construire et de déconstruire. Voici pourquoi je n’ai eu cesse de lire et d’écrire modestement, et voici pourquoi du haut de mes quarante ans j’ai envie de partager cette part d’humanité avec mes « frères de vie ».