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Cités d’oiseaux

À E.K

 

Les oiseaux habitent en nous

avec nos morts

 

À tire d’aile

ils défrichent le silence

 

    Voix coutumières

    d’obscurs chemins de plantes

    creusés loin

    entre passé et présent



 

 

 

Les oiseaux tendent au ciel les draps

qu’ils ont lavés dans la rumeur des torrents

 

Ils les laissent sécher au soleil

avant de les rendre à la nuit et aux arbres

 

Ils font nos lits de lin

frais comme la neige



 

 

 

Dès l’aube ils s’interpellent

d’un chevet à un autre

 

    Plongent

    de fenêtre en fenêtre

    trépignent, trillent

    et tambourinent aux vitres

 

Le matin

les oiseaux tirent le vin

et défont aux branches

les rubans blancs qu’ont noués les enfants



 

 

 

Tu vis

aujourd’hui

habitant de cités d’oiseaux

bâties haut dans le ciel

 

    Les oiseaux t’y enseignent

    leur abécédaire

 

Pour toi ils inscrivent

leurs tablettes d’argile

et frappent de leur bec

à ton seuil



 

 

Ni porte ni fenêtre

au périmètre de leur rêve

les oiseaux bâtissent leurs demeures

et servent le café

sous la lune

aux étoiles voyageuses



 

 

Pas de clef ou de serrure

à l’ampleur de leurs jours

ils désherbent leurs jardins

et cuisent le pain

dans des arbres creux

puis l’offrent

aux scarabées



 

 

Sans faim ni sommeil

pour taire leur chant

ils ajustent les cordes

aux violons des orchestres

et perchés le soir à leurs pupitres

donnent le la

à des musiciens égarés



 

 

       Ni mur ni vitre

       sur son chemin

       un oiseau vient heurter

       ton miroir

       étourdi, il se lève

       le temps d’un souffle

       porté des morts aux vivants

       puis disparaît dans la lumière

 

 

livre d’artiste paru aux éditions de la Lune bleue en 2011