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Contre-allées, Revue de poésie contemporaine, N° 43, Printemps 2021

Amandine Marembert et Romain Fustier ouvrent ce numéro de printemps sur la voix poétique d’Etienne Faure. Celle-ci transite par les scènes du quotidien, se saisit des faits, événements et petites dramaturgies d’une vie ordinaire, pour laisser surgir l’émotion. L’émotion est sans doute le maître mot de sa poésie, et le poème est « passeur d’émotion » précise-t-il d’emblée dans le très court entretien avec Romain Fustier (10-11).

C’est aussi, dit-il un peu plus loin, « l’une des vertus des revues, dont on ne dira jamais assez de bien, qui mettent en présence plusieurs voix et offrent une première rencontre avec un regard autre ». C’est précisément l’esprit de Contre-Allées qui veille au respect de la pluralité des voix et genres poétiques contemporains. Ce numéro encore a fait le choix des quelques magnifiques contributions poétiques de Daniel Birnbaum, de Victor Malzac et de Benoît Reiss, ainsi que d’une suite de poèmes d’Eric Jaumier, disparu en juin 2020, dont la puissance et la vérité poétique sont saisissantes. Il nous laisse deux recueils, référencés par le comité de rédaction de la revue : Les lisières aux Éditions du petit véhicule (2019, avec Claude Margat)  ainsi que Blanc Corbeau paru en 2020 aux Éditions Jacques Brémond.

Contre-allées n°43, couverture
Valérie Linder, 48 p., 5€.

le jour ne vieillira
pas
il se met à croître

 

le soleil ne se
couchera pas

 

il veut un alphabet
de page blanche

 

des longitudes

 

là où le ciel
cri du bout des doigts

 

la mort est
ce toujours
cet artefact d’entre les voix.

 

(Le Mascaret, Zoocéphale, 18-23)

La revue se referme sur une présentation du dernier livre de Marie Huot, Le nom de ce qui ne dort pas, aux éditions Al Manar, qu’Amandine Marembert présente comme une histoire « à dormir debout », celle de la recherche d’un sommeil perdu : « j’écoute le fleuve noir - noir la nuit et noir le jour- pour connaître le nom de ce qui ne dort pas». Mais aussi celle, d’une beauté inouie nous dit-elle, de l’amour inconditionnel d’une fille à son père perdu (p 48).

Contre-Allées, revue de poésie aux airs simples et au ton juste, ne manque jamais l’essentiel, et questionne dans ce numéro le désir d’écrire, le chantier de l’écriture poétique. Les poètes Emmanuel Damon et Bernard Moreau y répondent : « une voix singulière qui se précise, s’oublie s’entête. Voix d’un sujet en quête de lui-même, jamais clos, achevé ou assignable, mais ensemble hétérogène de potentialités, de réalisations en devenir, à l’image de la pensée elle-même » (p 36). Et « il faut ouvrir tous les possibles dans le micro chantier du poème » (p 37) pour que la poésie agisse sans relâche dans nos propres existences et pour qu’elle « œuvre à la remise en question de ce monde » comme le souligne Romain Fustier dans son Avant-propos.