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Costa Monteiro Alfredo, Dépli

Ce recueil se présente sous la forme de quatre feuillets pliés. Sur ceux–ci, trois langues : le Portugais, l’Espagnol et le Français se partagent l’espace où deux ou trois phrases sont seulement imprimées. Un mini CD accompagne l’ensemble que je n’ai malheureusement pas pu ouvrir. Trois langues qui se déplient et s’interpénètrent beaucoup plus par leurs sonorités que par leurs sens. Il faut lire même celles que l’on ne comprend pas, parce qu’en fait, les mots choisis sont très proches l’un de l’autre et qu’ils s’éclairent mutuellement. Plaisir à d’autres sonorités qui font que le sens peut être légèrement différent.

Cela peut donner lieu à une orchestration où trois lecteurs lisent en même temps les textes sur des tons, des registres, des hauteurs différents. De mêmes mots sont répétés : horreur, vide, erreur, envie, vie, écho, chaos, ouïe, couac. On ne peut que les comparer à une gamme qui se répète du son le plus grave au plus aigu en utilisant sept notes et cinq altérations.

La proximité sonore et celle du sens permettent toute une écoute créant une autre langue dont l’usage n’est que poétique. La même langue par un ordre de mots différents peut aussi apporter un sens différent grâce au rythme, à la tonalité, aux allitérations, à la longueur du mot, rarement de plus de deux syllabes,  aux consommes initiales qui le lancent.

Néanmoins, chaque phrase possède un sens clair :

Horreur

d’un vide

d’une vie

à vide

Il existe, à côté d’un jeu sonore, un jeu de sens qui parcourt les trois langues. Je me refuse à voir une poésie expérimentale, plutôt une expérience poétique qui pousse des langues unies dans des limites rationnelles respectant un certain sens commun, d’être parfaitement lisibles. Il y a alliance du son et du sens que l’on trouve rarement, aujourd’hui, et malheureusement, dans la plupart des recueils publiés. Là, est le sentiment poétique, sa révélation, son étrange état à durer qui nous projette hors de nous.

Recours au Poème a publié des bonnes feuilles de ce livre.