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Deux recueils de Gaspard Hons

 

S’annonce l’éclosion
d’une fleur
née de ses seules contradictions

 

Gaspard Hons

 

Gaspard Hons nous conduit de roses incréées en proses matinales. Le recueil paru au Taillis Pré prolonge ses Roses improbables, livre paru chez le même éditeur en 2009 et gratifié du prix Robert Goffin. Celui paru chez Rougerie prolonge la fidélité de l’éditeur à l’un de ses (nombreux) poètes aujourd’hui reconnus. En lisant Gaspard Hons, on pense à ce qu’écrivait Octavio Paz, dans L’Arc et la Lyre, au sujet de la situation du poète dans le monde et de cette même situation du Poème en le poète : l’homme poète est le lieu même où se marient les contradictoires, devenus alors complémentaires. Parce qu’ils l’étaient par nature mais que nous le savions plus. C’est du moins le chemin de recherche parcouru par le poète au long de ses livres, chemin symboliquement traduit par la présence de la rose, assimilée à juste titre à ce que Breton nommait l’or du temps. Car la poésie de Hons, comme toute véritable poésie, est traversée par ce que l’on appelle communément des influences. Le mot est cependant mal choisi et – nous suivrons encore Paz à ce propos − mérite dans le cas des poètes vrais d’être remplacé par celui de dialogue. La poésie est un dialogue permanent entre poètes. Qu’ils soient vivants ou morts. Il est des passés poètes qui parlent avec les vivants, et en tout cela vit la voix immémoriale de la poésie. Une poésie comme mémoire de la création du réel. C’est pourquoi le regard du poète sur ce qui l’entoure est souvent « pertinent » : on voit mieux ce qui est par les yeux de qui voit ce qui est.

Ainsi :

 

le discours du monde est seul, le rouge-gorge est seul, quiconque est seul. Aurais-je saisi le discours du monde, il serait moins seul. Aurais-je saisi le rouge-gorge serait-il moins seul ?

 

Le discours du monde voudrait caresser la beauté, pénétrer la douceur des fourrés, le discours du monde s’en va mourir aux confins de la solitude, le discours du monde se souviendra des cendres d’Auschwitz

 

[Petites proses matinales, p. 10]

    

Hons chemine au cœur de ce que nous nommons volontairement la poésie des profondeurs, recherchant à saisir la vérité de l’être plutôt que le décor des apparences. On y ressent l’amour parfois douloureux et cependant fraternel envers l’autre homme. La quête en intérieure, elle trace un sillon dans le réel de l’homme poète image de chacun des hommes. Dans la voix de Hons, on entend souvent l’écho de Heidegger ou de Celan, celui aussi de sagesses venues d’orient. Un écho qui a muri, participant de la voix personnelle du poète. Ici, l’homme est un temple dénudé par le siècle passé, temple dont les pierres s’assemblent à nouveau. Peu à peu. Deux très beaux ensembles qui conduiront naturellement à découvrir l’ensemble de l’atelier du poète.