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Diérèse n°78 : Poésie et Littérature !

La soixante-dix huitième édition d’une très belle revue dédiée à Bernard Demandre. ""L'aube est à l'aube sa lueur" Pierre Lecuire (1922/2013)" pour exergue, et un édito dans lequel Daniel Martinez nous propose d"habiter "poétiquement" le monde, dans son étonnante diversité, et lui donner par là-même une autre dimension, où les visions conquérantes perdraient de leur superbe".

« Domaine allemand », « Domaine chinois », « Domaine anglais » … Un chapitre liminaire qui nous propose des poèmes du monde, représenté en l’occurrence par Martin Krüger, Li Shutong et John Silkin dont les versions originales jouxtent les traductions. Une démarche que Recours au poème soutient et met en œuvre dès que possible, tant il est vrai que la musicalité de la langue est une composante incontorunable du travail du poème. Il y a aussi la graphie qui ici dans les idéogrammes des textes de Li Shutong ouvrent à cet univers incroyable d’autres sphères scripturales qui laissent entrevoir combien est diverse la manière d’exprimer notre appréhension du monde.

Diérèse n°78, Poésie et Littérature, mars 2020, 307 pages, 15 €.

Comme il est d'usage pour cette revue généreuse tant en terme de quantité que pour ce qui est de la qualité des contenus, ce volume laisse toute latitude à la poésie de vivre, d'éclore la multiplicité des univers qu'elle révèle à chaque passage de nos regards. Des poètes tels qu'Alain Brissiaud et  Claude Pélieu que nous retrouvons un peu plus loin dans les pages de la revue, qui se sont accompagnés à la vie tels deux grands amis, mais aussi Bernard Grasset, Pierre Dhainaut, Isabelle Lévesque ou Gérard Mottet, suivent les pages qui ouvrent sur  la thématique du volume.

Poésie mais pas que, puisque le "Cahier 3" est une rubrique « Proses ». Avant Bruno Sourdin nous offre cet entretien avec Philippe Lemaire qui cite Claude Pélieu dont le poème "Journal 1983/84", inédit, suit  : "Pour moi le collage, c'est écrire avec des images". Bien sûr, on voudrait écrire comme les collages de Philippe Lemaire !  Sept reproductions   en couleur de très belle tenue accompagnent cette rencontre qui nous plonge dans l'univers de l'artiste, riche et émouvant, lorsqu'il évoque Dan et Guy Ferdinande, ses année passées au Havre, à Lille, et la grande richesse des artistes avec lesquels il a travaillé. C'est un univers qui vit, revit, et montre combien l'art est empreint de notre quotidien et du partage.

Après  ces "Cahiers" dont le troisième est consacré à philippe Lemaire vient la rubrique « En hommage » dont il faut saluer l'originalité. Ce "Tombeau des poètes XIII" mené par Etienne Ruhaud nous emmène cette fois-ci au cimetière de Bercy où reposent Maurice Rapin et Mirabelle Dors son épouse dont il évoque la vie, l'œuvre, quelques paragraphes. Puis, pour clore ce volume épais, les  « Bonnes feuilles », qui offrent un groupement d’articles signés par des noms que nous retrouvons avec plaisir : Max Alhau, Jeanine Poulsen, Olivier Massé, Philippe Genest…

Une très belle revue, si tant est que belle signifie qu'elle permet l'évasion non pas de soi-même mais de ce qui enferme soi-même dans les limites de perceptions qui ici sont portées bien au-delà des mots et des pages. "Habiter "poétiquement le monde" ! Il me semble que c'est ce qui est offert ici.