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Dominique Sorrente, Les gens comme ça va

 

A l’adresse de mes « frères humains » (François Villon)
« Des gens comme ça va » si étranges parfois qu’il me, qu’ils nous ressemblent.
« Ainsi aller au cœur, en suite de poèmes, au plus près de la part secrète,
dans cette communauté de destin malmenée qui nous relie »

 

Ils sont les gens, les autres. On dit ça va. Un parmi. Écoutez le cœur. Et il y a pour eux. Le ciel pour cette joie.

Un mouvement en 7  chapitres pour peut-être dire où l’on va, seul avec les autres. Ce livre est né, nous dit l’auteur, au lendemain des attentats du 7 janvier 2015 à Paris.

Le poème sera la main tendue au bord du gouffre. Hymne fervent, Les gens comme ça va nous regardent. Le récit est riche, et si notre humanité nous échappe, laissons-nous entreprendre par ce voyage. Une première question, essentielle :

Dominique Sorrente, Les gens comme ça va, Cheyne, 2017, 87 pages, 17 €.

Dominique Sorrente, Les gens comme ça va, Cheyne, 2017, 87 pages, 17 €.

A quoi peut-on ressembler
sur l’autre versant des corps ?
Demandent les gens obstinément
à l’eau du fleuve. 

C’est le point de départ de cette marche où, singulier, nous allons nous côtoyer, nous deviner frères.

Parfois ils se reconnaissent,
parfois ils s’ignorent
peut-être se sont-ils trop longtemps perdus de vue (…)

Parfois, ils ont l’air ailleurs, dans un recoin du jour,
ils ont troqué
l’agitation sordide contre le silence des herbes,
ça fait toute une occupation.

Comme l’art de fixer sur le dos de la main
un bref instant de coccinelle. 

La ronde serait-elle enfantine, tant l’évocation de nos attitudes sonnent et trébuchent : jusqu’au ciel. Tel un mouvement, circulaire, encore un que l’ennemi n’aura pas, qui se retourne sur lui-même en un éclat de joie ?

Mais il y a pour eux : La neige aussi. Elle donne le droit / de traverser le champ, / parce qu’elle a recouvert / les territoires et les limites / et qu’on marche d’un pas appliqué / sans blesser les pousses.

Il y en a de toutes les couleurs, des gens comme ça va, un peu balourds, un peu fluets / tantôt sûr de leurs coups, tantôt / déboussolés. Chacun entrera dans la danse, construira son puzzle, fera tomber le masque et l’inattendu surgira.

Le poète, un parmi les gens comme ça va veille : Mi-février conversation  de près avec le mimosa …

Ici les gens deviennent plus proches. Espace de rencontre, le livre (si intense) nous relie. Le poète Dominique Sorrente espère avec nous. Ce matin c’est à toi que je parle. / Rien qu’à toi.

Ils ont trouvé sur une étagère du couloir
un livre que plus personne ne lit,
dans ce livre entre deux pages, une vieille image pliée 
où sont écrits ces mots en rouge et gris,
perdus dans une flamme : 
elle ne sait plus qu’aimer.

Ils en sont quittes pour un baiser durable.

Ils rient : encore un 
que l’ennemi n’aura pas.

Le ciel pour cette joie fait une roue dans l’eau.

Ils sont les gens comme ça va.

Ce recueil est envoutant, précis. Il écoute le cœur des gens. Avec  lui, nous avançons jusqu’au bord, léger de tout cet inconnu qui penche et nous appelle.