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dormir par terre…

 

dormir par terre une saison des pluies

 

c’est la mornifle du siècle lorsque vaque et hante en poète les centres-villes du monde     un grand désespoir de visages inquiets et de cœurs serrés qui pompent tout le fiel du corps     ces gens si pressés d’aller se faire prendre par l’autobus le taxi le métro ou l’avion trois heures d’avance     de l’abattement mélangé à de l’impuissance     ça vous magane un homme     encore une fois verser des heures supplémentaires dans le réservoir     se faire du sang de cochon en sachant qu’on travaille à se rendre vulnérables     oh oui ça vous amoche un homme à coups de savate     courir une vie entière à reculons sous la pluie battante     ou lorsque la peur dans le thorax ça traverse de justesse sans ses faire massacrer une rue bondée de morts qui marchent     tout pour ne pas être en retard     comme si le temps appartenait à quelqu’un d’autre     ou qu’un poème     ça pouvait attendre

 

 

Calme aurore (s’unir ailleurs, du napalm plein l’œil), Montréal, L’Hexagone, 2007, p. 88