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Ecouter le silence, de Paul Pugnaud

 

« Écouter le silence » regroupe des poèmes inédits de Paul Pugnaud écrits au cours de l'année 1982. Les éditions Rougerie ont publié une douzaine de livres du poète disparu en 1995 ainsi qu'un choix de poèmes en 1996, aux mêmes éditions est annoncée la publication d'un autre ensemble d'inédits «  les poèmes de l'année 1983 ».

 

«  Comment écouter le silence
au milieu des jours et des nuits.
Vaincu par les cris de la terre ... »

 

Questionnement et écoute d'une terre, d'un rivage dont le poète ne nous révèle aucun site repérable , ne nous livre aucun nom de lieu reconnaissable. Dans le paysage  où « les montagnes se réduisent au niveau de la mer » , le poète vit « suivant le rythme de la terre/ Et le reflux d'une marée » apparente  harmonie car les éléments ; pierre, terre, eau, ciel... sont sans cesse en mouvement, ils agissent et se transforment

 

 « Les coteaux s'ébranlent et marchent
jusqu'aux lointains
Ils piétinent les hommes …»

 

Les galets qui s'abattent
ont réveillé les cris
des nuages blessés. »

 

Les poèmes de Pierre Pugnaud sont traversés par « le chant des pierres roulant vers les abîmes » par «  les arbres déracinés » ils sont parcourus d'images évoquant les voyages, les traversées dans le temps et l'espace. « Rapide voyage au-delà de l'espace familier » ils sont porteurs de visions et de rêves «  des rivages apaisés/ où les roseaux vibrent encore » ou «  d'un autre pays/ où la vie devient semblable / A la promesse de l'été... » . Voyages, départs, rêves, la poésie de Paul Pugnaud répond à un appel pour franchir les barrages, les murailles et les falaises pour aller au-delà « d'un horizon mal dessiné ». et surtout pour résister « à la terreur de l'oubli ».

Cependant cette poésie d'attente et d'écoute d'un homme «  ouvert à toutes les sensations » ne révèle aucune certitude, n'énonce aucune sentence au contraire elle dit la solitude, le doute et les espérances du poète qui s'aventure « sur les chemins où personne ne passe » , « chemin inconnu » qui accueille le voyageur puis s'efface,  chemin parcouru avec le constant désir d'aller au-delà du temps mesuré, au-delà de « l'étendue des mots en drainant les sources qui cheminent/ Invisibles sous la lumière ... »

Poète qui s'interroge sur le pouvoir des mots qui «  faiblissent ou s'effacent », des «  rumeurs (qui) ne répondent pas », «  des voix qui tentent de nous retenir » mais qui sait que devant tant d'errance et d'égarements  «  parmi tant d'objets immobiles / Le cœur bat invisible/ les couleurs de la terre s'allument ... »

Élan vital d'un poète qui n'a jamais dévié sa route mais a su donner à son écriture une résonance particulière en accueillant les mots dans leur simplicité, au plus près possible de leur sens premier  parce qu'

 «  aucun symbolisme ne peut remplacer la réalité des choses.. »

 

Texte de Georges Drano paru dans Autre Sud N° 7 Décembre 1999