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Ecrire, et autres poèmes

 

 

Écrire

 

 

L’écriture, qui vient après, peut être
la minutieuse contemplation de ce qui reste 
sous les cendres d’un incendie et sous les cendres 
de toutes les images pour le dire. 
Ce qui reste d’un éblouissement
et de l’irradiation continue.

La passion sûre et le silence des salamandres.

 

 

 

 

Rhizome

 

 

J’écris ces mots à l’abri des dunes, quelque part dans le Delta du Rhône. 
Tout y est parfaitement à sa place ainsi que dans les psaumes :
d’une joie détachée de la fleur sur le sel, à l’inquiétude de mourir
sans avoir su faire révérence à la mesure de cet univers.

Je serais une morte décevante, embarrassant l’espace 
de soupirs, suppliant le temps de lui revenir
pour comprendre l’équilibre avant d’en mourir.

Pour l’heure j’aime, et les virgules et les lys des dunes.

 

 

 

Blanc

 

 

Le jour approche où nous formerons 
des roses de lin blanc sur une épine d’acacia.
Bandelettes déchirées au bas des linceuls,
nouées en signes, au milieu de plus rien.

 

 

 

De terre

 

 

J’aime les soirs quand la terre est retournée à cru, 
grossière et gorgée de l’or du soleil qui se couche 
dans son lit brun d’oreillers et de couvertures.
J’éprouve alors comme un grand rire.
Mais en larme à la première fraîcheur 
quand les suavités de la terre deviennent intérieures,
empruntant leurs images à la glaise et à la sauvagine. 
C’est la pensée de la fourrure et des belles couvertures,
quand le délire sensuel tend une main aveugle, au soir triste.
[Mais Rimbaud revenez plutôt voir et dire, qu’est-ce cela ?]
Ou peut-être un délire pour mineur aurifère supputant le magot,
les doigts jaunes, prêtant un intérêt angélique 
aux propriétés voisines des cyanures et du mercure, 
et disant : 
je vous en payerai moi des fourrures avec ça !

[Horrifiée]
Couchons-nous là, féroces de nos rêves, au réveil qui verra midi ?

 

 

 

Perfumare (n°48?)

 

 

Dans les chemins du bord des champs, les sureaux noirs 
ont au petit matin un très lourd parfum de saine crasse
qui monte accordé à la densité sourde du feuillage, 
avec de temps en temps une nuance fleurie, aussitôt regrettée
mais presque melliflue, l’énoncé d’une menace tendre. 

C’est la longue nuit des bêtes qui parle dans le remugle étoilé.

 

 

 

 

 

 

 

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