Francopolis : la poésie en archipel

Créée en 2002 par Dana et Ara Alexandre Shishmanian, Francopolis s’est d’emblée voulue « site de la poésie francophone » : un carrefour où se croisent écritures, arts visuels, sons et traductions, dans l’esprit d’appeler toutes les francophonies. Plus de vingt ans plus tard, la revue tient toujours ce pari d’hospitalité, portée par un comité collégial (Éric Chassefière, Catherine Bruneau, Gilles Lades, etc.) qui orchestre une quinzaine de rubriques foisonnantes.

Au cœur de Francopolis, une mosaïque de rubriques invite à parcourir la poésie sous toutes ses formes : le Salon de lecture accueille à chaque numéro un auteur invité, proposant un bouquet de poèmes accompagné d’un entretien critique ; la section Lectures/Chroniques passe en revue les parutions récentes et éclaire l’actualité éditoriale ; Créaphonie ouvre l’espace sonore et visuel avec des créations audio, des pièces de poésie sonore ou des vidéo‑poèmes ; Une vie, un poète déploie un dossier patrimonial consacré à une figure marquante du passé ; D’une langue à l’autre fait résonner des traductions inédites venues de toutes latitudes ; Franco‑semailles réunitbbillets d’humeur et articles de fond qui interrogent le champ poétique ; enfin, Bibliothèque Francopolis, Pieds des mots, Terra Incognita et une quinzaine d’autres portes d’entrée — répertoriées dans la page « historique des rubriques » — complètent ce vaste chantier, faisant de la revue un véritable atlas hypertexte de la création francophone.

Le n° 184, paru au printemps 2025, déploie un sommaire à la fois ample et équilibré : il s’ouvre sur un Salon de lecture où Gilles Lades, interrogé par Catherine Bruneau, orchestre un bouquet de poèmes en dialogue avec un entretien fouillé ; la rubrique Lectures/Chroniques consacre ensuite un dossier critique à Attentive, éperdument d’Ida Jaroschek, confirmant l’attention de la revue aux voix singulières de l’heure. Dans Créaphonie, deux vidéo‑poèmes de Nora Atlane explorent la fusion image‑verbe, tandis que Une vie, un poète rend un hommage sensible à Jean‑Louis Giudicelli, réactivant la mémoire d’une œuvre discrète. La polyphonie s’élargit avec D’une langue à l’autre, qui propose six poètes roumains traduits par Dana Shishmanian ; puis Franco‑semailles offre un éclairage sur la géopoétique sous la plume de Pascal Mora. Un Coup de cœur met en avant la réédition de Chemins de mots de Muriel Camac, avant que la Bibliothèque Francopolis ne clôture l’ensemble par une vigie bibliographique recensant vingt‑trois titres parus entre janvier et mars 2025.

Pour la diversité de ses entrées (du haïku filmé à l’essai érudit), pour sa mémoire vivante (des centaines de dossiers disponibles en ligne), et pour cette façon singulière de tisser sans hiérarchie la poésie et les arts, la création contemporaine et la redécouverte patrimoniale. Francopolis incarne, en somme, une francophonie poétique connectée, polyphonique et généreuse — un archipel que l’on explore à la manière d’un atlas hypertexte, en se laissant guider par la houle des liens.