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LA NUIT DU CENTAUREAU

 

C’est une meute de loups qui débusque un centaureau.
La louve de Rome allaite Romulus tout vert du bois
Et Remus tout rouge de honte. Sous la protection
Du centurion centaureau, il place sa houpette.
C’est lui qui porte une perruque de cornes.
Mais que sonnent les puissants buccins et les trompettes.
De fin cuivre des batteries ; Nemus appelle le taureau
À tête de veau et à corps d’homme blanchi
Par les épreuves du feu, du sel et de l’eau marine.
Tous ces troupeaux splendides courent et se poursuivent
Dans les immenses forêts de trompes et de tonneaux.
Le centaureau et ses compagnons éventrent les loups,
Entravent les fauves et défoncent les ventres mûrs,
Des tripes regorgeant de faillites et de paillettes.
Les longues cornes d’abondances de l’or poli
Écrasent les entrailles et font éclater des poumons.
L’air comprime des éoles et des autres courants de l’air
Du temps, des fleurs séchées tombées des rouleaux,
Des amphores rapportées au bord des sables marins.
Le centaureau Nemus, Minotaure oublié,
A laissé son secret à la porte des labyrinthes lointains.
De sa mâchoire carnivore il tranche les cous des louves
Qui glissent malheureux cadavres romains dans le gouffre
Sonore des fonds infernaux fréquentés par Cerbère.
Les collines retentissent des clameurs animales
Et des sonneries guerrières des légions centauriennes.
O Roi Minos que n’as-tu gardé sur tes colonnes de marbre
Et tes temples orgueilleux et tes palais dorés,
Les grands monstres de pierre qui dévorent tes troupes.
S’accouplera-t-il avec une génisse de Crète ou une dame de Lakis ?
C’est à l’île qu’il naquit et aux rives ibères qu’il périt.