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La poésie de Rodrigo Verdugo Pizarro

L'écriture poétique de Rodrigo Verdugo pratique plusieurs registres de langage pour rendre compte d'une expérience limite. Dépouillée d'éléments accessoires, la parole créatrice aborde le noyau de thèmes où ce qui inquiète se fonde sur un acte de parole qui, à la fois, affirme et déconcerte.

L'horreur, le vide existentiel, la solitude, la mort, l'incommunication avec autrui et avec le monde sont les antécédents d'un monde en décomposition progressive. L'itinéraire existentiel du locuteur exige du lecteur une ouverture d'esprit pour modeler sa subjectivité dans le vertige d'images qui ne prétendent pas être facilement déchiffrables. Nous sommes devant une poésie puissante agissant comme un dispositif de sens multiples qui essaie de saisir totalement un sens toujours insaisissable. Qui parle et voit affronte un état du monde où ce qui est dévoilé à sa conscience ne semble pas transmissible pour une expérience partagée. Ce qui est poétique revient, dans l'attente du locuteur, à ne faire qu’un avec lui ; mais la dissonance attisée au centre de la réalité et l'opacité du monde lui révèle, finalement, sa propre tragédie.

 

Cristian Montes Capo

Université du Chili

Quatrième de couverture du premier volume de  « Annonce »(Anuncio) de Rodrigo Verdugo Pizarro, Éditions Corriente Alterna, Chili.

Traduction du castillan (Chili) : Denise Peyroche

 

 

Vivre en poésie est une ascèse difficile, inconfortable avec ses échappées forcément joyeuses et ludiques - mais toujours extra lucides - et celui ou celle qui s'y adonne n'a rien à attendre en retour. Des lecteurs trouveront toujours leurs poètes propitiatoires, sans (a)battage médiatique, quand le temps sera venu. Je ne prise guère le tintamarre lorsqu'il est question de poésie. Si le croyant cherche à gagner sa place au paradis en suivant de son mieux les préceptes de sa religion, le poète, lui, trace sa voie au jour le jour, au fil de l'expérience et de l'inspiration. Autant que faire ce peut, il apporte des éclats de conscience, des provisions de rêves et pourquoi pas des détonateurs de révolte dans l'enfer banalisé de la vie des humbles, de ceux dont la voix profonde a été méprisée. Il apporte ses briques d'utopie (les poèmes) à l'oeuvre commune, son tribut d'amour et de manques. La poésie de Rodrigo Verdugo Pizarro déborde nos mémoires, amplifie une parole secrète dans les creusets d'une humanité possible.

 

André Chenet

extrait de : Introduction au Grand Oeuvre de Rodrigo Verdugo Pizarro (à paraître dans le n° 7 de La Voix des Autres)