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L’amour

 

Je suis exempt de tout vice, Seigneur,
  excepté celui
D'amour mal conduit, confus, borgne,
  reprenant d'une main
Ce qu'il a donné de l'autre ;
Mes jours sont périssables ; cet amour
Ne les sauve pas. Tu m'as dit : “Suis-la,
  cette femme.” Elle souriait. Je ne savais
  plus où j'étais, sinon qu'en sa présence
Le jour
Fleurissait à nouveau. Et je lui ai pris la
  main
– Qu'elle m'a donnée – ; j'ai touché son
  front, ses lèvres
Se sont ouvertes pour moi, tout
Était neuf en elle, par elle ;
Puis j'ai expérimenté ses duretés. Qu'elle
  repose en terre, un jour,
Me paraît impossible. Nous avons pris
  la rue de l'Annonciation, ensemble,
  main dans la main,
Et nous nous sommes sauvés du monde. C'est
  pourquoi l'amour, qui est un enfant
  imparfait,
Nous l'avons recréé. Nous l'avons nourri.
  Nous l'avons aimé ;
Et à présent il marche tout seul