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Le milan et l’ombre

 

Dans le ciel d’été le milan vole
sous la calligraphie illisible du zodiac
en cercles d’abord vastes et heurtés
comme d’inavouables pensées
puis toujours plus serrés, obsessionnels
il s’attarde au dessus du fond natal
même si tout le reste continue à tourner
autour de son axe invisible.

L’ombre du milan tombe circulairement
sur la Terre d’où surgissent les eaux
comme des amours interdites
et l’homme se soumet à la soif
quand bien même il n’ose l’avouer.

L’ombre-écho résonne en rêve
mil-an, mille ans de mémoire…

Songe au moment où elle t’avait ébloui.
lorsqu’elle avait rebondi inaudiblement contre le ciel
fidèle au milan et à l’incommensurable
et tu l’éprouvais comme venant de partout
sans la trouver nulle part.

Rappelle-toi cet instant non terrestre.
Si l’infidélité devait commencer
le mirage égoïste
la scission de l’âme d’avec la forme
si la mémoire libérait son tourbillon démoniaque
tel un fantôme se logerait en toi
l’oiseau qui s’assoupit sur la croix de l’infini
loin du fond auquel nous rive la vanité
comme à la vie.

Tu quêtes éternellement sur terre
ce qui se passe au ciel.
La forme disparue, l’homme perdu
survole ton esprit
tu tournes ravie et inconsolable
et ton ombre se dessine si près
que la distance te manque
pour t’approcher de toi-même
et replier tes ailes !