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Le pollen des jours de Jacques Viallebesset

  Ainsi, deux recueils auront suffit à imposer la voix du poète Jacques Viallebesset, L’écorce des cœurs et Le Pollen des jours, ce dernier dans la collection « crème » des éditions Le Nouvel Athanor. Une collection qui commence à peser. On y trouve des recueils de poètes tels que Pierre Bonnasse, Frédérique Kerbellec, Matthieu Baumier, Bruno Doucey, Etienne Orsini, Bernard Perroy ou Bruno Thomas. Viallebesset, maintenant. Poètes engagés dans la direction profonde d’une poésie du sens, en quête des retrouvailles avec de lointaines paroles aujourd’hui devenues bribes de langage. Le monde est un son, c’est pourquoi le Poème y vit comme un poisson dans l’eau.

Une trentaine de « pièces » ici. Comment dire la voix d’un poète ? On le lira avant tout, dans ce recueil ainsi que dans les pages de Recours au Poème. Il y a une particularité dans cette voix, quelque chose d’unique même dans la poésie française contemporaine : une espèce de métissage difficile à définir entre les présences d’Eluard, les arcanes de certain chemin spirituel, Aragon, ceux qui philosophent en tout temps par le feu, et l’Amour en forme de Banquet. D’une certaine manière, une espèce de rencontre entre la bonhommie du prolétariat un jour de mai 36 et le Jeu grave des quêtes chevaleresques du présent. Qu’on ne s’y trompe pas, cette position ou situation est profondément poétique et politique. Je parle de la position/situation, bien entendu, et non de la poésie de Viallebesset (rien de plus ennuyeux qu’une poésie qui se veut « politique », cela rougeoie parfois, et honnêtement…). Car en appeler à la poésie, au Poème, à son recours, ainsi que le fait le poète Viallebesset, écrire cette vie du Poème en sa chair de poète, cela est maintenant, par les temps qui courent, politique. Que voulez vous, et que l’on se comprenne bien ! L’Amour, cela est humainement politique. Et si la poésie peut être pleine de rires, elle n’est pas un amusement. La poésie de Viallebesset est jeu sérieux.

Et grave.

Car c’est cela vivre et comme on ne refait pas Viallebesset l’opus s’inscrit sous l’égide du pénétrant Abellio, duquel on conseillera vivement Les yeux d’Ezéchiel sont ouverts : « Ecrire et aimer, seules occupations universelles, expériences originelles et ultimes, mort de la mort ».

La poésie, en sa profondeur, est ce travail au noir, celui de la mort de la mort. Cheminement éclairant vers la porte étroite donnant sur un autre paysage, celui de la vie. Cela demande en effet qu’Ezéchiel ouvre les yeux. Là se trouve la poésie, et là se trouve le Poème dit par Jacques Viallebesset :

 

« Le vieil homme est mort le printemps commence. »

 

Lire Jacques Viallebesset dans les pages de Recours au Poème : ici.