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Les veuvages des dogmes

 

 

Simuler, comme on le fait de nos jours, une reconception des ères dogmatiques consécutives de l’histoire de l’homme au fil de pensées spirales, boiteuses, c’est à mon sens simplement octroyer à la cécité mentale et morale une mesure « spirituelle » doctrinale naïve, parce qu’idéaliste quelle que soit sa tendance. Ou c’est peut-être plutôt mystifier l’âme de la doctrine, qui se trouve dans nos sociétés modernes prise en otage, voire en « gage » ; c’est étrangler ce qui fait la vivacité intangible d’un dogme. Nous parlons ici des conceptions modernes tant des cartésiens, des chrétiens, des orthodoxes, des juifs rabbiniques, des juifs karaïtes, ou tout simplement des juifs reformés, que des musulmans et des « rationnels » – peu importe.

La polémique n’est pas la question de savoir quel dogme choisir – cette question, je la nie formellement, comme je peux faire abstraction de son contexte contemporain. Je peux aller même plus loin : ignorer l’éventuelle véracité de chacun de ces dogmes exposés, et minimiserl’importance de ces querelles au fil des ères. Je ferais alors cela soit par conviction, soit par complaisance, ou à défaut par refus de ces fausses interprétations qui présentent des débats questionnant la complémentarité morale, spirituelle ou autre du dogme défendu. Car toute pensée est finalement un art dogmatique, spirituel à mon avis ; sans remettre  en cause l’appartenance de ces courants sus-cités aux champs spirituels, il me semble que la manœuvre dogmatique établie par certains courants de pensée reste dans la plupart des cas aberrante.Car en effet, au-delà du phénomène de croyance ou d’incroyance qui se pose en filigrane derrière ce débat, il m’apparaît que le radicalisme dans ses différentes branches idéologiques tente toujours de couper – et il coupera sans doute toujours – toute engeance pédagogique, courant ainsi le risque de ne pas pouvoir répondre aux besoins d’un esprit perdu, d’une âme tortueuse, faute de pouvoir enseigner la créativité positive de ces systèmes de croyance. Hélas, nous vivons actuellement ce que j’appellerais un veuvage dogmatique.

Devant ce fait que je juge tragique, il me semble que nous sommes appelés au silence – bien que l’appartenance à une certaine patrie demeure en chacun de nous vivace, il est nous est de plus en plus fréquent de nous obliger à parler à basse voix pour que nos compatriotes ne puissent pas nous entendre ; les choses de la vie sont trop éphémères.

Il me semble pourtant qu’un cœur vivant, au sentiment parfumé, amer ou salé – peu importe – procure une bien plus grande quiétude, et prédispose à un bonheur manifeste qui sait s’écrire à son rythme, lancé dans une valse partagée par tous les systèmes de croyance que nous avons cités. Que chacun ait sa part de galette ; et que chacun danse à sa manière !

Propager les fondements d’un bonheur constructif demeure notre souhait ; je pense que c’est même notre devoir, comme un dû que nous aurions à rendre à un père que nous serions prêt à adopter tous, collectivement. Mais nous ne sommes aujourd’hui élevés, hélas, que par une doctrine veuve et stérile.

Allaitons, nourrissons ensemble notre bonheur partagé ; c’est la seule manière possible d’accéder à une vie meilleure dans une planète généreuse, admirable. Je ne suis ni prêtre dans un Temple, ni chef d’orchestre, maître d’une valse ou d’un chœur ; je ne suis qu’un simple et modeste «troubadour» sollicitant une paix et une tolérance qui se sont égarées dans ce monde
cruel.

 

cet article a fait l'objet d'une précédente publication sur la revue en ligne "Le Capital des Mots"