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Maeve on a Gap Year

 

In Valparaiso, we are drunk again on Pisco sours.
Smoke curls silver fossils round my tongue.
My jaw clicks empty Os of smoke to the stars
from my lungs. I tap ash and lick
syllables of Spanish like salt from lips.
Later, I hunger for food I cannot name.
We tumble into a  night café, where you feed me
pale potatoes, boiled to a shine, with lengua—boiled tongue.
You wait for me to grimace like the other gringo girls.
I smile. 
I know the taste, the shape of a dead tongue in my mouth,
strong muscle meat, grey, heavy. I cut a chunk.
The root is thicker, tougher than I remember,
rich with buried nerves. When it slides down my throat,
I think of home, of scrubby grass turn to cud on tongues,
of weeds, of thorns, of furze. I think of torn hands
stacking stones into walls to keep bullocks in and raiders out.
I think of the syllables and forgotten words that sit in the spaces
between grey rocks, between grey clouds, between grey drops.
I think of the frantic low moan of the cow who calls her calf back.
I've never been so far from home. 
No. I’ve never been so close.
I turn to you and ask for more.

 

*

 

Maeve au cours d’une année sabatique

 

A Valparaison, on est de nouveau ivre avec des Pisco-citron.
la fumée boucle en fossiles d’argent autour de ma langue.
Ma mâchoire clique des O de fumée vides vers les étoiles
depuis mes poumons. Je secoue la cendre et lèche
des syllabes d’espagnol comme du sel sur des lèvres.
Plus tard, j’ai faim d’aliments que je ne puis nommer.
On s’affale dans un café de nuit, où tu me nourris de
pâles patates, brillantes d’avoir bouilli, avec de la lengua – langue bouillie.
Tu attends que je grimace comme les autres filles gringo.
Je souris
Je connais le goût, la forme d’une langue morte dans ma bouche,
viande d’un muscle puissant, grise, lourde. Je coupe une bouchée.
La racine est plus épaisse, plus coriace que dans mon souvenir,
riche de nerfs enfouis. Quand elle glisse dans ma gorge,
je pense à la maison, à l’herbe rabougrie ruminée sous les langues,
au chiendent, aux épines, aux ajoncs. Je pense aux mains lacérées
empilant les pierres en murs pour garder les bœufs et éloigner les voleurs.
Je pense aux syllabes et aux mots oubliés qui demeurent dans les espaces
entre les pierres grises, entre les nuages gris, entre les gouttes grises.
Je pense au grave mugissement affolé de la vache rappelant son veau.
Je n’ai jamais été si loin de la maison.
Non. Je n’ai jamais été si proche.
Je me tourne vers toi et en redemande.

 

(traduction Marilyne Bertoncini)