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Matin à Dachau

 

Comme lire un poème : on débarque,
on sent le choc à la fin du vers. Pose pour une photo,
on avance – l’intérieur est simple, dénudé. Cet espace nous supplie
de ne rien chercher. On nous fait visiter très vite,
longer une clôture jusqu’à la chambre à gaz, suivre à la hâte le chemin
tracé la première année par les prisonniers. Ici, nous sommes,
signale notre guide, plus ou moins à l’endroit où ils se trouvaient.
Mais il n’y a rien. Seuls l’ombre et les cailloux que déplace le vent d‘hiver.
on nous laisse aller ensuite, à notre guise, entre les rangs de peupliers
puis revenir, seuls, dans l’aveuglement d’un soleil implacable.
Au début on ne sait pas ce qu’on doit découvrir.
L’endroit est dépouillé, et les fleurs
apportées par d’autres semblent déplacées. Pourtant quand on pénètre
dans la paix de la chapelle au bout des arbres,
obsédé par la pensée que ce qui reste est toujours si peu,
la conclusion s’impose : ce qui fut vécu subsiste à peine ;
     à nous de discerner, dans ces tourments, un poème qui s’achève.

(traduit par Claude Held)