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Paolo UNIVERSO, Dans un lieu commun j’ai fini par te trouver, poésie

 

La présentation juxtalinéaire des poèmes en italien et français de l’auteur, né en 1934, décédé en 2002, offre au lecteur la possibilité d’entrevoir l’ « univers » d’un poète rebelle, réticent à l’édition, bien dans l’esprit de l’irrédentiste Trieste.

L’irrévérence, l’insolence, la liberté génèrent des poèmes à contre-courant du sens commun. Certains y verront même une quête blasphématoire en certains endroits, dès le premier poème :

« je me dévore
un beau carré
de christ ressuscité
dans le temple antonien »

La bourgeoisie, le consumérisme, le sexe, la vie banale en prennent pour leur grade, eux aussi, tant il est vrai que le regard décapant du poète pointe « la misère/ de ta condition/ de maquereau »,  voudrait « boire une coupe céleste/ de ce ciel trituré/ par le vent frais/ qui vient du frigo »…

De brefs poèmes, donc, pour fustiger ce qui passe, ce qui lasse, le drapeau national, avec un esprit de dérision amère, des formules ramassées en coups de poing (« je t’effleurerai la main/ d’un coup de marteau/sens-tu/ comme je t’aime ? »

Autocritique aussi, autodérision jusqu’à se portraiturer sur le mode acide  entre propos de café triestin et valse de Lehar.

Les aphorismes de « pensieri per versi » affûtent la même pensée d’un pessimisme lourd (« l’homme – ce succédané ») et « la ballata del vecchio manicomio » décrit l’atroce réalité des asiles :

« un barrissement d’infirmiers rembarre l’air »

ou

« fou
par la grâce de Dieu
et volonté de la Nation »

Le poète,  qui a pu écrire « par temps obscurs l’aveugle voit clair » , cerne la poisse, la vanité, exhibe le peu, le cru, la mort, et nous enjoint à relire le monde, sous l’angle de la perdition.

 

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