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PAR-DESSUS L’OBJET

 

Es-tu éclairé ? quelque chose d’irréel
se cache dans ta forme. de là la végétation remonte
sa médiation : ça vaut le coup de s’y enterrer,
se coucher comme dans une mare noire et dire fraises*,
les fraises sont, cette profondeur du fossé,
ce lisse où je me cache.

et que peut-on faire avec une fraise  ? peut-on
l’enjamber ? je dis camarades,
avec une fraise on peut créer un nom. les objets,
en eux sans nom, les supportent bien :
les objets odorants un après-midi d’été, au parc,
sur la place de Place des fleurs – tout un jardin de légumes est sorti
se promener et murmure grand est mon amour,

toute cette foutue rigidité. d’ailleurs, avez-vous déjà
vu le diable ? la fraise je l’ai vue. j’ai vu
ses seins. une fois elle m’a dit dans le combiné :
va te faire foutre, en moi pousse le doux parfum du sud, le dîner
est sur la table ; quelqu’un sort la lumière de la chambre et la nuit tombe,
tu n’as rien vu, tu ne sais rien encore : celui qui nage
a un nom ; poisson, dit le poisson et se met à saigner des yeux,
comme s’il mangeait des châtaignes.
 

*Jagoda, « fraise » en croate, est un prénom féminin assez répandu (NdT).

 

traduit du croate par Vanda Mikšić, Brankica Radić