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poèmes de Manuel Becerra Salazar

(traduction de Harry Szpilmann)

Instrucciones para matar un caballo

Se le adelgaza la fuerza de las patas delanteras horadando con la hoja de una cuchilla. Se hacen varios cortes hasta que el animal cae de frente como arrodillándose. Después vienen dos garfios que lo alzan por las patas traseras y su garganta queda expuesta para la misma delgada cuchilla. Se coloca una cubeta de metal para atenuar la caída de la sangre que vendrá inmediatamente después de un corte certero en la garganta —Tiene el caballo la cualidad para detenerse el corazón cuando viaja a la velocidad del sonido. El hombre, por su parte, desconoce esta virtud cuando va hacia el desamor a la velocidad de los caballos—. Su tráquea es de mármol. Hay que ser decisivo para abrirle bien el cuello y silenciar el dolor.

Hay un dios ebrio en todo caballo que duerme de pie.

 

Instructions pour tuer un cheval

           On affaiblit la force des jambes avant en les entaillant avec le tranchant d'un couteau. On réalise plusieurs coupures jusqu'à ce que l'animal tombe vers l'avant comme s'il s'agenouillait. Ensuite, deux crochets se présentent qui le hissent par les pattes arrières de façon à ce que sa gorge soit exposée au même tranchant effilé. On place alors un seau en métal pour amortir la chute du sang qui fera immédiatement suite à la précision d'une coupure dans la gorge.

            Le cheval a la faculté de suspendre les battements de son cœur quand il voyage à la vitesse du son. L'homme, pour sa part, méconnaît cette vertu lorsqu'il va au désamour à la vitesse des chevaux. Sa trachée est de marbre. Il faut être décisif pour lui trancher la gorge et faire taire la douleur.

            Il y a un dieu ivre dans chaque cheval qui dort debout.

 

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Instrucciones para matar un cerdo

Es mejor matar a los cerdos en el verano. Hay que tener el corazón puesto en hielo para no dejarse atormentar por la vida cuando se aleja.
Quien lo desmantela con breves choques eléctricos sobre el cuerpo le ahuyenta un poco la tristeza.
Deje caer su cuerpo robusto sobre el envés del animal. Amarre las patas traseras hasta imposibilitarlo con el fin de que permanezca de costados
—imagínese a un hombre maniatado—. Cuando la bestezuela quede bocaalcielo, hunda el cuchillo sobre el pecho, y tenga presente que éste, como la garganta de los caballos, es duro si se hunde con mano sensible.

Los últimos gemidos del cerdo son prolongados y estridentes. Entierre hasta que los músculos permitan y coloque un balde cerca de su garganta múltiple. No deje de revolver la sangre con el afán de que no desaparezcan los borbollones rojos ni el tejido atemperado.
Rebane todo su perfil y despréndalo de sus gesticulaciones hasta que su rostro sea, al final de la tarde, una máscara de carnicería.
Deje que los fluidos y la sangre que cae se trasminen en el suelo. La tierra hará lo suyo.

 

Instructions pour tuer un cochon

            Il est préférable de tuer les cochons en été. Il faut avoir le cœur plongé dans la glace pour ne pas se laisser tourmenter par la vie lorsqu'elle s'en va. Qui l'étourdit par de brefs électrochocs, chassera un tant soit peu la tristesse.
           Laissez-vous tomber de façon robuste sur le dos de l'animal. Attachez-lui les pattes arrières de façon à le contenir afin qu'il demeure sur son côté (imaginez un homme ligoté). Une fois la bête tournée gueule au ciel, enfoncez le couteau dans la poitrine, et souvenez-vous que celle-ci, tout comme la gorge des chevaux, résiste si l'on œuvre d'une main sensible.
           Les derniers gémissements du cochon sont prolongés et stridents. Enfoncez la lame jusqu'où les muscles le permettent, et placez un seau près de sa gorge multiple. Continuez à remuer le sang afin que ne disparaissent ni les rouges bouillonnements ni le tissu tempéré. Coupez-le tout entier en tranches et arrachez-le à ses gesticulations jusqu'à ce que sa gueule ne soit plus, en fin d'après-midi, qu'un masque de boucherie.
           Laissez les fluides et le sang qui coule pénétrer le sol. La terre s'occupera du reste.

 

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La rana moteada

 

La forma del nado es un signo medular para diferenciar a la rana comestible de la rana moteada.
Esta segunda es carne para matar a animales mayores y sirve, a la par, de alucinógeno para embellecer a ciertos mamíferos.
A la primera especie se le puede hallar en la circunferencia de los
ríos donde los estanques naturales se vuelven un asidero de alimento.

Capturada la rana, se coloca de lomos y se abre. Se le corta desde el pecho hasta las cavidades de las ancas después de haber separado la cabeza del cuerpo.
Se lava y lo que resta se destaza en varios cortes listos para votarse al fuego lento de las hornillas:

Es mejor verla de bruces en el platillo, como una enorme flor verde, que flotando de muerte natural junto a las hojas de los nenúfares.

 

La grenouille mouchetée

            Leur façon de nager est un signe médullaire pour différencier la grenouille comestible de la grenouille mouchetée. Cette dernière est chair pour tuer des animaux de grande taille et sert à la fois d'hallucinogène pour embellir certains mammifères ; la première espèce peut se rencontrer à l'entour des rivières où les étangs naturels sont des viviers d'aliments.

            Il faut mettre la grenouille sur le dos et l'ouvrir ; on l'incise à partir du ventre jusqu'aux cavités des cuisses, ce après avoir séparé la tête du corps. Ensuite on la rince et ce qui reste est découpé en morceaux que l'on jette au feu lent des fourneaux.

            Il est préférable de la voir étalée sur une assiette comme une énorme fleur verte, que de la voir flotter de mort naturelle parmi les feuilles de nénuphars.

 

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Matar un cordero

 

Qué temible es la serenidad en los ojos de los pequeños recentales cuando van hacia la muerte.
Su cuerpo desprende un rastro de orina luminosa que la gente de la tribu sigue para no perderse en la niebla.
Sin embargo, sus miembros fortalecidos ya no pertenecen al vientre ni al cielo de flores en el que moraba.
La muerte no da señales.
Los primeros hombres colocan al cordero de costado. Lo someten y rebanan de un golpe cuello y garganta. No dejan que se agrave en la agonía.
Rastrillan su piel lavada y la retiran para las providencias que vienen.
Cortan de un tajo las pezuñas, se dividen los muslos, el pecho y en cabeza cercenada
ven a un ídolo vivo para ahuyentar los temores hacia la carne.

 

Tuer un agneau

            Comme elle est redoutable la sérénité dans le regard des petits derniers-nés lorsqu'ils vont à la mort.
           Leur corps laisse une trace d'urine lumineuse que les gens de la tribu suivent pour ne pas se perdre dans le brouillard. Cependant, leurs membres renforcis n'appartiennent déjà plus au ventre ni au ciel de fleurs dans lequel il séjournait.
           La mort n'envoie pas de signes.
           Les premiers hommes placent l'agneau sur son côté. Ils le soumettent, et d'un coup sec tranchent gorge et cou. Ils ne laissent pas l'agonie s'aggraver. Ils rasent la peau lavée et l'ôtent pour les providences à venir. D'un coup de couteau ils coupent les sabots, et puis divisent les cuisses et la poitrine et la tête entamée ;
           ils y voient une idole vivante pour chasser leurs craintes de la chair.