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Revue Estuaire, N° 165

Avant lecture, Estuaire est à considérer comme un objet. C’est en effet une revue de haute tenue, qui propose sous un format imposant une alternance de feuilles colorées, noires pour les changements de chapitres, et d’un ton pastel variable pour la présentation des articles et auteurs.

Pour ce numéro-ci, le 165, cette symphonie de tonalités sobres et apaisantes qui reste une constante propre à chaque numéro, accompagne le numéro anniversaire. Chaque volume présente en effet une thématique particulière. Cette revue québécoise trimestrielle a été fondée en 1976 par Claude Fleury, Pauline Geoffrion, Jean-Pierre Guay, Pierre Morency et Jean Royer. Depuis, cet attachement à une esthétique qui porte sa signature graphique est mis en avant sur le site internet d’Estuaire :

Revue Estuaire, N° 165

Revue Estuaire, N° 165, C.P. 48774 Outremont (Québec), Canada.

Une évidence : le format livre, pour une revue, est mort. Une transition s’opère. Une part de l’institution nous est confiée ; notre action sera de la porter plus loin. Ce plus loin passe, entre autres, par le renouvellement de la facture graphique de la revue. Julie Espinasse, de l’atelier Mille Mille, avec le concours de l’équipe de rédaction, s’est chargée d’imaginer Estuaire autrement : format plus grand, page aérée permettant au poème de se déployer, couleur (!) ; finesse dans le détail – les typos, les titres courants, la disposition des textes –, qui rendra agréable et conviviale votre lecture. Chaque numéro de 2015 sera illustré par l’artiste montréalaise Annie Descôteaux. Naïves dans leur manière, éclairantes par leur propos, les œuvres de Descôteaux dialogueront avec les mots pour constituer un ensemble cohérent. Nous vous invitons à partager la poésie. La revue Estuaire telle que vous la connaissiez n’est plus.

Yannick Renaud 

Yannick Renaud, à la direction d’Estuaire désormais, place donc les publications actuelles sur la même ligne éditoriale que ses prédécesseurs. Il en suit également les traces en préservant les rubriques abordées annoncées au sommaires : « Liminaires », qui proposent un avant propos expliquant les choix qui ont motivés le numéro, des « Poèmes », dont les auteurs sont présentés discrètement par quelques lignes qui visent plus à en offrir une biographie qu’à soutenir une pensée critique sur leur œuvre, et des « Critiques » servies par des noms dont les domaines de prédilection sont tout à fait hétéroclites.

Le lecteur, déjà conquis par l‘esthétique élégante de ce volume, a donc tout à espérer de ce qu’il va y trouver. Et autant dire que la diversité de propos et des auteurs qui sont mis à l’honneur ne peuvent qu’éveiller sa curiosité et satisfaire son attente. Les poètes et leurs textes sont présentés de manière aérienne et sobre. Un nom et le titre des textes sur une page de couleur, puis les poèmes, qui se suivent, quelle que soit leur volume, d’une page à l’autre, ponctués par un espace scriptural laissé vierge. Et les noms proposés qui évoquent la multiplicité du paysage de la poésie québecoise francophone laissent rêveur : pour ce numéro-ci Nicole Brenard, Marie-Eve Comptois, Marie-Andrée Gill, Annie Lafleur, Catherine Lalonde, Tania Langlais, Dominique Robert, Hector Ruiz, Emmanuel Simard et Yolande Villemaire.

Suivent un appareil critique dont les thématiques abordées ne sont pas guidées par un fil directeur particulier, ce qui fait la richesse de ce panel de réflexions sur la littérature, ici servi par Catherine Cornier-Larose, Jean-Simon DesRochers et François Rioux.

Estuaire offre donc une diversité de thématiques et de voix, dans un écrin de papier. Le lecteur se laisse immerger dans ces pages dont l’esthétique rivalise avec la qualité éditoriale. De découverte en découverte, il peut se laisser happer par un panel de poèmes dont la mise en page n’alourdit en rien la présence. Puis il découvre un appareil critique d’une haute tenue, qui ouvre à de multiples questionnements sur la littérature. On ne peut donc que souhaiter qu’Estuaire poursuive sa route.