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Roland LADRIERE : Inconnaissance éblouie, suivi de La ville reflétée

 

Il faudrait avancer longtemps ; longtemps et patiemment dans la poésie de Roland Ladrière, pour en dessiner un sens ; une destinée, une traduction philosophique ou même, plus simplement : sémantique.

Je ne prétends pas, évidemment, que cet homme aimable et cultivé soit sans savoir. Je prétendrais, moins encore, que cet humaniste se contenterait de flotter dans un impressionnisme vague. Il suffit de le rencontrer pour percevoir, en lui, non seulement un être d’une rare aménité, mais aussi un homme de culture. Le terrain de vivre aura souvent retourné l’âme, le cœur et la vie de Roland. La culture remue le terreau de l’être ; elle ramène à l’humus, à l’humain. Ladrière a lu, médité, songé et construit un être intime, qui ne ressemble en rien à une tour d’ivoire, à un surplomb, à un siège cathèdre.

Mais c’est un être original.

Voilà donc un livre que j’aimerais aborder hors du savoir. Car il m’est tombé dessus sans crier gare, comme pour rallumer en moi la poésie. Qu’il s’agisse d’inconnaissance ou de ville reflétée, les vers et la prose de Ladrière usent de sa culture pour la faire oublier. Les pages se tournent, donc, ici, dans la merveilleuse puissance des commencements.

 

Vers l’aphasie des fleurs,
la conjonction

des solitudes,

 

lit-on par exemple, page 41, et, même si le même poème, à la même page, « redemande à la chair / de redevenir / … Verbe », on n’y lira qu’énigme et tremblement.

L’œuvre de Roland Ladrière, mériterait bien mieux qu’une note brève. Mais mon obligatoire concision ne la trahira pas, je l’espère. Lisez ce petit livre. Il prend, à la racine, la question de la parole et, à chaque page, il vous renseignera sur votre propre ignorance éblouie.

Il vous invite à remonter ce qui pousse à parler jusqu’à son secret. Le cœur palpite, la langue bouge. La vérité de l’être est un abime.

 

Voici des poèmes.