1

SOAPBOX N°3 Editeur de livres d’artiste

 

Collection de lumbo  Série Passage du sud-ouest

 

~ Roberto San Geroteo, Je temmènerai en enfance, suivi de Matin au corbeau, janvier 2012. (5 €)
~ Laurent Albarracin, Le Poirier, illustré par Pierre Bessompierre, février 2012. (5 euros)
~ Olivier Hervy, Revue, frontispice de Jean-Pierre Paraggio, avril 2012. (5 €)
~ Jean-Yves Bériou, Le Sanglier étourdi par la tombée du jour, septembre 2012. (5 €)
~ Georges-Henri Morin, Les Lits clos, poèmes et dessins de l’auteur, septembre 2012. (5 €)
~ Guy Cabanel, Haïkus, décembre 2012. (5 €)
~ Ana Tot, Lamer intérieur, décembre 2012. (4 €)
~ Jean-Yves Bériou & Jean-Pierre Paraggio, Et on sen va, février 2013. (8 €)
~ Louis-François Delisse, À Gombo, enterrée au cimetière de Thiais depuis le 3 janvier 2011, avec quatre stèles de J.-P. Paraggio, février 2013. (8 €)
~  Guy Cabanel & Georges-Henri Morin, Les Esquilles, Juin 2013. (6 €)
~ Jacques Abeille, LOrigine des images, Juin 2013. (4€)

 

à paraître à l’automne 2013

dans la série Passage du sud-ouest

~ Pierre Peuchmaurd ~
loin de lisbonne
un poème de 1993 réédité sous un frontispice de Georges-Henri Morin
5 euros, franco de port

 

« (…) cest toujours de limmanence cachée, mais clignotante, scintillante, qui fait signe et qui se dévoile quand elle veut et

… quand vous pouvez. » Pierre Peuchmaurd, 2004.

 

 

~ Ildefonso Rodríguez ~
DISOLUCIÓN DEL NOCTURNO
(ediciones amargord, colección transatlántica, Madrid, 2013)

 

        À la façon du rêve, l’écriture enveloppe de peaux son objet, le déguise, le stratifie. L’auteur-lecteur d’un tel texte devra pratiquement se transformer en paléographe, exposer en pleine lumière des restes déjà quasi oubliés d’une langue qui eut un jour sa propre vie. Ce livre a poussé comme une demeure familiale au cours des années, avec des rajouts, de nouvelles chambres. Uni fraternellement avec un autre livre, Son del sueño (Musique du rêve), c’est une grande dérive, le nœud inextricable de ce qui hantait alors mes nuits. L’écheveau des rêves comme autobiographie, ou le simple plaisir du retour sur les scènes d’autrefois (en dépit de la mise en garde de Delfin Prats : « Ne retournes pas là où tu fus heureux »). Avec des adhérences ici et là, une causerie lors d’une réunion de psychanalystes, des annotations dans le « nocturnier », les films racontés dans El signo del gorrión (Le signe du moineau). Livre de greffes, hybride, qui se dresse parfois comme un poteau totémique aux nombreuses entailles, avec de plus en plus de visages, de silhouettes, d’événements, polymorphe ; d’autres fois dégradé, sylve de lectures variées, un embrouillamini, un drôle de feuilleton. Il a emprunté des apparences successives (même s’il a révélé son nom d’emblée), il a souffert l’oubli, puis connu un regain d’enthousiasme (à cause de ce que pointe Henri Michaux : « Il faut que je me pousse à écrire pour remarquer à mesure qu’il (le rêve) n’est pas absolument quelconque»). Il s’en remet désormais à ce nouveau souffle, ouvert à la générosité d’autres lectures.

 

Ildefonso Rodríguez

(4ème de couverture traduit par Martine Joulia & Jean-Yves Bériou

 

«...mais le temps ne moublie pas.»*

 

Ce feuillet d’amour, d’effroi, et de mousse,
paraît au gré de nos humeurs.
Saopbox est un soupir de l’umbo.

Numéro 3  –  2013.
Toute correspondance
Jean-Pierre Paraggio, 23 rue des Princes, 31500 Toulouse   -   jeanpierreparaggio@yahoo.fr

 

* « Et joublie le temps, mais le temps ne moublie pas. » Annie Le Brun
En encart : un dessin de Owen Jones, 1856.

~ Louis-François Delisse : Aile, elle, une anthologie des poèmes écrits en Afrique (« mon « livre nègre » composé de neuf recueils écrits au Niger »), Le Corridor bleu.
~ Choix de poésies amoureuses des Touaregs par Louis-François Delisse, Le Corridor bleu, 2007.

~ Louis-François Delisse ~

 

      Puissance de la censure, je suis resté dans l’ignorance absolue du Journal de Route du nigérien Damouré Zika, infirmier et adjoint de Jean Rouch à la caméra et aux scenarii de ses meilleurs films, publié pourtant dans la nouvelle Nouvelle Revue Française (NRF) pendant mes années à Niamey ; aucun de mes amis pourtant entichés des auteurs de la NRF ne m’en parlait. Et je connaissais Damouré, par son fils, bon élève de ma classe, venu un matin froid, couvert de huit « boubous » de papa « qui est au cinéma à Paris chez monsieur la Rouche. » Mais dans mon programme de littérature africaine enseignée à Zinder à partir de 1970, je n’ai rien mis de Damouré Zika ! Ne vous étonnez pas de cette puissance de la censure qui médusait aussi Guy Lévis Mano à mon endroit, malgré deux colonnes dans le Monde littéraire sur notre « Soleil total », courant 1960-61. C’est un nigérien qui m’a fait connaître ce Journal de Route de Damouré Zika, réédité par Mille et une nuit, un chef d’œuvre de l’oralité, en 2007, mais dont je n’avais pas vu une seule ligne avant ce jour !

      Et quand GLM m’a présenté à telle anthologie de la nouvelle poésie, j’étais refusé en tant que francophone dans l’une et dans celle de la francophonie, me dit-il, comme français. Si René Char et Henri Michaux me dirent leur admiration pour Soleil total, personne ne m’a retrouvé l’article que Le Monde des livres lui avait offert, en 1960-61.

L.F.D., Charles Foix, Ivry-sur-Seine, 2013.

~ Damouré Zika, Journal de Route, édition établie par Eric Dussert aux Mille et une nuit, 2007.
~ Louis-François Delisse, Soleil total, éditions G.L.M., 1960. Cette édition est toujours disponible.
~ Bessompierre ~

La valise Mexicaine

Le Manuscrit trouvé à Saragosse est une fiction écrite par le comte de Potocki qui relate des histoires extraordinaires découvertes dans une malle dont l’origine est ancienne et inconnue.

De nombreuses bouteilles lancées à la mer n’atteignent pas les rivages espérés et d’autres plus chanceuses abordent parfois des côtes lointaines. Les messages qu’elles contiennent ont été écrits en d’autres temps et pour d’autres lieux. L’effet troublant qui résulte de leur découverte c’est l’absence d’indication d’un destinataire, dans le meilleur des cas, il est juste signifié en exergue du message, « à celui qui trouvera ce message » .

A qui sont adressés ces messages, ces pensées, ces récits, placés dans des bouteilles jetées à la mer, cachés dans de vieilles malles des coffres ou des jarres, scellés parfois dans des murs, à l’abri même d’études de notaire, abandonnés à la course du temps et dont les destinataires lorsque le hasard les désignent sont tout à fait aléatoires ?

Le geste est bien sûr sous-tendu par l’idée qu’un passant un pêcheur un archéologue trouvera le message et en fera bon usage. Mais la condition préalable dans tous les cas c’est la destruction possible, la disparition, la perte accidentelle, dans leur trajectoire temporelle ou spatiale, de ces objets. Ainsi rien n’est moins sûr que le succès leur destination. N’y a-t-il pas là une indication cachée que l’on s’en est remis à la divinité qui doit juger et décider de l’issue de l’affaire et pour les plus cartésiens à la loi du hasard qui n’en est pas moins une façon de s’en remettre à une force supposée supérieure ?

On peut dès lors imaginer, inventer toutes sortes d’explications à ces actes de détresse, de jeu ou à ces coups de poker, même feindre le rationalisme le plus radical, l’intention du geste reste de marbre devant toutes ces assertions dans l’évidence magique qui a conduit l’auteur du message à s’en remettre ainsi à ce qui le dépasse.

Oui on peut dès lors supposer, par un geste de déni de toute hésitation rationaliste, séquelle malheureuse d’un esprit fort peu porté par la rêverie, que se dissimule derrière ces faits une intention un peu inavouable, tenue secrète par son odeur d’enfance incorruptible comme le dirait René Char, et qui n’ose déclarer que l’on s’adresse à la divinité, parmi les destinataires peu probables de ces messages, ou à une justice au dessus des hommes qui serait le juge et le témoin investi de prendre en considération, par dessus l’immense béatitude de l’espèce, la détresse, l’immense solitude existentielle que nul humain ne saurait consoler, tellement la condition humaine qui s’y exprime est mise à nue comme la friture encore étincelante des éclats de la mer l’est sur le gril.

Et c’est à cet endroit que Monsieur le Temps, dans sa grande pelisse et avec sa grosse main chaude prend le message et après l’avoir caché dans la doublure de son manteau s’en va lentement le porter vers une destination que lui seul connaît, à l’exception des rêveurs et des innocents, en tapotant paternellement sur l’épaule de l’inquiet qui le lui a remis.

 

Et c’est peut-être ce qui est arrivé à la valise mexicaine lorsque le photographe Robert Capa voulant préserver des milliers de négatifs photo de la guerre d’Espagne en 1939 devant l’avancée des troupes franquistes les a remis à une main amie et qui nous ont été rendus quelques 70 après sans avoir été jamais vus par quiconque ni développés, enfermés dans les trois boîtes correspondantes à leur trois auteurs, Gerda Taro, Chim, Robert Capa.

Cette valise mexicaine, nommée ainsi à cause d’une autre valise contenant des photos de la guerre d’Espagne qui avait fait un tour par le Mexique, a connu des mains successives qui l’ont protégée et mise à l’abri pendant tout ce temps c’est-à-dire pendant tout le reste du vingtième siècle avant d’être restituée dans le siècle suivant c’est-à-dire en l’an 2007 à la connaissance de l’histoire.

Ces photos sont l’œuvre d’une jeunesse, celle de leurs trois auteurs dont deux ont connus une fin tragique, Gerda Taro* lors de la bataille de Brunete, et Robert Capa plus tard pendant la guerre d’Indochine. L’œuvre aussi de la jeune Espagne révolutionnaire dont le destin a été stoppé et dévoyé par l’ombre fasciste et sur les épaules de laquelle reposait malheureusement le poids trop lourd de la révolution dans un monde qui n’en voulait pas .

Œuvre d’une jeunesse pétrifiée par le feu de la guerre et qui nous parvient aujourd’hui dans le présent d’un regard non vu depuis plus de 70 ans, nous restituant intacte l’émotion du moment, comme la première lumière de l’univers émise quelques 370 000 après le big-bang et qui nous parvient aujourd’hui après 13 milliard et demi d’années, l’âge de l’univers et que l’on appelle le fond diffus cosmologique.

Parmi ces clichés, présentés pour la première fois à Arles en 2011, nous avons pu voir avec émotion Garcia Lorca discutant avec un ami, des miliciens de la jeune république nettoyant les parquets de la demeure des ducs d’Albes afin d’y préserver de la guerre les œuvres d’arts qu’elle contenait, sur un autre un soldat sur le front abrité derrière une barricade de sacs de sable se retourne après avoir tiré une rafale sur l’ennemi et adresse un beau sourire à la photographe Gerda Taro, d’autres courent dans la poussière que soulève sous leurs pas les balles de l’adversaire, un autre, soldat des transmissions, arrêté par une balle, est figé dans un arbre dans un geste de stupeur adressé à l’éternité, pendant que d’autres, également sur le front, discutent ensemble, appuyés contre un rocher sur lequel se tient un ours brun.

Ces photos, sous la forme de planches contact, ont été présentées pour la première fois au public au musée de l’Arles antique à Arles en 2011 et pour une part rassemblées dans un livre, ‘La Valise mexicaine’, édité par les Editions Actes-Sud en 2011 également.

 

Arles, septembre 201

 

« La poésie, à se demander ce quelle est, on finit par mêler ses figures ou par la voir trop nue, façons parmi d’autres d’en détourner le regard. » Pierre Peuchmaurd in Le Matricule des anges n°54, juin 2004

 

 

 

 

~ Jean-Pierre Paraggio ~

Fâcheries, brouilles et querelles ! - Collage, 2013

 

l’impromptu n°11 est disponible,

envoi contre 3 euros.