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Sur deux récents livres de Gabrielle Althen

 

C’est la vie qui regarde la vie qui respire, et le soupir grandit.

Gabrielle Althen

 

Vie saxiphrage, de petites proses affinées et des poèmes en vers qui disent le miroir que nous sommes d’une lumière silencieuse plus vaste que nous. Cela éclaire et éclate chaque jour devant nos yeux, et nous ne le voyons guère. Ou bien, plus. Une parole égarée.

Cette gaze de l’air sur le lieu délicieux, ce rien heureux et ces lignes sans mots pour onduler plus haut que les tourmentes vaines, lorsque là-bas, contre le jour trop clair, la neige sent bon le mimosa et que la liberté s’amuse sans gestes au bord de toi.

Tout est libre, redit le poète. Sauf nous, qui sommes enfermés en nous-mêmes, de nous-mêmes. Librement aussi, d’une certaine manière. Cela questionne cependant :

L’énigme est une roue céleste qui se laisse traverser sans se résoudre et le temps la reçoit sans y toucher, tel un vent léger faisant filer les herbes lisses.

Il y a le son qualifié d’Incendie sonore, son qui porte la beauté de la parole d’avant, toujours renaissante. Comme la fleur. Ou la rose. Ce n’est que notre regard qui ne voit plus ce qu’il voyait auparavant, l’invisible. La signature des choses. Ici, en ce monde, tout est cependant symbole. Et le regard absent n’absente pas l’authenticité symbolique de ce monde. Même si nous acceptons le théâtre virtuel que d’étranges forces fabriquent avec nos faux outils de mauvais compagnons. Cela n’empêchera pas le poème de Gabrielle Althen de porter l’espérance :

Il y a dans l’air des exploits impalpables qu’on appelle des anges et qu’on ne verra pas.

Gabrielle Althen donne simultanément ou presque La splendeur et l’écharde, aux éditions de Corlevour. Des essais. Autour de la poésie, de la peinture, de la musique. Ses mondes en somme. Lisant l’œuvre du poète, il est émouvant de croiser ses univers en ouvrant cet opus passionnant. On trouve ici ses lectures sources. Il ne s’agit pas d’un livre de critiques, au sens universitaire de ce terme. Ce sont des rencontres, des appréhensions et des confrontations, avec des œuvres et des artistes d’importance. La poésie affronte le Beau. Et celui-ci, n’en déplaise à l’air du temps, n’est pas subjectif. On croisera Pessoa, la musique, Picasso, la poésie, Rilke, Eluard, Handke, Char, Baudelaire, la mystique de Jean de La Croix ou Ingeborg Bachmann, dont on ne mesure pas encore assez l’influence souterraine sur ce début de siècle. Point de précipitation ici, des méditations plutôt. Avec des œuvres. Au fil du temps. Ce qui bâtit, en somme. Althen offre différents angles de vue, et aussi de petites proses/pensées, aphorismes, au cœur du livre. Du bel ouvrage, et il est heureux qu’un éditeur prenne encore, aujourd’hui, le temps de publier cet ensemble.

 

Des poèmes de Gabrielle Althen dans Recours au Poème :

http://www.recoursaupoeme.fr/po%C3%A8tes/gabrielle-althen