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Ta lampe d’amour sent la jacinthe

 

Ta lampe d’amour sent la jacinthe
& la haute mer où les mouettes s’en vont
suivre au sillage les cueilleurs de ciel

elle embaume la berge d’automne l’algue
rousse que les heures étirent dans la houle
de tes lueurs ô lanterne aux huiles
pressées à froid des étoiles délaissées
chiens errant dans la sorgue marine
renversant les poubelles du désir
déchirant les songes les plus rêches
de leur crocs jaunes de lune cireuse
ô lanterne orientant le cours des fleuves
lissant mes doigts dans tes ombreuses
feuilles mettant à genoux le silence
glissant ma saoule errance dans les plis
de ta lumière qui coule d’autant plus
qu’elle se musse à la stupeur
des orages & des brouillards de l’âme

dans ton coffret de mauve musquée
où la mer telle un fauve s’embusque
dans ses vagues & cambre ses reins
je recueille les astres dans leurs ourlets
décousus & mon mufle scintille
de promesses laiteuses & de frissons
qui n’ont de semblable que ceux
des grandes fièvres des mourants
& la soif sauvage n’en finit pas
de feuler à tes flancs enflammés
& ta lampe brûle & brûlera encore
sous les pluies lourdes & le noroît
ouvrant de ses pétales corallins
cette plaie que nul ne fermera 

 

 

extrait de Les Belles Choses – Paul Dirmeikis – Editions de L’Eveilleur (2014)